Le zona - L'Infirmière Magazine n° 291 du 15/12/2011 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 291 du 15/12/2011

 

FORMATION CONTINUE

LE POINT SUR

Généralement bénin, le zona induit des douleurs vives et souvent prolongées, qui expliquent un retentissement psychologique important. Son traitement repose sur l’association d’antiviraux et d’antalgiques.

1. DIAGNOSTIC

Affection virale banale, la varicelle atteint dans 90 % des cas un enfant ou un adolescent : le zona signe sa réactivation, locale, des années plus tard.

Le diagnostic repose sur la constatation d’une éruption vésiculeuse, douloureuse, généralement limitée au dermatome innervé par le ganglion sensitif siège de la réactivation virale qui, chez un sujet amaigri, asthénié, peut constituer l’indice d’une maladie sous-jacente (cancer, immunodépression, etc.). Un examen ophtalmologique s’impose en cas d’atteinte du territoire nasociliaire, d’œdème palpébral, de baisse de l’acuité visuelle ou d’hyperhémie conjonctivale. Dans certains cas, les manifestations neurologiques surviennent sans éruption cutanée.

→ La forme la plus classique, thoracique (60 % des cas), se traduit, après un prodrome que signent des sensations de brûlures, démangeaisons, fourmillements et picotements, par une éruption douloureuse, unilatérale, courant le long d’une racine nerveuse mais susceptible de déborder sur des métamères contigus. Les lésions érythémateuses se couvrent de vésicules arrondies, formant des bouquets, confluant en bulles puis en vésicules, qui sèchent vers le cinquième jour pour laisser place à des croûtes brunâtres tombant en huit à dix jours – en laissant parfois des cicatrices dépigmentaires. Cette éruption s’accompagne de paresthésies ainsi que de troubles tactiles. L’état général du patient demeure conservé. Une adénopathie satellite peut être observée. L’évolution aiguë de la maladie s’étend sur deux à trois semaines, avec une sévérité liée au statut immunitaire du patient.

Il est possible d’isoler le virus des lésions cutanées. Des anticorps anti-VZV sont présents dès le début de la maladie, et un diagnostic biologique peut être réalisé par l’examen des cellules vésiculaires en immunofluorescence ou par PCR.

→ La principale complication du zona est algique :

les douleurs post-zostériennes, suivant la phase aiguë, peuvent perdurer de façon continue, mais, généralement, elles finissent par diminuer deux à six mois après la cicatrisation cutanée. La survenue d’autres complications est exceptionnelle : paralysie oculomotrice, angéite carotidienne avec hémiplégie controlatérale (zona ophtalmique), myélite, encéphalite, atteintes motrices.

2. TRAITEMENT

Le recours aux antiviraux en prophylaxie des infections à VZV est mal documenté. La survenue d’un zona chez une personne âgée, en institution, n’impose pas l’isolement, mais il importe d’éviter tout contact entre une personne atteinte d’un zona et un sujet immuno-déprimé, une femme enceinte, ou un enfant n’ayant pas contracté la varicelle.

Antiviraux

Le traitement antiviral diffère selon le statut immunologique du patient.

→ Sujet immunocompétent : le traitement, devant être instauré dans les 72 heures inaugurant la phase éruptive chez le sujet de plus de 50 ans pour prévenir les douleurs post-zostériennes, est poursuivi une semaine (famciclovir = Oravir : 3 x 500 mg/jour ; valaciclovir = Zélitrex : 3 x 1 g/jour). Il peut être proposé à un patient de moins de 50 ans présentant des facteurs prédictifs d’évolution algique (sévérité de l’éruption cutanée, intensité des douleurs à la phase éruptive…) ou à un patient ayant un cancer des tissus solides (sauf s’il est traité par cytotoxiques et sous réserve d’une localisation monométamérique et d’une surveillance clinique).

→ Sujet immunodéprimé : il est nécessaire de traiter en toutes circonstances. Le recours à l’aciclovir par voie IV est recommandé (Zovirax IV 250 mg ou 500 mg, 10 mg/kg chez l’adulte et 0,5 g/m2 chez l’enfant toutes les 8 heures pendant 7 à 10 jours). En cas de lésions centrales ou de complications neurologiques, la dose et la durée du traitement sont augmentées.

Antalgiques

La douleur de la phase aiguë peut justifier un suivi dans un centre anti-douleur.

