La laparoscopie en chirurgie digestive - L'Infirmière Magazine n° 259 du 01/04/2010 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 259 du 01/04/2010

 

chirurgie

Cours

De nombreuses interventions de chirurgie digestive sont aujourd'hui réalisables par laparoscopie (ou coelioscopie). Une technique complexe qui vise à examiner et permet de traiter des affections intra-abdominales sans ouvrir la paroi. Parmi ses possibles avantages, une réduction de la durée de séjour à l'hôpital et des douleurs postopératoires, ou un meilleur résultat esthétique.

«La Seconde Révolution française. » Tel est le surnom donné à une technique qui a pris son essor en France dans les années 1980 : la laparoscopie, qui consiste à examiner et permet de traiter les affections intra-abdominales sans ouvrir la paroi, à la différence de la laparotomie. À l'origine, les chirurgiens pensaient que cette innovation transformerait la chirurgie de la vésicule, de la hernie hiatale ou de l'appendicite. Mais les applications se sont multipliées et la laparoscopie, art complexe, est devenue une routine pour de nombreuses équipes. Tour d'horizon des pathologies - dont certaines sont très courantes - opérables par cette voie en chirurgie digestive.

PATHOLOGIES COLORECTALES

Extension des indications

Ablation d'une partie du côlon, anastomose (abouchement chirurgical entre deux organes), ligature vasculaire... Les gestes de chirurgie colorectale sont complexes. La laparoscopie a donc pris du retard : la première colectomie par cette voie date de 1991. Mais, aujourd'hui, la technique parvient à maturité. Le temps des études est presque terminé et la plupart des interventions électives (à froid, non urgentes), du cancer du côlon au prolapsus du rectum, ont déjà été menées par laparoscopie.

Bénéfices attendus de la laparoscopie

Ils sont multiples, en raison d'un traumatisme moins important infligé, notamment, à la paroi abdominale : une moindre douleur postopératoire et donc une consommation plus faible d'antalgiques ; une reprise plus rapide du transit intestinal et de la réalimentation ; une réduction de l'ordre de trois à cinq jours de la durée d'hospitalisation habituellement observée pour un cancer colorectal en France, et donc une reprise d'activité plus rapide ; un risque plus faible d'abcès de parois et d'éventration en raison de cicatrices moins importantes ; un meilleur résultat esthétique pour les patients avec une préservation de la paroi abdominale, et donc une meilleure acceptation de l'intervention.

Pathologies traitées par laparoscopie.

Le cancer colorectal. En France, c'est le troisième cancer le plus fréquent chez l'homme, le deuxième chez la femme. Les études concordent : en cas de cancer du côlon, pour une tumeur classique avec résection facile, la laparoscopie est la voie à proposer en priorité. La principale évaluation, lors du développement d'une nouvelle technique, est le résultat carcinologique. Le patient vit-il, à long terme, moins longtemps, aussi longtemps ou plus longtemps après une laparoscopie ou une laparotomie ? Quels sont les taux de métastases et de récidives ? Pour l'ensemble de ces données, des études randomisées montrent que la laparoscopie donne des résultats équivalents à la laparotomie pour les cancers du côlon et du haut rectum. De ce fait, les critères secondaires (tels le bénéfice postopératoire et l'esthétique) deviennent prépondérants.

Dans le cas du cancer du rectum (bas et moyen rectum), une chirurgie plus difficile, les experts attendent une plus grande validation. Les deux études existantes montrent une équivalence des résultats en laparoscopie et en chirurgie ouverte.

Diverticulite sigmoïdienne. Il s'agit d'une pathologie bénigne assez fréquente en France. La seule étude randomisée, en 2009, fait état, pour la sigmoïdectomie par laparoscopie, d'une réduction de la durée d'hospitalisation, d'une moindre consommation d'antalgiques et d'un nombre plus faible de complications postopératoires. L'avantage de la laparoscopie est aussi démontré en termes de confort, de bien-être social... Une étude non randomisée en France a aussi établi ses bénéfices quant à la réduction de la morbidité postopératoire.

