DOULEURS ET MOYENS NON PHARMACOLOGIQUES - L'Infirmière Magazine n° 318 du 01/03/2013 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 318 du 01/03/2013

 

DOSSIER

L’ESSENTIEL

Les moyens non pharmacologiques ou non médicamenteux sont souvent plébiscités pour la prévention et le traitement de la douleur. De plus en plus de soignants reconnaissent l’intérêt et la nécessité de leur utilisation, comme le met en évidence la recommandation du 3e plan d’amélioration de la prise en charge de la douleur (2006-2010). Mal connues, et encore très peu enseignées, ces méthodes ne sont cependant pas encore utilisées de façon optimale. Plusieurs d’entre elles relèvent du rôle propre infirmier. Elles pourraient être plus fréquemment employées à l’initiative des soignants, qui les considèrent trop souvent comme une part annexe de leur savoir-faire. Elles sont, pour eux, de « petits moyens », auxquels ils n’ont recours que s’ils en ont le temps. Ce dossier présente une palette de certaines de ces pratiques, qui ont fait l’objet de travaux démontrant leur efficacité.

1. CLASSIFICATION ET DÉFINITIONS

Les moyens non pharmacologiques ou non médicamenteux se divisent en trois catégories : les moyens physiques et physiologiques, les méthodes cognitivo-comportementales et les méthodes psychocorporelles.

→ Les méthodes physiques et physiologiques, pour lesquelles on distingue deux sous-catégories : celles utilisant un moyen physique, le plus souvent au contact de la peau, pour stimuler les fibres nerveuses qui stoppent l’influx douloureux. Parmi elles, on peut distinguer le toucher, le massage, le peau-à-peau, la neurostimulation transcutanée ; celles utilisant des réactions physiologiques, comme les effets de la chaleur ou du froid. On place également dans cette catégorie l’absorption d’une solution sucrée associée à la succion chez le jeune enfant.

→ Les méthodes cognitivo-comportementales : le soignant accompagne le patient afin de l’aider à développer, et éventuellement modifier, son comportement pour faire face à la douleur, grâce à l’utilisation de ses facultés cognitives. Différentes méthodes et techniques en font partie : relaxation, confrontation imaginaire ou réelle aux situations redoutées, apprentissage social à travers des jeux de rôle, restructuration cognitive par le travail sur les pensées et les schémas mentaux. Cela permet au patient d’anticiper l’anxiété et donc, potentiellement, la douleur d’une situation redoutée, comme une intervention chirurgicale, ou de faire face à des moments de douleur intense (migraine, lombalgies), ou encore de modifier un comportement de phobie des soins.

→ Les méthodes psychocorporelles : le soignant accompagne la personne grâce à un ensemble d’approches partant du corps et ayant un impact sur le mental ou partant d’un travail mental ayant une influence sur le corps. Parmi ces méthodes, citons la relaxation, l’hypnose et ses dérivées (distraction, sophrologie), les massages de bien-être ou de confort, certaines pratiques d’origine orientale (yoga, Qi Gong, Shiatsu) et les techniques intégrant une pratique artistique (musique, danse, théâtre). Ces pratiques se nomment également « méthodes à médiation corporelle ». Ces différentes approches peuvent utiliser des outils communs comme la respiration, le relâchement musculaire, la visualisation, l’imaginaire…, parfois considérés comme des méthodes à part entière alors qu’ils correspondent à des éléments techniques issus d’une méthode.

Ces pratiques peuvent être associées entre elles et à des moyens médicamenteux, ce qui augmente les possibilités thérapeutiques offertes au patient. Le soignant a à sa disposition une très grande palette de moyens, qu’il peut agencer afin de mettre en place la combinaison la plus efficace pour soulager le patient.

2. MODES D’ACTION ET INDICATIONS

Méthodes physiques et physiologiques

La cryothérapie

→ Mécanisme d’action : entraîne une vasoconstriction suivie d’une vasodilatation favorisant la diminution de la douleur.

→ Indications : douleurs inflammatoires, musculaires (douleurs dentaires, céphalées, lombalgies chroniques).

→ Matériel : le froid peut être transmis par l’intermédiaire de compresses ou de linges froids (gant de toilette). La vessie de glace, les Physiopack© ou Coldpack© et le spray sont autant de moyens disponibles.

La chaleur

→ Mécanisme d’action : provoque une augmentation de la circulation locale et de la température cutanée favorisant la détente musculaire.

