Les arythmies cardiaques - L'Infirmière Magazine n° 293 du 15/01/2012 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 293 du 15/01/2012

 

FORMATION CONTINUE

POINT SUR

Les arythmies cardiaques sont des anomalies du rythme des battements du cœur. Parfois bénignes, elles peuvent aussi générer un risque d’insuffisance cardiaque, de thrombose ou de mort subite.

1. LA MALADIE

Les arythmies surviennent en cas de troubles de la genèse de l’influx nerveux ou de sa conduction. Ce dernier peut aussi emprunter un itinéraire aberrant ou plus court et passer plusieurs fois dans une même zone (circuit de réentrée).

Physiopathologie

Troubles rythmiques supraventriculaires

→ La fibrillation auriculaire ou atriale (FA) : trouble le plus fréquent (son incidence augmente à partir de 60 ans). L’activité électrique du cœur est désorganisée. Les oreillettes se contractent très rapidement, et ne fonctionnent pas correctement.

→ Le flutter auriculaire : l’oreillette est stimulée par une impulsion supplémentaire selon un trajet circulaire différent du trajet normal (macroréentrée). Elle bat très rapidement, avec un rythme deux à trois fois supérieur à celui des ventricules.

→ La tachycardie fonctionnelle (maladie de Bouveret) : accélération du rythme cardiaque (140 à 250 battements par minute) survenant de manière paroxystique et due à la présence d’un circuit électrique ou d’une voie accessoire entre les oreillettes et les ventricules. Le syndrome de Wolff-Parkinson-White, forme particulière de tachycardie jonctionnelle, est du à une anomalie congénitale. L’ECG, même en dehors des périodes critiques, présente un aspect particulier.

→ La bradycardie sinusale : ralentissement du rythme cardiaque dû à un déclenchement trop lent du nœud sinusal et qui entraîne une insuffisance du pompage du sang pour couvrir les besoins de l’organisme.

Troubles rythmiques ventriculaires

Ils peuvent survenir sur un cœur sain, chez un jeune, ou en complication d’une cardiopathie préexistante.

→ La tachycardie ventriculaire (TV) : elle consiste en une accélération du rythme ventriculaire déclenchée par une anomalie située dans une zone myocardique ventriculaire.

→ La fibrillation ventriculaire (FV) : le ventricule se contracte rapidement mais de façon inefficace à cause d’une incoordination des signaux électriques ou de l’emprunt d’une voie supplémentaire. La torsade de pointe, forme particulière de la FV, peut entraîner un arrêt cardiaque brutal.

→ Le syndrome du QT long : cette anomalie de la conduction intracardiaque et de la repolarisation favorise les troubles du rythme.

Extrasystoles auriculaires et ventriculaires

Ce sont des battements cardiaques prématurés.

Signes cliniques et diagnostic

Les troubles du rythme : aigus ou chroniques, ils sont le plus souvent asymptomatiques. Ils peuvent provoquer des palpitations. Lorsque l’arythmie est mal tolérée, elle entraîne des douleurs thoraciques, un essoufflement, des sueurs, des vertiges, un malaise et une perte de connaissance, voire un arrêt cardiaque.

→ Les complications sont :

- l’accident thrombo-embolique. La stase du sang dans les oreillettes favorise la formation d’un caillot pouvant migrer dans le cerveau ou dans une artère du corps.

- les troubles du rythme ventriculaire. Ils sont potentiellement graves et peuvent provoquer le décès dans les heures qui suivent le début des symptômes.

Pour effectuer le diagnostic, l’examen de référence est l’ECG. Il permet d’étudier l’activité électrique du cœur lors des contractions cardiaques. Il met en évidence les arythmies et certaines cardiopathies. Le diagnostic peut être complété par un Holter sur 24 heures, une épreuve d’effort et une étude électrophysiologique.

