La noyade de l’enfant - L'Infirmière Magazine n° 349 du 15/07/2014 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 349 du 15/07/2014

 

FORMATION CONTINUE

FICHE TECHNIQUE

JÉROME MAX  

La noyade représente la première cause de décès de l’enfant dans les accidents de la vie quotidienne. Pour en limiter les conséquences funestes, la prévention, la surveillance constante et l’apprentissage des gestes de premiers secours sont une nécessité.

Première cause de décès de tous les accidents de la vie courante chez les jeunes enfants, la noyade constitue un problème de santé publique majeur. En effet, l’enquête « Noyades 2012 » a dénombré 1 235 noyades accidentelles dont 496 (40 %) suivies d’un décès parmi lesquelles : 14 % d’enfants de moins de 6 ans (170 noyades dont 28 décès). Les plus nombreuses surviennent en baignoire ou à l’extérieur dans les jardins ou dans les piscines privées. Les petits de moins de 6 ans se sont noyés à cause d’un manque de surveillance d’un adulte et de leur inaptitude à nager.

Cependant, la mortalité a fortement diminué ces 30 dernières années, du fait de l’amélioration des conditions de sécurité, de l’intervention des secours pré-hospitaliers et de l’initiation précoce aux gestes d’urgence.

Tout citoyen, parents, amis, professionnels de santé ou même assistantes maternelles peuvent être amenés à apporter les gestes de premier secours.

DÉFINITION

• Une nouvelle définition faisant l’objet d’un consensus a été élaborée au niveau international, sous l’égide de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Après un dialogue et un débat prolongés, la définition suivante a été adoptée : « La noyade est une insuffisance respiratoire résultant de la submersion ou de l’immersion en milieu liquide. »

• Les experts ont également convenu, par consensus, qu’il ne fallait plus utiliser les expressions noyade mouillée, sèche, active, passive, silencieuse ou secondaire que l’on peut retrouver dans d’anciens livres traitant des urgences pré-hospitalières voire même dans les anciens cours d’Ifsi… Deux termes de cette définition ont également été décrits de manière plus précise :

– La submersion correspond à une situation où les voies aériennes sont immergées sous l’eau ;

– l’immersion correspond à la situation suivante : voies aériennes au-dessus de la surface MAIS inondées.

CONDUITE À TENIR

• Il est important, dans un premier temps, d’assurer la sécurité individuelle du sauveteur. Il paraîtra incom’upréhensible qu’un adulte se jette à l’eau sans savoir nager ou ne disposant pas des compétences physiques pour porter secours dans une mer agitée avec de grosses vagues, alors même que des sauveteurs en mer sont présents.

• L’objectif principal du sauveteur-secouriste doit être de réanimer l’enfant dès le repêchage, sans attendre les secours en cas de détresse majeure.

• En fonction du bilan initial, la prise en charge des secouristes et/ou professionnels de santé présents sur les lieux, y compris en qualité de témoins isolés, diffère.

• En cas de troubles de la conscience isolés :

– Apprécier l’état de conscience de l’enfant ;

– Assurer la liberté de ses voies aériennes ;

– Le placer ensuite en position latérale de sécurité (PLS), le déshabiller, le réchauffer puis le couvrir ;

– Surveiller, dans l’attente des secours, ses fonctions vitales, en particulier la respiration. L’alerte des secours spécialisés devra être précoce.

• En cas de dyspnée avec conscience conservée :

– Position demi-assise et déshabillage ;

– Réchauffement puis surveillance, notamment de la fonction respiratoire.

• En cas d’arrêt cardio-respiratoire (absence de conscience, absence de respiration et absence de pouls carotidien chez l’enfant de plus de 1 an ou huméral chez l’enfant de moins de 1 an) :

– Réaliser le bilan et libérer les voies aériennes supérieures ;

– Débuter la réanimation par 5 insufflations initiales ;

– Poursuivre avec 15 massages cardiaques externes (MCE) avec un rythme des compressions d’au moins 100 par minute sans dépasser 120/mn.