→ Indications : douleurs abdominales, spasmes intestinaux, raideurs articulaires.

→ Contre-indications : saignements et œdèmes.

→ Matériel : certains matériels permettant d’apporter du froid peuvent aussi être utilisés. La couverture ou le coussin chauffants, le sèche-cheveux, la lampe chauffante sont des solutions aisément disponibles. Les bouillottes seront évitées en raison du risque de brûlure.

La succion associée à l’absorption d’une solution sucrée

→ Mécanisme d’action : il n’est pas totalement expliqué, malgré les nombreuses études apportant la preuve de l’efficacité de ces deux moyens associés.

→ Indications : soins douloureux et/ou inconfortables de courte durée présentant une douleur d’intensité faible ou moyenne, chez le nouveau-né et le nourrisson de moins de 6 mois.

→ Contre-indication : douleur intense et prolongée.

L’utilisation du toucher

→ Mécanisme d’action : agit sur la perception cérébrale de la douleur à partir des signaux émis au niveau des récepteurs cutanés. La découverte du « gate control », ou théorie de « la porte », a permis de comprendre que si l’individu se frotte énergiquement la zone touchée lorsqu’il se cogne, il interrompt le message douloureux transmis au cerveau par des fibres de petit calibre et lui envoie un message de soulagement par des fibres de plus gros calibre, donc des voies plus rapides. Ce message favorise ensuite la sécrétion d’endorphines. Différentes techniques existent : le simple fait de toucher la personne soignée (poser sa main sur la sienne ou sur son épaule, par exemple), le peau-à-peau (nouveau-né), le massage de confort ou de bien-être, la stimulation transcutanée.

→ Indications : prévention des douleurs provoquées par les soins, douleurs chroniques, anxiété générée par la douleur.

→ Contre-indications : refus du patient, lésions cutanées, douleurs neuropathiques.

→ En pratique : l’utilisation du toucher dans la prévention et le soulagement de la douleur implique de la part du soignant de l’attention à l’autre, une habileté manuelle et une coordination des gestes. L’infirmière veillera à prévenir la personne, à lui demander son accord, à avoir les mains chaudes pour la toucher. Il est recommandé de poser les mains doucement mais franchement sur la zone concernée et d’adapter la pression aux réactions du patient.

La neurostimulation transcutanée (NSTC)

La neurostimulation transcutanée (NSTC) ou TENS (Trancutaneous Electrical Neuro Stimulation) est une méthode d’analgésie non médicamenteuse par administration d’un courant électrique par voie transcutanée. Le terme « TENS » désigne à la fois la méthode, et l’appareil, un « TENS ».

→ Indications : elles vont de la douleur aiguë (postopératoire, dysménorrhée, angine de poitrine) à la douleur chronique (arthrose, lombalgie, douleurs neuropathiques). Cette technique a l’avantage d’être une méthode physiologique dont l’équipement miniaturisé portable est compatible avec le maintien des activités du patient. Le traitement peut être associé à tous les antalgiques périphériques ou centraux.

→ En pratique : la NSTC est soumise à une prescription médicale. Le rôle de l’infirmière consiste à surveiller son efficacité, la bonne compréhension de son fonctionnement par le patient ainsi que le développement de l’autonomie de ce dernier.

Les méthodes cognitivo-comportementales

Elles sont nombreuses, font appel à la capacité de compréhension (cognition) de la personne pour adapter son comportement à la situation et pouvoir y faire face. L’infirmière utilise fréquemment certaines d’entre elles de façon spontanée, sans toujours en mesurer les effets sur la douleur ou l’anxiété.

L’information du patient à travers des supports

Peuvent être utilisés :

– des supports ludiques (poupée, jouets en lien avec l’hôpital pour l’enfant);

– des documents ;

– des photos ;

– des vidéos, pour les plus âgés.

→ Mécanisme d’action : l’anticipation de la situation, grâce aux explications fournies par les professionnels et à une représentation visuelle (lieux, objets, personnes rencontrées, techniques de soin) permet au patient de développer un « coping » (capacité à faire face) positif. Ses systèmes de réponses comportementales, émotionnelles et interpersonnelles s’en trouvent modifiés.

→ Indications : prévention des douleurs provoquées par les soins et les situations cliniques, prévention des douleurs chroniques (lombalgies, par exemple).

→ Contre-indications : elles sont exceptionnelles. Le soignant doit veiller à utiliser un mode de communication adapté à la situation (âge du patient, degré d’urgence…).