→ Antalgiques systémiques : la douleur nécessite au moins la prescription d’un antalgique de palier II (paracétamol-codéine, tramadol) avec couverture antalgique constante sur le nycthémère. Sa persistance ou une douleur intense fait prescrire un antalgique de palier III (morphine, etc.) – toujours à très faible dose (de l’ordre de 2 x 10 mg/jour chez l’adulte jeune)?. La corticothérapie est déconseillée en phase aiguë (risque d’immunodépression aggravant la maladie).

Souvent, il est nécessaire d’associer des antalgiques spécifiques des douleurs neuropathiques : amitryptiline (Laroxyl 75 mg/j), carbamazépine (Tégrétol 400 à 1 200 mg/j), clonazépam (Rivotril, sur prescription de neurologue), gabapentine (Neurontin).

→ Antalgiques locaux : la libération dans l’épiderme et la couche cornée d’un anesthésique local, la lidocaïne (compresse imprégnée Versatis), réduit la douleur en bloquant l’activité des fibres nerveuses lésées sans effet systémique. De plus, cette compresse agit par un effet protecteur mécanique de la peau. La capsaïcine (Qutenza patchs) peut être mise à profit, à l’hôpital et sous surveillance médicale, en cas d’échec des traitements conventionnels.

→ Autres techniques : l’électrostimulation transcutanée constitue un recours de dernière ligne.

Adjuvants

Les symptômes du zona peuvent être limités par la prescription de traitements adjuvants.

→ Une fièvre indique l’utilisation de paracétamol ou d’ibuprofène, l’aspirine exposant à un risque de syndrome de Reye.

→ Le prurit répond à un antihistaminique sédatif (Atarax ou Polaramine) ou à une phytothérapie sédative (Euphytose, etc.) : cela limite le grattage, à l’origine de surinfections bactériennes.

→ Sont conseillées des douches (ou des bains), prises de façon quotidienne ou biquotidienne, à l’eau fraîche ou tiède, jamais chaude, en utilisant un pain dermatologique sans antiseptiques. Le risque de surinfection est prévenu par une stricte hygiène des mains et des ongles. Il ne faut pas appliquer de topique (crème, pommade, gel, talc) sur les lésions. Les antibiotiques, antiviraux et antiprurigineux topiques sont fortement déconseillés.

→ Une surinfection bactérienne est traitée par un antibiotique systémique à la fois antistaphylococcique et antistreptococcique.

Vaccination

Le vaccin vivant atténué Zostavax réduit en intensité comme en durée les manifestations algiques et l’inconfort liés à l’affection zostérienne. Il diminue par deux l’incidence du zona, indépendamment de l’âge ou du sexe. Ce vaccin bénéficie d’une AMM mais n’est pas encore disponible en France.

ATTEINTES OPHTALMIQUES

Traitement antiviral et local

Source de douleurs mais surtout de complications compromettant la vision, le zona ophtalmique siège dans le territoire innervé par l’une des trois branches du nerf ophtalmique. Une atteinte du nerf nasal externe peut induire une kératite zostérienne. Kératite et iridocyclite s’observent généralement plusieurs semaines après la fin de l’éruption.

→ Un traitement antiviral mis en place dans les 48 heures suivant le début de l’éruption cutanée peut prévenir les complications oculaires (aciclovir = Zovirax : 5 x 800 mg/jour pendant une semaine) ou les 72 heures (valaciclovir = Zélitrex : 3 x 1 g/jour pendant une semaine ; famciclovir = Oravir : 3 x 500 mg/jour pendant une semaine).

→ L’application locale d’aciclovir (Zovirax pommade ophtalmique), sur avis spécialisé, accompagne un antiviral systémique.

Il est possible d’appliquer des corticoïdes sur une kératite ou une uvéite antérieure. Une nécrose rétinienne ou une neuropathie optique ischémique font discuter le recours à une corticothérapie systémique, dans l’espoir de sauver la vision.

ÉPIDÉMIOLOGIE

→ Le zona apparaît surtout à partir de 50 ans, pour devenir plus fréquent ensuite : il atteint 5 à 10 personnes sur 1 000 au-delà de 60 ans et près de 20 % de la population sur la vie entière.

→ Si une contamination fœtale par le virus de la varicelle ou une varicelle contractée dans les premiers mois de la vie peuvent être à l’origine d’un zona précoce, l’affection reste rare avant l’âge de 4 ans.

→ Complication majeure, la douleur post-zostérienne augmente avec l’âge : elle accompagne la maladie dans 20 % à 30 % des cas au-delà de 70 ans.

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