Les brûlures - L'Infirmière Magazine n° 297 du 15/03/2012 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 297 du 15/03/2012

 

FORMATION CONTINUE

FICHE TECHNIQUE

Les brûlures sont des causes courantes de consultation aux services des urgences ainsi que d’hospitalisation. Leur prise en charge est très différente selon le niveau de gravité.

En France métropolitaine, en 2009, 11 984 hospitalisations pour des brûlures ont été enregistrées. Les enfants de 0 à 4 ans représentent un pourcentage important(1).

DÉFINITION

La brûlure est une lésion de la peau ou d’une muqueuse. Rappelons que la peau a une fonction triple :

– protéger l’organisme contre les agressions extérieures ;

– participer à la régulation de la température ;

– livrer des informations sur l’environnement extérieur.

CRITÈRES DE GRAVITÉ

L’évaluation de la gravité est fondamentale, car elle va déterminer la prise en charge. L’appréciation de la gravité dépend de trois critères à mettre en corrélation : la profondeur, l’étendue et la localisation.

La profondeur

La profondeur est classifiée en degrés déterminant les couches atteintes (voir tableau 1 ci-dessous).

On ne considère pas le 1er degré comme grave, sauf si l’atteinte concerne un petit enfant. En effet, il n’entraîne pas de conséquences sur l’organisme.

L’étendue

Le pourcentage est utilisé pour évaluer la surface corporelle brulée (SCB). Il est défini que la paume de la main de la personne correspond à 1 % de SCB. Il existe une méthode plus adaptée pour un calcul rapide d’une surface corporelle brulée importante présentée dans le tableau p. 42.

Une notion importante est à considérer : compte tenu de l’absence de gravité, les surfaces brûlées au 1er degré n’entrent pas dans le pourcentage de SCB.

Une brûlure est jugée grave à partir de 10 % de SCB chez l’adulte, et 5 % de SCB chez l’enfant. Il est recommandé de consulter un médecin pour une brûlure de surface supérieure ou égale à 0,5 %.

La localisation

Certaines localisations sont considérées comme graves du fait des effets de la brûlure. Ce sont :

• La face : avec ou sans greffe, les cicatrices de brûlure posent un réel souci d’esthétisme.

• Les mains : les séquelles sont fonctionnelles. La rétractation de la peau à la cicatrisation ne permet plus une extension des doigts ni l’ouverture totale de la main.

• Les orifices naturels : la formation de l’œdème peut avoir de graves conséquences, parfois vitales.

• Les voies aériennes : c’est une indication d’intubation. L’œdème entraînerait l’asphyxie de la victime.

• Les voies génitales : c’est une indication de sondage urinaire en préhospitalier.

• La brûlure circulaire peut causer une nécrose de la zone comprimée par l’œdème.

Cas particuliers

Sont toujours considérées comme graves :

• Les brûlures électriques, dont les lésions sont invisibles mais à ne pas négliger. Le courant peut traverser le cœur et provoquer une souffrance myocardique brutale ou tardive. Ainsi, ces sujets sont surveillés en unité d’hospitalisation de très courte durée, pour 72 heures, avec une surveillance électrocardiographique et biologique (troponine) régulière. De plus, les points d’entrée et de sortie du courant sont à rechercher. Ils peuvent correspondre à des brûlures du 3e degré.

• Les produits chimiques sont des agents pouvant entraîner de graves lésions. La prise en charge consiste en un lavage abondant à l’eau et à enlever rapidement tous les vêtements, excepté ceux qui adhèrent. Cette action doit précéder l’identification du produit.

• Les brûlures par ingestion ont une prise en charge généralement chirurgicale. Il y a toutefois des pratiques à proscrire : faire vomir, car, en refluant, le produit rebrûle les voies digestives ; faire boire dilue le produit, augmente la surface brûlée et risque de faire mousser certains produits chimiques, ce qui favoriser l’inhalation.

Prise en charge

La prise en charge diffère selon la gravité de la brûlure.

Brûlures simples

Le retrait de la source, en toute sécurité, précède à l’évidence tout traitement.

• La prise en charge d’une brûlure simple consiste à la refroidir à l’eau, comprise entre 8 et 25 °C, le plus tôt possible. L’eau a une action antalgique, et entraîne une diminution de la profondeur de la brûlure. Cette opération doit durer au moins cinq minutes et peut être poursuivie si la victime ne ressent pas de sensation de froid. La brûlure sera recouverte afin de diminuer les risques d’infection.

• Notons que les pommades grasses sont à proscrire quand la profondeur dépasse le 1er degré.

Brûlures graves

La prise en charge d’une personne gravement brûlée diffère totalement de ce shéma. L’organisme de la victime doit faire face à trois risques pouvant mettre en jeu son pronostic vital.

• Choc hypovolémique et déshydratation par perte liquidienne : la prise en charge consiste à compenser cette perte par un apport hydroélectrolitique de cristalloïdes. Il est recommandé de poser deux voies veineuses de gros calibre. Il est préférable de perfuser sur des zones saines mais, à défaut, il est possible de piquer sur une zone brûlée. Cette perte liquidienne diminue le risque d’infection dans les six premières heures. Le soluté de choix est le Ringer Lactate, pour ses compléments électrolytiques, mais le chlorure de sodium 0,9 % est également adapté.

Certaines règles de calcul de volume de remplissage doivent être appliquées :

– règle du Parkland Hospital : apport de 4 ml/kg/% surface corporelle brûlée de Ringer Lactate, la moitié en 8 heures, l’autre moitié sur les 16 heures suivantes.

– Le remplissage, dès la 1re heure, de 20 ml/kg de Ringer Lactate.

• L’hypothermie : la peau ne joue plus son rôle de barrière thermique. Il est proscrit de refroidir une victime de brûlure étendue. Elle sera enveloppée dans une couverture en métalline(2) stérile, installée dans une ambiance chaude et couverte avec une couverture de survie.

• L’infection : les zones brûlées sont emballées dans des champs stériles.

La prise en charge très complexe des patients brulés ne s’arrête pas à ces trois points. Il faut également prendre en compte la réanimation respiratoire. De même l’analgésie des patients brulés est une priorité. Les antalgiques de niveau 1 et 2 ne suffisent pas. Il est recommandé d’emblée une analgésie par morphiniques en titration. La kétamine a la propriété d’analgésie de surface est souvent utilisée d’autant qu’en l’absence de voie veineuse elle peut être injectée en intramusculaire.

1- Source : INVS d’après les données 2009 du PMSI)

2- La couverture en métalline : non tissée, à base de viscose, elle n’adhère pas à la zone brûlée. Elle est perméable à l’air et à la vapeur d’eau. Les sécrétions migrent rapidement dans la partie absorbante du pansement. La zone est gardée au sec, la macération est évitée et les risques infectieux diminués.