Le renforcement positif, la récompense

→ Mécanisme d’action : conduit la personne douloureuse à ajuster son comportement en fonction de la conséquence prévisible de la douleur. Le patient observe son comportement, se centre sur ses performances, mesure ses capacités fonctionnelles.

→ Indications : préparation d’un soin ou d’une situation potentiellement douloureuse ou anxiogène, douleurs chroniques.

→ Contre-indications : urgence, ou personne n’adhérant pas à la proposition.

Les méthodes psychocorporelles

Elles reposent sur la notion d’unité corps/psychisme pour tout être humain. Toutes s’appuient sur le phénomène hypnotique présent chez chaque individu et qui permet l’émergence d’un état de dissociation pendant lequel le sujet n’est plus focalisé sur sa douleur, mais sur ce qui lui est proposé. Les effets observés cliniquement ont été confirmés, ces dernières années, par des travaux neuroscientifiques.

La distraction

Elle se définit comme « l’action de détourner l’esprit d’une occupation, d’une préoccupation ; diversion ». L’objectif de l’utilisation des techniques de distraction consiste à détourner l’attention du patient de son expérience douloureuse du moment. Les techniques sont extrêmement nombreuses, elles se subdivisent en techniques avec ou sans support. Elles peuvent s’adapter à tous les âges de la vie, à toutes les circonstances, se dérouler en même temps que le soin. Leur mise en œuvre implique la relation soignant/soigné, mais ne nécessite pas de formation spécifique.

→ Indications : prévention de la douleur et de l’anxiété générées par les soins et les situations cliniques ; accompagnement des patients douloureux chroniques.

→ Contre-indications : refus du patient.

→ En pratique : autour de la parole, on citera les bavardages sur des sujets intéressant la personne soignée, les chansons, comptines, histoires ou contes ; la visualisation d’une situation agréable pour le patient. Avec l’aide de supports, les méthodes de distraction sont très variées : lecture, télévision, jeux vidéo, musique. Certaines techniques telles que « gonfler un ballon », dessiner, faire des bulles de savon sont très faciles à mettre en œuvre, demandent peu de matériel et s’avèrent très efficaces (lire le cas clinique p. 39).

La ou les méthodes de distraction proposées doivent correspondre aux capacités du patient, à ses goûts, à ses envies du moment. Plus l’attention du patient est labile (jeune enfant, personne présentant des troubles cognitifs), plus les méthodes de distraction pourront être associées (chant, marionnettes, bulles de savon, jeu avec un objet chez le jeune enfant, sa capacité de concentration étant limitée).

L’hypnoanalgésie et l’hypnose

L’hypnose se définit comme un état de conscience modifié.

→ Indications : prévention de la douleur et de l’anxiété lors des soins ou des situations potentiellement douloureux ou anxiogènes. Douleurs chroniques (migraines, lombalgies, fibromyalgie…) dans le cadre d’une prise en charge pluriprofessionnelle.

→ Contre-indications : refus du patient, troubles cognitifs, comportementaux ou psychotiques.

La sophrologie

C’est une pratique dérivée de l’hypnose. Ses indications et contre-indications dans le contexte de la douleur sont les mêmes. Hypnose et sophrologie nécessitent une formation spécifique des personnels infirmiers afin qu’ils puissent les mettre en œuvre dans le cadre de leur exercice.

La relaxation

Elle est présente à travers de nombreuses méthodes, dont le but est d’obtenir le relâchement du tonus musculaire et du psychisme par la concentration du patient sur ses sensations corporelles et sa respiration. Des techniques complémentaires peuvent être utilisées (visualisation, notamment).

→ Indications : prévention de la douleur et de l’anxiété lors des soins et des situations potentiellement douloureuses et/ou anxiogènes. Douleurs chroniques (migraines, lombalgies, fibromyalgie…).

→ Contre-indications : refus du patient, difficulté d’adhésion à la méthode (anxiété, agitation, difficulté à lâcher-prise), difficultés cognitives.

Le massage de confort et de bien-être

→ Mécanisme d’action : le massage de confort présente un triple intérêt : l’inhibition de la transmission du message douloureux ; le relâchement musculaire et donc la détente psychique qui l’accompagne ; et l’effet de distraction de la sensation douloureuse.