Maladie de Crohn et recto-colite hémorragique (RCH). Ces maladies intestinales chroniques cryptogénétiques inflammatoires (Mici), moins fréquentes et bénignes, concernent des patients jeunes, risquant d'être souvent opérés. La laparoscopie semble justifiée... mais difficile, car il y a souvent des abcès, des masses inflammatoires, des fistules internes, avec des patients immunodéprimés, fatigués.

Trois interventions sont principalement indiquées : la résection iléo-cæcale (de l'intestin grêle terminal) pour la maladie de Crohn, la colectomie subtotale et enfin l'anastomose iléo-anale, intervention de référence pour une RCH résistante au traitement médical (le rectum et le côlon sont enlevés, puis l'intestin grêle est cousu sur l'anus). Les méta-analyses démontrent le bénéfice postopératoire de la laparoscopie en termes, notamment, de transit, de réalimentation. Et, pour la maladie de Crohn, de réduction de la morbidité postopératoire et des complications.

URGENCES DIGESTIVES

Aux avantages précédémment évoqués de la laparoscopie s'ajoutent, en urgence, la possibilité de faire un bilan lésionnel complet, un scanner « en trois dimensions » de la cavité abdominale, ce qui permet de confirmer le diagnostic et de traiter la pathologie.

Ulcère gastroduodénal perforé avec péritonite

La laparoscopie confirme le diagnostic de péritonite, en précise la cause, localise la perforation. Et permet de traiter l'ulcère perforé par un lavage péritonéal et une suture simple de l'ulcère. La littérature, riche sur ce point, atteint un haut niveau de preuves. Le bénéfice de la laparoscopie est réel en termes de complications infectieuses ou pulmonaires, de morbidités infectieuses postopératoires, de transit.

Péritonite d'origine diverticulaire.

Pour cette pathologie relativemente fréquente, la laparoscopie consiste à nettoyer la cavité abdominale de manière abondante (avec six à huit litres de sérum physiologique) puis à laisser dans le ventre un bout de segment colique perforé, sans visualiser la perforation au niveau du côlon puisque le petit intestin ou de la graisse va colmater la fuite. La laparoscopie facilite donc le geste chirurgical, plus simple que la traditionnelle résection par laparotomie du segment colique perforé, qui nécessite le plus souvent un anus artificiel temporaire.

Des études randomisées s'imposent car les ouvrages consacrés à un simple lavage et drainage par coelioscopie ne sont pas nombreux. Mais les résultats sont excellents : 1 % de mortalité, un taux de de complications postopératoires inférieur à 15 %, un taux d'échec inférieur à 1 %, une durée moyenne de séjour de dix jours. Par ailleurs, le recours en urgence à la coelioscopie permet de proposer une résection sigmoïdienne préventive (afin d'éviter le risque de récidive), également réalisable par laparoscopie.

Les auteurs de l'étude, qui fait référence, proposent la coelioscopie pour la diverticulite sigmoïdienne perforée avec une péritonite purulente. Pour l'instant, les Américains recommandent, pour une péritonite diverticulaire, une ablation du côlon perforé et la réalisation ou non soit d'une anastomose d'emblée, soit, le plus souvent, d'une intervention de Hartmann. En Europe, les conclusions des recommandations sont identiques, mais avec l'évocation de la possibilité de réaliser un simple lavage par coelioscopie. La Société française de chirurgie digestive (SFCD) la recommande, notamment, pour le stade Hinchey III (péritonite purulente généralisée).

Appendicite aiguë

En dépit de nombreuses études, aucun consensus n'existe ici pour le recours à la laparoscopie. Les bénéfices attendus sont ceux de la chirurgie mini-invasive, avec une fréquence plus faible des abcès de paroi. Ils sont aussi techniques : en cas d'appendicite aiguë avec péritonite, la coelioscopie rend plus facile et efficace le lavage de la cavité abdominale. Par ailleurs, le bilan lésionnel diminue le nombre d'appendicectomies inutiles : en l'absence d'appendicite aiguë, aucune raison d'enlever l'appendice. Chez la jeune femme, la coelioscopie peut rectifier le diagnostic dans certains cas en distinguant mieux l'appendicite d'une pathologie gynécologique.

