UN LIEN AU LONG COURS AVEC LE PATIENT - L'Infirmière Magazine n° 310 du 01/11/2012 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 310 du 01/11/2012

 

SUIVI INFIRMIER

DOSSIER

MISE EN ŒUVRE

Au centre expert digestif du GH de La Pitié-Salpêtrière-Charles Foix, des infirmières de coordination accompagnent le parcours de soins des patients en oncologie. Marie-Élodie Chicher dépend du service d’hépato-gastro-entérologie, et Sophie Deville, de celui de chirurgie digestive.

L’INFIRMIÈRE MAGAZINE : Comment se passe la consultation infirmière initiale ?

M.-E. C. : Elle a lieu juste après la consultation avec le chirurgien, à laquelle nous assistons, et comprend deux parties. Nous nous intéressons d’abord à la maladie et à sa prise en charge. Puis, nous procédons à l’identification des besoins du patient en soins de support. Je laisse parler le patient et le guide pour obtenir les informations dont j’ai besoin : l’histoire de sa maladie, la compréhension qu’il a de sa prise en charge. Nous abordons ce dont il a envie de parler, ce qui l’inquiète. Cela peut être le traitement, les effets secondaires, le travail, l’idée de la mort…

S. D. : Certains patients se focalisent sur l’opération et l’hospitalisation. D’autres sont en état de sidération. Nous essayons alors de les rassurer, de leur dire que nous sommes là. Et nous laissons la porte ouverte pour un entretien plus approfondi plus tard. Nous nous adaptons aux besoins du patient et de son entourage, présent lors de cet entretien.

L’I. M. : Utilisez-vous des outils particuliers ?

M.-E. C. : Nous avons une fiche de consultation et utilisons une grille d’entretien de l’institution, validée et adaptée à notre spécificité. Des items de base nous permettent de détecter facilement d’éventuels besoins. En synthèse de l’entretien, nous pouvons décider d’orienter le patient vers le diététicien, le stomathérapeute, la psychologue ou l’unité douleur. Nous veillons également à détecter au plus tôt une éventuelle fragilité sociale. Avec l’accord du patient, nous en informons l’assistante sociale.

S. D. : Nous ne posons pas une suite de questions : cela pourrait être violent, intrusif. Au fil de l’entretien, il m’arrive d’expliquer au patient le but des mes demandes : savoir si des éléments vont le préoccuper en dehors de sa maladie, au risque d’entraver son traitement.

L’I. M. : Quels documents servent pour le suivi de coordination ?

M.-E. C. : D’abord, la fiche de consultation initiale, précieuse, car c’est une photographie du patient lors de la première rencontre. Puis, les fiches de liaison avec le médecin traitant, et les fiches de synthèse des consultations médicales préopératoire et post-opératoire. Très importante également, la fiche de transmission infirmière, sur laquelle nous notons la date, ce qui s’est dit pendant l’entretien de suivi avec le patient et/ou la famille, et ce que nous avons mis en place comme actions. Nous avons un agenda papier commun. À chaque fois que nous ouvrons le dossier d’un patient, nous planifions immédiatement l’action ou le rendez-vous suivants.

L’I. M. : De quelle manière abordez-vous votre suivi hospitalier ?

S. D. : Nous suivons les patients dans leur évolution, dès leur entrée dans le service, et jusqu’à leur sortie, en prêtant attention à des éléments récurrents : transit poids, alimentation, douleur et moral. Nous participons deux à trois fois par semaine à la visite du médecin. Cela nous permet de disposer des informations nécessaires sur le patient. Nous assurons le lien avec la famille. Nous faisons face aux besoins qui peuvent apparaître, comme, par exemple, une pose de chambre implantable qui n’était pas prévue. Nous parlons avec le patient de ses peurs, et abordons son devenir après la chirurgie. Nous lui remettons un livret d’accueil comprenant tous les contacts du service.

M.-E. C. : Pour le suivi en hôpital de jour, nous voyons ensemble comment se passent les cures, les intercures, et ce qu’il faut réévaluer. Nous assurons le lien avec le médecin, avec tous les autres intervenants, et avec la ville. Il peut s’agir, par exemple, de trouver l’infirmière libérale qui va retirer l’infuseur après la première cure de chimiothérapie, de faire le lien avec un réseau de santé ou avec la pharmacie.

L’I. M. : Comment se passent la sortie de l’hôpital et la surveillance ?

S. D. : Nous participons à l’organisation de la sortie avec les cadres du service. Après la prise en charge, nous assurons un suivi téléphonique tous les trois mois. Cela nous permet, notamment, de détecter d’éventuelles récidives. Nous faisons fonction de relais avec la ville, par exemple avec le gastro-entérologue. Nous nous inscrivons dans la durée et dans le cadre de vie du patient.

M.-E. C. : C’est un moment capital. Le patient est encore dans la maladie. De nombreuses questions émergent concernant les problèmes physiques. Nous apportons des conseils, en utilisant parfois les retours d’expérience d’autres patients. Des ajustements de traitement sont souvent nécessaires. Nous en parlons au médecin et organisons une nouvelle consultation. Il peut s’agir d’une simple écoute, d’un accompagnement. Nous restons joignables sur un téléphone mobile dédié.