→ Indications : accompagnement des patients atteints de douleurs chroniques, prévention des douleurs provoquées par les soins, soulagement des douleurs liées aux situations cliniques telles les suites opératoires.

→ Contre-indications : le refus du patient, les douleurs neuropathiques, les lésions cutanées, musculaires, cancéreuses…

L’art-thérapie

Elle comprend de nombreuses activités : musique, chant, danse, lecture, peinture…

→ Indications : toute douleur aiguë ou chronique.

→ Contre-indications : manque d’intérêt ou refus du patient, situation d’urgence. Il faut noter que les pratiques d’art-thérapie ne sont pas contre-indiquées chez les patients psychotiques.

Ce dossier a été réalisé avec le concours des Éditions Lamarre, éditrices de l’ouvrage Moyens non pharmacologiques de prise en charge de la douleur, P. Thibault , N. Fournival, juillet 2012.

TRANSMISSION

Des informations précises

→ Il est important que les professionnels de santé prennent le temps de noter précisément la technique utilisée pour prévenir ou soulager le patient. La crainte de ne pas être autorisé à effectuer certaines pratiques, comme les massages par exemple, amène parfois le soignant à utiliser des termes inadaptés tels que l’« effleurage ». Or, l’effleurage est un des éléments d’une technique de massage qui ne correspond pas toujours à ce qui a été réellement effectué, ou qui n’est pas adaptée au soulagement de la douleur.

→ Il est préférable de noter « massage de confort », de préciser l’objectif de ce soin, la zone concernée (main, pied, avant-bras…), le produit utilisé lorsqu’il y en a un, la durée du massage, le niveau de douleur avant et après, la satisfaction du patient…, plutôt que de transmettre des informations inexactes et qui risquent de prêter à confusion.

Repères

Quid des médecines parallèles ?

Très fréquemment, les moyens non pharmacologiques ou non médicamenteux sont appelés « méthodes complémentaires », « médecines parallèles », « médecines douces ». En réalité, les termes « non pharmacologiques » ou « non médicamenteux » sont les seuls qui devraient être adaptés. Il s’agit, en effet, d’utiliser des moyens non pharmacologiques ou non médicamenteux au même titre que les moyens pharmacologiques ou médicamenteux pour constituer l’ensemble du traitement antalgique adapté à la situation de la personne soignée. La terminologie « moyens non pharmacologiques » est introduite dans le 3e plan de lutte contre la douleur. Dans le rapport de la HAS(1), le terme de « thérapeutique non médicamenteuse » a été préféré, alors que les deux locutions sont encore considérées comme équivalentes. L’argument de ce choix est que « le terme “thérapeutique” (du grec “therapeutikos”, qui signifie “qui prend soin de”) a […] été privilégié dans la mesure où il renvoie à une prise en charge plus globale du patient que le terme “traitement” ».

→ Méthode, pratique, technique, moyen…

Très souvent également, ces moyens non médicamenteux sont présentés sous forme de méthode, pratique, technique, moyen… Le terme « pratique » remplace parfois celui de « méthode », comme le terme « moyen » remplace celui de « technique ».

Le terme « méthode » ou « pratique » recouvre un ensemble de techniques réunies et organisées pour en faire une méthode décrite et évaluée. C’est le cas, par exemple, de l’hypnose ou des relaxations. Les techniques, moyens ou outils utilisés au sein de ces méthodes ou pratiques peuvent se combiner entre eux de façon très variable en fonction de la situation.

Par ailleurs, certaines techniques sont communes à plusieurs méthodes. C’est le cas de la respiration, que l’on trouve principalement dans la relaxation, mais sur laquelle on peut aussi s’appuyer en sophrologie ou dans certaines techniques de distraction.

1- Rapport d’orientation « Développement de la prescription de thérapeutiques non médicamenteuses validées », HAS, voir Savoir +, p. 42.

RÔLE PROPRE INFIRMIER

Questions fréquentes

→ Faut-il une prescription pour mettre en œuvre une méthode non pharmacologique ?

La majorité des méthodes non pharmacologiques relèvent de la mise en œuvre du rôle propre infirmier et ne nécessitent pas de prescription médicale pour être appliquées.

Parmi les méthodes soumises à prescription, on peut citer la neurostimulation transcutanée (NSTC); l’application du froid en post-chirurgical.

Pour collaborer efficacement avec le patient, l’infirmière note dans le dossier de soin ce qu’elle a décidé de mettre en œuvre (méthode de relaxation, massage de confort, distraction, hypnoanalgésie) et les effets thérapeutiques observés.

