TROIS PETITS JOURS ET PUIS S’EN VA - L'Infirmière Magazine n° 339 du 15/02/2014 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 339 du 15/02/2014

 

CHIRURGIE

ACTUALITÉ

DU CÔTÉ DES… ÉTABLISSEMENTS

SANDRA MIGNOT  

La chirurgie accélérée du côlon fait ses premiers pas à l’AP-HP. Une procédure d’avenir qui nécessite une forte présence paramédicale au lit du patient.

L’hôpital Saint-Antoine (AP-HP) a lancé, début janvier, un programme de chirurgie du côlon en trois jours, contre une moyenne de huit jours habituellement. Cette procédure dite « de récupération rapide » (ou « fast-track » en anglais), permet un retour rapide et complet du patient vers l’autonomie via une prise en charge anesthésique spécifique, une intervention par cœlioscopie et la stimulation accélérée de la reprise du transit. Il s’agit d’une hospitalisation plus courte, qui réduirait le risque de contracter une infection nosocomiale, met en avant l’AP-HP. Initiée au Danemark en 1995, la procédure est devenue la norme en Grande-Bretagne depuis plusieurs années. En France, quelques établissements privés l’ont déjà mise en place, mais elle reste peu développée. Le protocole prévoit l’absorption d’une boisson sucrée deux heures avant l’anesthésie, puis l’arrêt des liquides. Quant aux solides, seulement six heures de jeûne pré-opératoire doivent être observées. L’analgésie sera de préférence non morphinique, cette molécule ralentissant le transit. Dès l’après-midi qui suit la chirurgie, le patient est levé par le kinésithérapeute et l’infirmière.

Déambulation préconisée

Cette procédure a dû être légèrement adaptée en France : difficile, en effet, de recommander la déambulation vers les salles de restauration ou de télévision puisqu’elles n’existent pas. « Mais, quelques pas dans le couloir peuvent suffire. Nous avons chiffré un objectif de 25 à 50 mètres de déambulation », précise le Pr Yann Parc, professeur des universités et praticien hospitalier au service de chirurgie digestive et générale de Saint-Antoine. Côté alimentation, des gommes à mâcher sont recommandées dès le retour du bloc. Un repas léger pourra être pris le lendemain. Si tout se déroule bien, le retour au domicile, sans suivi particulier, peut être envisagé à partir du troisième jour.

Une brochure a été spécifiquement conçue pour expliquer la procédure au patient. L’infirmière la remet, lors de la consultation, aux personnes éligibles – principalement des patients atteints de cancer du côlon ou de maladies inflammatoires du tube digestif, pour l’instant. Le déroulé de l’hospitalisation y est décrit. Pour les infirmières, la procédure ne semble pourtant pas aller de soi. « C’est trop rapide, remarque Mélanie Saulnier, IDE dans le service de chirurgie générale et digestive. Le patient souffre beaucoup quand on le lève. » La prise en charge de la douleur devrait être prochainement améliorée. « Nous avons des ajustements à apporter, bien sûr, nous n’en sommes encore qu’au quatrième patient, explique Ghislaine Thomas, cadre référente du service de chirurgie générale et digestive. Je pense que d’ici à un an, on trouvera cette organisation tout à fait normale. »

Évaluer la douleur

Selon le Pr Parc, l’objectif n’est pas de diminuer le temps de présence du personnel, mais plutôt d’augmenter le turn-over des patients. « Il faut être auprès du patient, surveiller sa glycémie, l’aider à se mobiliser, évaluer la douleur, résume-t-il. Et puis, il faut évidemment savoir comment réagir en cas de problème. Donc, cela nécessite vraiment la présence et la compétence d’une infirmière. » « Les patients accueillent cette chirurgie de manière variable, constate Yann Parc. Certains sont inquiets d’un retour précoce à la maison, comme on le note dans la chirurgie ambulatoire, mais ils ont le choix. Après, ils se montrent généralement très satisfaits. » Le chirurgien note également que « moins les gens passent de temps en chirurgie, mieux ils acceptent les traitements qui pourront suivre ».