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LE POINT SUR
Maladie inflammatoire chronique évoluant par poussées et touchant l’adulte jeune, la spondylarthrite ankylosante est l’un des principaux diagnostics différentiels de la polyarthrite rhumatoïde. Les formes invalidantes concernent 25 à 30 % des patients.
La spondylarthrite ankylosante est une maladie rhumatismale inflammatoire chronique, évoluant par poussées, touchant principalement le rachis et les articulations sacro-iliaques. Elle concerne 0,32 % de la population française, avec une nette prédominance masculine.
Une prédisposition génétique (l’antigène HLA-B27, human leucocyte antigen B27, est présent chez 90 % des patients) et une probable participation bactérienne (Chlamydiae, Yersinia, Salmonella ou Shigella, notamment) interviendraient dans la genèse de la spondylarthrite.
L’atteinte peut être :
→ Axiale (concernant le rachis, le bassin, la paroi thoracique), avec douleurs rachidiennes nocturnes et raideurs au réveil nécessitant un dérouillage supérieur à 1 heure, douleurs fessières ou inguinales associées à une boiterie, sensation d’oppression thoracique. Un syndrome pelvirachidien inflammatoire est inaugural dans deux tiers des cas.
→ Périphérique, avec douleurs articulaires des membres, gonflement d’un orteil “en saucisse” et inflammation des enthèses (points d’insertion des tendons sur les os), notamment au niveau du tendon d’Achille (responsable d’une talalgie inflammatoire).
La spondylarthrite peut évoluer vers l’ankylose (en raidissement progressif) du rachis, génératrice d’un handicap fonctionnel. L’ankylose thoracique peut être à l’origine d’une insuffisance respiratoire, et se compliquer d’atteintes extra-articulaires : oculaires (uvéite) le plus souvent, rénales (amylose ou glomérulonéphrites avec hématurie récidivante) ou cardiaques (insuffisance aortique, troubles de la conduction auriculoventriculaire, péricardite).
Le diagnostic repose sur l’examen clinique, un bilan biologique inflammatoire (élévation de la vitesse de sédimentation et de la protéïne C réactive) et des examens d’imagerie (radiographie, voire IRM ou scanner du rachis et des articulations sacro-iliaques, échographie des enthèses). Des échelles d’évaluation, sous forme de questionnaires appelés indices de Bath, permettent d’apprécier l’intensité de la douleur et l’importance de la raideur, mais aussi de mesurer le retentissement sur la vie quotidienne (fatigue, capacité à mettre des chaussettes, atteindre un objet élevé…).
Le traitement est symptomatique. Il vise à diminuer la douleur et la raideur, et à prévenir l’ankylose pour maintenir les capacités fonctionnelles du patient.
→ Les AINS : le traitement fait appel en première intention aux anti-inflammatoires non stéroïdiens, AINS, utilisés durant les poussées de la maladie. Ils sont associés à un protecteur gastrique en cas de risque gastro-intestinal majoré. En cas de contrôle insuffisant de la douleur ou de contre-indications aux AINS, le paracétamol et des antalgiques opiacés sont proposés. Les corticoïdes oraux ne sont pas recommandés, mais des infiltrations locales de triamcinolone (Hexatrione, Kenacort) peuvent être envisagées pour réduire l’inflammation locale.
→ Les anti-TNF alpha peuvent être utilisés, en cas d’échec des traitements de première intention ou d’aggravation avec inflammation persistante, en traitement de fond. Quatre anti-TNF alpha sont indiqués : infliximab (Remicade, réservé à l’usage hospitalier), étanercept (Enbrel s’injectant en SC), adalimumab (Humira en SC) et golimumab (Simponi en SC). La prescription d’anti-TNF alpha pour une spondyl-arthrite ankylosante est réservée aux spécialistes en rhumatologie et en médecine interne.
Les anti-TNF alpha exposent le patient au risque d’infections graves (tuberculose, légionelloses pulmonaires, mycoses systémiques, réactivation d’hépatite B, infections à pyogènes opportunistes…), d’aggravation d’insuffisance cardiaque ou de survenue de manifestations d’hypersensibilité cutanée parfois graves à type de syndrome de Lyell ou de Stevens-Johnson, qui peuvent survenir au décours immédiat de l’injection, mais aussi, plus rarement, 3 à 12 jours après) et à des réactions au point d’injection. La survenue de signes cliniques infectieux, fièvre, maux de gorge, toux, brûlures mictionnelles impose l’arrêt du traitement. Du fait de leurs effets indésirables, les anti-TNF alpha sont contre-indiqués en cas de tuberculose active ou latente non traitée, d’infections sévères et d’insuffisance cardiaque modérée ou sévère. Ainsi, avant l’initiation du traitement, un dépistage de tuberculose active ou latente doit être réalisé.
→ Les autres médicaments : hors AMM, le méthotrexate, la sulfasalazine ou le léflunomide peuvent être proposés en traitement de fond des formes périphériques. Mais il faut tenir compte de leurs effets indésirables hémato et hépatotoxiques. Le méthotrexate et le léflunomide sont par ailleurs tératogènes (nécessité d’une contraception efficace).
Attention ! L’association du méthotrexate (aux doses
→ 20 mg/semaine) à l’aspirine est contre-indiquée (déconseillée avec les autres AINS), en raison d’une majoration du risque hématotoxique.
→ La kinésithérapie constitue un traitement de première intention, indissociable du traitement médicamenteux. Elle est basée sur des exercices d’étirement et de tonification des muscles extenseurs et abducteurs. Elle permet d’assouplir le rachis, de lutter contre les déformations et d’améliorer la mobilité.
→ En période de poussées, la physiothérapie (application de chaleur ou balnéothérapie) peut soulager le patient.
→ Le port d’une orthèse lombaire peut être envisagé pour éviter les attitudes vicieuses et corriger les déformations du rachis.
→ Le cas échéant, l’arrêt du tabac est recommandé, surtout en cas d’atteinte de la cage thoracique.
→ La chirurgie (chirurgie du rachis, pose de prothèses de hanche…) peut être proposée dans les formes très invalidantes et destructrices de la maladie.
→ Soins relationnels : cette maladie nécessitant une prise en charge multidisciplinaire peut être très invalidante, douloureuse et anxiogène pour le patient. Il faut savoir se montrer à l’écoute de ce dernier afin de mettre en œuvre une prise en charge adaptée.
Internet
→ www.rhumatologie.asso.fr, portail sur le site de la Société française de rhumatologie destiné aux grandes maladies rhumatismales.
→ www.acsacc-France.asso.fr, site de la Fédération nationale des associations de lutte contre les conséquences de la spondylarthrite ankylosante et des spondyl-arthropathies.
Ouvrage
Ch. Prudhomme, Ch. Jeanmougin, G. Foeller, Orthopédie, traumatologie, rhumatologie, Coll. Dossiers Maloine de l’infirmière, Éditions Maloine 2007.
→ Rassurer les femmes en âge de procréer : la spondylarthrite n’a pas de répercussions sur la fertilité ni sur la grossesse. Néanmoins, une grossesse doit être planifiée et le traitement réévalué avant conception du fait des effets tératogènes de certains médicaments.
→ La pratique d’un sport est possible, et même conseillée pour renforcer les muscles. Les sports recommandés sont ceux qui mobilisent les muscles du dos et permettent d’ouvrir la cage thoracique, comme le dos crawlé ou le volley-ball. Des exercices d’autorééducation sont disponibles sur le site de l’Acsac.
→ Inciter les patients à consulter en urgence un ophtalmologiste en cas d’œil rouge, pouvant faire suspecter une uvéite.