→ Faut-il suivre une formation spécifique ?

Les moyens non pharmacologiques font appel à de nombreuses pratiques. La plupart d’entre elles sont souvent déjà intégrées aux enseignements développés dans le cadre de l’exercice infirmier (massage de confort, méthode de distraction, de relaxation).

D’autres, telles que l’hypnose, la neurostimulation transcutanée, impliquent une formation complémentaire. Toutes méritent d’être enseignées pour permettre au soignant d’améliorer ses compétences. Ces formations entrent dans le cadre des apprentissages qui doivent être réalisés tout au long de la vie professionnelle afin que l’exercice infirmier suive l’évolution des connaissances scientifiques et des pratiques en vigueur.

CAS CLINIQUE

CHIMIO ET RELAXATION

→ M. S., âgé de 54 ans, est suivi en oncologie pour un lymphome. Le protocole est la chimiothérapie par voie intrathécale. L’administration de son traitement s’effectue en hôpital de jour. Lors du premier rendez-vous, M. S. n’a pas pu recevoir son traitement… Dès que le médecin et l’infirmière du service sont arrivés dans la chambre pour effectuer la ponction lombaire, il est entré dans un état de panique qu’il ne pouvait pas expliquer. Le médecin lui a proposé de revenir la semaine suivante et lui a prescrit un anxiolytique et un antalgique à prendre le matin du RDV, avant de se rendre à l’hôpital. La ponction est programmée à 10 heures. M. S. arrive, détendu. Il s’asseoit au bord du lit, prend son oreiller dans les bras ; l’aide-soignante reste près de lui, lui parle et lui tient la main. L’infirmière et le médecin préparent le matériel et l’informent du déroulement du soin. Le médecin s’apprête à effectuer l’anesthésie à l’endroit où le patch a été posé, et dit à M. S. : « Respirez bien à fond, je vais piquer. » M. S. devient rouge, transpire, il est polypnéique et ne tient plus en place. Le médecin ne peut pas piquer. L’équipe lui propose d’envisager différemment l’organisation du soin.

État de panique

Elle lui parle du Meopa (Mélanque équimolaire oygène protoxyde d’azote) et RDV est pris pour la troisième tentative avec l’infirmière ressource douleur. Il semble plus détendu, mais présente ensuite le même tableau de panique que la fois précédente. L’IRD suggère d’arrêter le soin. Le médecin le reprogramme l’après-midi. Après un long entretien avec l’IRD, M. S. identifie que son état de stress est lié à une phobie des piqûres qu’il pensait avoir surmontée. Mais, à chaque fois que le médecin l’informe en disant « je vais vous piquer » ou « je vous pique », cela réactive sa phobie ! Un travail de préparation a pu être mené entre M. S. et l’IRD pour mettre en place les conditions favorables à la réalisation du soin (travail sur la respiration, imagerie mentale, représentations sur la thérapeutique et l’acte, gestion du stress…). L’après-midi, l’IRD vient un moment avant l’infirmière et le médecin. M. S. s’asseoit au bord du lit de façon confortable pour l’examen, il ferme les yeux et commence des exercices respiratoires. Une fois l’état de détente installé, l’administration du Meopa débute. L’infirmière et le médecin arrivent peu de temps après et le soin débute normalement. Au moment de l’anesthésie locale, l’IRD reprend l’exercice de relaxation, et tout se passe bien. L’IRD confirme par un signal au médecin qu’il peut effectuer la ponction. La première chimiothérapie intrathécale a pu être réalisée.

Des mots à éviter

M. S. est très heureux que le soin se soit déroulé jusqu’au bout. Il a seulement ressenti un point de chaleur au moment de la ponction suivie de l’injection de la chimiothérapie. Néanmoins, il cote l’EVA à 8/10 pendant le soin, précise qu’il n’a pas senti de douleur liée à la ponction, le 8 correspondant à son état de stress pendant toute la durée du soin ; après le soin, l’EVA est à 2, tant le patient est satisfait d’avoir pu gérer son anxiété. En accord avec le patient, il a été décidé que le mot « piqûre » et la phrase « je vais vous piquer » ne seront plus prononcés. À chaque RDV, tout est mis en place pour permettre à M. S. de bénéficier à la fois du traitement préventif de la douleur et des méthodes psychocorporelles sans lesquelles la ponction ne peut être réalisée.