Avec l’aide d’autres personnes présentes, la réanimation cardio-pulmonaire sera réalisée à deux secouristes, dès que l’un des deux aura transmis l’alerte. La réanimation par MCE, seul, n’est pas recommandée. Au final, cette prise en charge est similaire à celle d’un arrêt cardiaque classique. Attention toutefois, dans plus de 65 % des cas, l’enfant va régurgiter son contenu gastrique ou l’eau inhalée. En cas de vomissements, placer rapidement la victime sur le côté. Ces gestes d’urgence doivent être poursuivis jusqu’à l’arrivée des secours spécialisés ou jusqu’à la reprise d’une activité cardiaque efficace.

INTERVENTION DES EQUIPES DE SECOURS

• En cas de détresse majeure sur les lieux de l’intervention, la réponse graduée permettra, dans un premier temps, aux sapeurs-pompiers de mettre l’enfant sous inhalations d’oxygène à un débit de 3 litres par minute au masque haute concentration en présence d’une dyspnée.

• En cas d’arrêt cardiaque, ils réaliseront, si nécessaire, une aspiration des régurgitations avec une sonde adaptée et poursuivront les gestes de base entrepris par les témoins (MCE-VA). À l’arrivée de l’infirmier des sapeurs-pompiers, un protocole de soins d’urgence « arrêt cardiaque de l’enfant » permettant, notamment, la pose d’une voie veineuse périphérique (VVP) et l’injection d’adrénaline, sera mis en œuvre, au vu des critères d’inclusion, puis à l’arrivée de l’équipe du Smur, la réanimation se poursuivra par une intubation oro-trachéale et la mise en place d’une sonde naso-gastrique afin de vidanger l’estomac.

• Toute noyade ou « pré-noyade » doit être hospitalisée dans un service spécialisé. De fait, en milieu hospitalier, les patients en urgence relative (présence d’une toux ou d’une dyspnée modérée) bénéficieront d’une surveillance afin d’exclure l’apparition d’une évolution défavorable sur le plan respiratoire.

• Il est à noter qu’une durée de submersion ou immersion inférieure à 10 minutes, la présence de témoins formés, une alerte précoce et des gestes de secourisme adaptés sont des facteurs de bon pronostic.

ÉVITEZ L’ACCIDENT

La prévention des noyades, surtout chez les enfants, passe avant tout par un rappel des consignes de sécurité.

• Ne pas laisser un enfant de moins de 4 ans seul dans un bain, même avec des équipements adaptés ou à proximité d’une piscine.

• Mettre en place des système de sécurité sur les piscines privées, systèmes rendus obligatoires depuis la loi n° 2003-9 du 3 janvier 2003.

• Équiper tous les jeunes enfants de protections individuelles (bouée, brassards, gilet flottant).

• Apprendre à nager dès le plus jeune âge aux enfants.

• Connaître les gestes de secours : les parents comme les personnels assurant la garde d’enfants sont concernés.

• Respecter les zones de baignade.

SAVOIR PLUS

→ Surveillance épidémiologique des noyades Enquête Noyades 2012 sur le site de l’InVS : www.invs.sante.fr (http://petitlien.fr/7c56)

– Smur BMPM, notamment les protocoles du carnet d’intervention (application Smur BMPM) sur le site : www.smurbmpm.fr ()

Manuel de soins en urgence pédiatrique, Barbara Aehlert. Cet ouvrage est la traduction de la 2e édition révisée du Pediatric Advanced Life Support Study Guide, actualisé sur la base des dernières Recommandations internationales (novembre 2005).

Médecine d’urgence préhospitaliere, Pierre-Nicolas Carron, Éditions Médecine et Hygiène, mai 2013.

Site d’Urgences-santé Québec avec vidéo sur la prise en charge de détresses vitales y compris pédiatriques.

www.urgences-sante.qc.ca

(http://petitlien.fr/7c59)