2. LE TRAITEMENT

Le but du traitement est d’éviter le trouble du rythme, une récidive ou l’apparition d’une complication grave. Après la correction d’éventuels facteurs déclenchants (désordres métaboliques, troubles du rythme…), diverses stratégies peuvent être mises en place :

- un traitement médicamenteux, base de la thérapeutique, mais dont l’efficacité ne dépasse pas 80 % ;

- un traitement non médicamenteux, qui permet de réaliser un choc électrique (pour que le cœur récupère un rythme cardiaque normal) ou de détruire définitivement la zone responsable de l’arythmie.

Les méthodes

→ Les médicaments antiarythmiques agissent sur les courants ioniques à travers les membranes des cellules du myocarde. Ils sont répartis en quatre classes mais n’ont pas d’activité spécifique. La molécule est choisie en fonction de la nature de l’arythmie, des signes cliniques, de la cardiopathie associée et des effets indésirables provoqués. Selon la gravité, l’administration se fait par voie orale (prévention d’une récidive) ou par voie injectable (arythmie en évolution). Tous les antiarythmiques sont proarythmogènes, surtout lorsqu’il existe une hypokaliémie ou un dysfonctionnement du ventricule gauche. Les molécules les plus courantes sont : flécainide, propafénone, amiodarone, sotalol, vérapamil, diltiazem. Certains bêtabloquants sont utilisés comme antiarythmiques, et la digoxine (ralentisseur du rythme cardiaque) est prescrite dans la FV.

→ Les méthodes d’électrothérapie stimulent électriquement les cellules du myocarde et permettent une resynchronisation de la contraction. Il existe l’électrostimulation endocavitaire (sondes placées directement dans les cavités cardiaques), la défibrillation par choc électrique externe et le défibrillateur implantable (appareil fixé dans la zone sous-clavière et relié au cœur par des sondes).

→ Les techniques d’ablation permettent la destruction de la zone du tissu nodal responsable de l’arythmie (ablation endocavitaire par radiofréquence ou cryothérapie ou chirurgie).

Accompagner la maladie

Il est nécessaire de :

→ vérifier l’observance du traitement, la réalisation d’ECG et le dosage de kaliémie de façon régulière.

→ surveiller le patient en cas de diarrhées, de vomissements, de perte d’appétit, de prise de diurétiques ou de laxatifs, et lors de fortes chaleurs.

→ déconseiller l’exposition au soleil. La plupart des antiarythmiques sont photosensibilisants (amiodarone) et les risques de brulûres dans la zone du défibrillateur implantable sont importants.

→ recommander de faire attention aux interférences électromagnétiques en cas de port d’un défibrillateur implantable (téléphone portable, plaque de cuisson à induction, arceaux antivol, IRM).

Médicaments à risque

Certains médicaments provoquent l’apparition de troubles du rythme :

→ les sympathomimétiques favorisent les fibrillations auriculaires : salbutamol, pseudoéphédrine, théophylline ;

→ les antiarythmiques, les psychotropes, les antihistaminiques H1 ou les diurétiques aggravent le syndrome du QT long ;

→ les bêtabloquants et les ICA favorisent les bradycardies, et la digoxine entraîne des extrasystoles ventriculaires.

D’autres médicaments occasionnent des torsades de pointe : les antiarythmiques classes Ia et III, les macrolides (érythromycine, clarithromycine), les antifongiques (kétoconazole, itraconazole, fluconazole), les psychotropes, la méthadone, les antidépresseurs tricycliques, les antihistaminiques H1 et le cisapride.

HYGIÈNE DE VIE

Les conseils à prodiguer :

→ Limiter les facteurs de risque cardiovasculaire : graisses alimentaires, alcool, stupéfiants, tabac ;

→ Éviter les excitants : café, thé, chocolat, cola, ainsi que les préparations à visée amincissante ;

→ Pratiquer une activité physique d’endurance, après accord du cardiologue ; prévoir des moments de repos et de détente ;

→ Ne pas s’interdire une activité sexuelle sauf si un essoufflement survient rapidement.