Des chirurgiens défendent donc la laparoscopie à moyen et à long terme, espérant un bénéfice (non prouvé) en termes d'occlusion sur bride, d'éventration, d'adhérence. La technique doit faciliter l'opération sur les femmes jeunes et les sujets obèses. Certains auteurs pointent cependant une durée opératoire un peu plus longue, une augmentation de la fréquence des abcès profonds intra-abdominaux (un risque deux fois et demi supérieur avec coelioscopie, selon deux méta-analyses), un coût légèrement supérieur.

Occlusion intestinale

Dans le cas de l'occlusion intestinale sur bride, il n'existe pas de consensus en faveur de la laparoscopie, faute d'étude randomisée. Comme l'intestin est dilaté avec l'occlusion, le risque est, à la mise en place des trocarts, de blesser l'intestin intra-abdominal. Le taux de conversion en laparotomie est assez élevé. Une réopération doit être menée après 12 % des laparoscopies. Le choix de la laparoscopie est donc à faire au cas par cas.

Traumatismes abdominaux ouverts.

Selon la SFCD, les données actuelles permettent de recommander avec un faible niveau de preuves la laparoscopie comme une alternative à la voie conventionnelle pour le diagnostic et le traitement de plaies de l'abdomen. Au cas par cas, là encore.

CHIRURGIE AMBULATOIRE

La cure de hernie et la cholécystectomie pourraient être réalisés, dans la majorité des cas, en ambulatoire. Ce n'est pas encore le cas en France.

Un secteur en plein développement.

Encore peu répandue en France, la chirurgie ambulatoire vise à prendre en charge un patient qui entre le matin et, à l'issue de l'intervention, sort l'après-midi. Réservée jusqu'à récemment à de petits actes périphériques, cette chirurgie s'est étendue à des soins plus importants. Privilégiée en ophtamologie, elle est à l'inverse relativement exceptionnelle dans des disciplines où les interventions s'avèrent souvent plus longues et plus complexes... comme la chirurgie digestive.

La laparoscopie favorise cependant le recours à l'ambulatoire dans ce domaine. En effet, elle raccourcit les durées d'hospitalisation, diminue la douleur postopératoire, la consommation des drogues anti-douleur (responsable de certains retards au réveil, de la reprise de la fonction ambulatoire et du passage à la position debout) et le retentissement fonctionnel des interventions (en particulier sur le poumon et l'intestin).

Ces dernières années, d'autres aspects ont également favorisé le recours à l'ambulatoire : les progrès en technique chirurgicale, en anesthésie (générale ou loco-régionale), en techniques d'analgésie et en réhabilitation précoce (par un lever et une réalimentation rapides).

Critères

Il faut que la durée de l'intervention soit compatible avec l'ambulatoire (moins de trois heures) ; que l'intervention ait un risque faible de complications graves précoces ; qu'il n'y ait pas de nécessité de surveillance postopératoire lourde. Sans oublier les aspects sociaux : n'entrent en ambulatoire que les patients qui peuvent avoir un accompagnement pour aller et revenir de l'hôpital pour l'intervention et au cours de la première nuit postopératoire.

Laparoscopies en chirurgie digestive en ambulatoire

Cure de hernie. Cette intervention purement pariétale, de courte durée, avec un risque de complication grave minime, se pratiquait en ambulatoire, sous anesthésie locale, avant même l'essor de la laparoscopie. Aujourd'hui, la laparoscopie nécessite une anesthésie... générale. Elle se pratique en ambulatoire quelle que soit la technique (transpéritonéale ou prépéritonéale), que le traitement soit pour une hernie unique ou bilatérale. Les chiffres manquent, mais il semble qu'aux États-Unis, 90 % des cures de hernie inguinale soient faites en ambulatoire. En France, très peu d'indications existent pour le traitement des hernies, mais la laparoscopie apparaît comme croissante en ambulatoire dans cette prise en charge. Avantages : moindre pénibilité du traitement et réduction des arrêts de travail.

