L’INFIRMIÈRE, EN PREMIER RECOURS - L'Infirmière Magazine n° 314 du 01/01/2013 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 314 du 01/01/2013

 

ADDICTIONS

ACTUALITÉ

DU CÔTÉ DES… COLLOQUES

Face à l’envolée des pratiques addictives, les soignantes ont, dans toute leur diversité, un rôle crucial à jouer pour améliorer la prévention et l’accompagnement des personnes.

Notre société est de plus en plus addictogène. Elle banalise l’excès, la sensation forte, elle sursollicite la pulsion. En parallèle, elle demande aux acteurs de la santé de mobiliser leurs compétences afin de construire ensemble une réponse cohérente, pointe Jean-Pierre Couteron, président de la Fédération addiction. Nous allons donc devoir articuler des pratiques très variées de prévention, de soins, de réduction des risques, sans les opposer. » Un défi débattu lors du colloque « L’infirmier(ère) face aux addictions », organisé le 5 décembre, à Paris, par le Réseau de prévention des addictions (Respadd) et la Fédération addiction. Qu’elles interviennent en milieu scolaire, en entreprise, en prison, à l’hôpital ou encore dans un centre de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (Csapa), « les infirmières se retrouvent en première ligne face aux addictions », rappelle Karim Mameri, secrétaire général de l’ordre national des infirmiers.

Croiser les approches

Grâce à une proximité forte avec les patients, tissant une relation de confiance, elles remplissent une fonction de premier recours pour les personnes en difficulté avec une pratique addictive ou leurs proches. Leur rôle est donc central. « C’est un levier essentiel des soins préventifs ou curatifs », insiste Jean-Yves Grall, à la tête de la Direction générale de la santé (DGS). Pour valoriser le rôle infirmier et soutenir les pratiques, la DGS, la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et les toxicomanies (Mildt) et le Respadd ont développé, avec le soutien du Groupement des infirmiers du travail, notamment, divers outils : affiche incitant le patient à dialoguer avec l’infirmier autour du tabac, de l’alcool et autres drogues ; flyer étayant la démarche de repérage et d’orientation ; guide d’aide à la pratique addictologique(1) ; formations au repérage précoce et à l’intervention brève (voir encadré ci-dessous)

Dans son futur plan 2013-2015, la Mildt entend encore renforcer ces orientations et sensibiliser les infirmières de tous les secteurs par des actions spécifiques. L’idée de favoriser les échanges, d’élargir la formation est lancée. « Des infirmières en santé au travail doivent pouvoir rencontrer leurs collègues du Csapa voisin ; des infirmières scolaires, celles en consultation jeunes consommateurs, pour partager leurs idées, confronter leurs expériences, renforcer leurs compétences », insiste le Dr Albert Herszkowicz. Le conseiller médical du bureau des addictions (DGS) est, par ailleurs, convaincu que les enjeux éthiques liés aux addictions et les évolutions rapides des usages imposent de « s’appuyer sur un collectif ». Reste à offrir les moyens adaptés.

1– Pour les obtenir ou en savoir plus : www.respadd.org

DÉMARCHE

Repérer et informer

Utile, notamment, pour identifier une alcoolisation excessive, la démarche du RPIB, pour repérage précoce et intervention brève, convient aux infirmières de tout domaine et « son utilisation devrait être systématisée », estime Michelle Rotaru, infirmière au Csapa Douar Nevez, à Lorient. « L’important est de mentionner les outils de repérage dans la conversation, de manière informelle, à partir de ce que dit le patient, et en prenant le temps », poursuit-elle. Des questionnaires (Deta, Face…) peuvent faciliter l’entretien. Mais, « ils ne suffisent pas, et il faut aussi adapter l’outil employé à la personne », prévient l’infirmière. Divers paramètres (consommations, coaddictions, dommages, motivation au changement…) peuvent être recherchés. Suit l’intervention brève, qui vise à modifier les comportements, afin de réduire les risques et les dommages induits, en suscitant une prise de conscience. « Il faut adopter une attitude empathique, ne pas juger, être dans l’écoute, curieux de l’autre, et respecter son choix », résume-t-elle. Des informations sont alors transmises et, si la personne l’autorise, un avis peut être donné. Les prises en charge possibles pour diminuer la consommation sont, enfin, présentées.