RENCONTRE AVEC NATHALIE LE GALL IADE À L’ORIGINE DU DÉVELOPPEMENT DE L’USAGE DE L’HYPNOSE EN CHIRURGIE AU CH DE QUIMPER - L'Infirmière Magazine n° 355 du 01/12/2014 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 355 du 01/12/2014

 

CARRIÈRE

PARCOURS

M.-C. D.  

« Proposer l’hypnose nous permet de nous réapproprier un outil que nous avons en nous : les mots. Les utiliser apporte beaucoup aux patients. »

La confusion est charmante. Mme M., 81 ans, fait parvenir un carton de remerciement à l’attention de « l’ange gardien » qui a été présent auprès d’elle tout au long de son intervention chirurgicale. Sur l’enveloppe, elle a noté « Nathalie Le Gall. Service d’hypnose. Centre hospitalier de Cornouaille. » En décembre 2013, un tel service n’existait pas encore… Mais Mme M. a le droit d’être imaginative : elle est la première patiente de l’établissement de Quimper à avoir été opérée sous hypnosédation, grâce à l’Iade qui a accompagné sa transe.

Quand elle arrive au Centre hospitalier de Quimper, diplôme d’Iade fraîchement décroché, Nathalie Le Gall est déterminée à se consacrer à ce qui l’a poussée à se spécialiser en anesthésie, après dix ans passés dans des services de réanimation et d’onco-hématologie : « Même si mes soins se caractérisaient par une grande technicité, le relationnel avec le patient me paraissait de plus en plus fondamental. Dans ce genre de service, le besoin de présence et d’écoute de la part des patients est très prégnant. J’ai voulu me concentrer davantage sur la prise en charge de la douleur. » Quelques années sont nécessaires pour mettre sur pied un projet de formation et le présenter à la direction des soins. Nathalie Le Gall veut se former en hypnothérapie. Le feu vert lui est donné, à condition que cette démarche s’inscrive dans un projet d’équipe.

En 2013, l’Iade suit une formation sur la douleur aiguë et l’anesthésie à l’Institut Émergences, à Rennes. Deux collègues suivent la voie qu’elle a ouverte. Ils sont à présent suffisamment nombreux à être formés pour proposer une consultation infirmière préopératoire, inaugurée ce mois-ci. En 2015, six Iade supplémentaires seront formées, en compagnie de deux médecins anesthésistes. Des formations en hypnose à destination du personnel urgentiste et en pédiatrie sont également en cours de formalisation. Une équipe plus étoffée d’Iade pouvant pratiquer l’induction hypnotique permettra d’atteindre l’objectif à moyen terme que s’est fixé le pôle chirurgie du CH : offrir trois fois par semaine la possibilité de pratiquer des interventions sous hypnose.

Pour le moment, une quarantaine d’opérations ont été effectuées par hypnosédation au CH de Cornouaille. Ce type d’intervention prend des airs de ballet silencieux, rythmé par des jeux de regards entre chirurgien et infirmières. L’Iade, penchée au dessus de la patiente, lui murmure des propos entendus par elles seules, en calant son débit sur la respiration de l’opérée. Elle maintient sa main sur celle de la patiente qui, à un moment, lui fait le signe convenu avant l’intervention. L’infirmière transmet au chirurgien, qui administre une nouvelle dose d’anesthésiant local. Puis elle reprend l’entretien avec la patiente, de manière à la plonger dans un état de transe encore plus profond. Après l’opération, l’infirmière anesthésiste fait progressivement revenir la patiente à la réalité. Au bout de quelques minutes, celle-ci est en mesure d’écouter le compte-rendu du médecin.

Nathalie Le Gall se réjouit de pouvoir proposer l’hypnose aux patients du CH. « Cela nous permet de nous réapproprier un outil que nous avons en nous : les mots. Les utiliser apporte beaucoup aux patients. » Grâce au son de sa voix, à ces mots qui calment et qui permettent de se rendre vers un ailleurs où angoisses et douleur ne sont plus perceptibles, l’infirmière a pu améliorer sa communication avec les patients. L’écoute occupe une place de choix dans cette nouvelle forme de relation thérapeutique. Nathalie Le Gall se souvient d’un jour où elle a été appelée en salle de réveil auprès d’un jeune homme impossible à maîtriser, hurlant sa douleur et sa colère : « J’ai écouté pourquoi il était tellement hors de lui. Il avait eu le sentiment d’avoir été mal traité par une infirmière, lors de son accueil. Je me suis mise au même niveau émotionnel que lui en lui disant que je comprenais sa colère. Cela nous a ensuite permis de travailler ensemble sur la douleur, de la réifier pour qu’il soit en mesure de la modifier à sa guise et de l’atténuer. »

MOMENTS CLÉS

1991 DE à Émile-Roux (AP-HP).

1992-2000 Infirmière en réanimation et en onco-hématologie à l’hôpital Laënnec, à Paris.

2000-2002 DE d’infirmière anesthésiste à la Pitié-Salpêtrière.

2002 Iade au CH de Cornouaille (Smur et bloc opératoire).

Janvier-novembre 2013 Formation « Hypnose, douleur aiguë et anesthésie » à Rennes.

Décembre 2013 Première induction sous hypnosédation.