Cholécystectomie. De l'ablation de la vésicule biliaire, les Américains avaient fait le fer de lance de la diminution de la durée d'hospitalisation postopératoire avant même l'émergence de la laparoscopie. Celle-ci a donc accentué la tendance, devenant la voie élective de la cholécystectomie, pratiquée pour la toute première fois dans cette voie en 1986, en Allemagne, avant d'arriver en France en 1987. La prise en charge ambulatoire de cette pathologie a ainsi connu, avec l'essor de la laparoscopie, un essor considérable à partir des années 1990, surtout aux États-Unis (où 80 % des cholécystectomies électives sont faites en ambulatoire), en Angleterre, dans nombre de pays développés et où la prévalence de la lithiase biliaire est très importante (au Chili et en Inde).

La technique, qui concerne souvent des malades jeunes, actifs, a eu plus du mal à s'imposer en ambulatoire en Europe du Sud. Pourquoi cette désaffection en France ? Parce que les patients ne sont pas incités à choisir ce mode d'intervention. De plus, les unités de chirurgie ambulatoire manquent. Et des chirurgiens sont réticents à changer leurs habitudes. Enfin, d'aucuns craignent que la technique, certes moins coûteuse pour la société, ne soit pas le meilleur moyen de gagner de l'argent pour les Hôpitaux. Une étude réalisée à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris a toutefois montré que la cholécystectomie en ambulatoire ne faisait pas perdre d'argent à l'établissement, comparée à une opération conventionnelle.

Au point de vue médical, l'expérience a montré que cette prise en charge était possible et intéressante pour le patient. Selon des essais comparatifs, il n'y a pas de différence concernant la fréquence des complications par rapport à une laparotomie. Et la laparoscopie présente des avantages en termes de réduction de la consommation d'antalgiques et d'incapacité professionnelle. Elle améliore nettement le confort postopératoire. Des études font aussi état de la « satisfaction » des patients.

Autres techniques, peu fréquentes. La laparoscopie en ambulatoire pourrait aussi concerner la cure chirurgicale du reflux gastro-oesophagien. Des études ont montré que c'était possible avec assez peu de réadmissions et un taux de satisfaction des patients relativement important, mais l'indication de la chirurgie du reflux gastro-oesophagien diminue considérablement. Autre domaine concerné, la gastroplastie pour obésité morbide, possible en ambulatoire selon certaines études. Les résultats sont identiques à ceux de la chirurgie conventionnelle, avec un moindre coût que par laparotomie, mais les indications d'anneaux dans le traitement de l'obésité diminuent pour des interventions plus importantes. La splénectomie (ablation de la rate) pourrait aussi se pratiquer en ambulatoire à l'avenir : le développement de nouveaux procédés de coagulation rend cette intervention peu risquée, notamment en termes d'hémorragie postopératoire. Enfin, de petites interventions hépatiques peuvent se pratiquer en ambulatoire en laparoscopie.

CHIRURGIE DE L'OBÉSITÉ

L'obésité en progression

L'incidence de l'obésité croît en France. Selon l'enquête Obepi de 2003, réactualisée en 2006, 13 % de la population française a un IMC (indice de masse corporelle, calculé en divisant le poids par la taille au carré) supérieur à 30, ce qui définit l'obésité. Le nombre de personnes souffrant d'un IMC supérieur à 40 a doublé, passant de 0,3 % à 0,6 % de la population. Une statistique considérable. Le risque de mortalité est multiplié par 2,5 puis croît de façon exponentielle dès que l'IMC dépasse 35.

Les techniques

La chirurgie bariatrique (de l'obésité) concerne les obésités les plus sévères et intervient dans le cadre d'un suivi thérapeutique global, en dernier recours.

La technique restrictive pure intervient sur la régulation de la capacité gastrique (et donc des volumes ingérés), à l'image de la gastroplastie verticale calibrée, quasi délaissée au profit de techniques réversibles comme l'anneau gastrique modulable. Il s'agit des interventions les plus répandues, habituellement réservées aux IMC supérieurs à 40. Récemment, a aussi été mise au point la Sleeve Gastrectomy (« en gouttière »).

Pratiqué dans les années 1960-1970 aux États-Unis et en France, un autre type d'intervention consistait à entraîner une malabsorption. Source de conséquences métaboliques et nutritionnelles majeures, la technique a été abandonnée.

Une intervention mixte, elle, est à la fois restrictive et malabsorptive. C'est le cas du court- circuit gastrique (Gastric Bypass), une intervention complexe répandue en France et qui peut être destinée aux IMC supérieurs à 50.

Enfin, sont pratiquées des interventions plus compliquées et peu usitées en France, comme des diversions bilio-pancréatiques, qui pourraient être réservées aux IMC supérieurs à 60.

Bénéfices de la chirurgie de l'obésité.

L'efficacité de la chirurgie bariatrique est attestée par de nombreux travaux sur les comorbidités, notamment métaboliques, pour la réduction du diabète de type II, mais aussi sur la mortalité à long terme. Des études, d'ailleurs réalisées pour la plupart par laparoscopie, montrent une supériorité de la chirurgie sur le traitement médical. Dans la SOS (Swedish Obese Subjects) Study, l'IMC tombe de 40 à 31 pour les hommes qui ont bénéficié de la chirurgie, de 38,7 à 35 pour les autres. L'anneau de gastroplastie, la gastroplastie verticale calibrée et le Gastric Bypass présentent un avantage, sur une période de dix ans, en termes de perte de poids. Sur ce critère, en laparoscopie, les études placent le Gastric Bypass en tête, suivi de la gastroplastie verticale calibrée et de l'anneau gastrique ajustable - les études manquent au sujet de la Sleeve Gastrectomy.

Avantages de la laparoscopie

En France, avant 1980, il y avait très peu de chirurgie bariatrique : une centaine d'interventions par an. La plupart des opérations à l'époque étaient réalisées aux États-Unis. Le procédé de cerclage gastrique est réalisé par laparoscopie en 1984. C'est le début de l'anneau de gastroplastie, posé de façon réversible. Cette intervention suscite un essor de la chirurgie de l'obésité et de la laparoscopie : en France, elle fait entrer la chirurgie de l'obésité directement dans la laparoscopie. Aujourd'hui, la grande majorité des interventions en chirurgie bariatrique doit être réalisée en laparoscopie.

N'a été publiée qu'une seule étude randomisée comparant laparotomie et laparoscopie pour l'anneau de gastroplastie. Conclusion : aucune différence au niveau de la perte de poids, mais avantage au groupe laparoscopie pour la durée de séjour hospitalier et le nombre de réadmissions. En France, certains chirurgiens considèrent même que si l'anneau gastrique ne peut être réalisé par laparoscopie, il faut y renoncer, ou adresser le patient à un confrère plus habitué à la laparoscopie. En ce qui concerne le Gastric Bypass, la durée moyenne de séjour est abaissée et on observe moins de douleurs postopératoires et de complications pariétales, une moindre durée d'hospitalisation. Aucune différence, pour la perte de poids, ne se dessine avec la laparotomie. Selon une étude, le coût de la laparoscopie est un peu plus élevé. Pour la gastroplastie verticale calibrée, les deux études menées concluent que la laparoscopie provoque moins de douleurs postopératoires et de complications pariétales.

Bref, l'intérêt de la laparoscopie dans la chirurgie de l'obésité repose sur des arguments concordants, en particulier sur la réduction des complications pariétales (un enjeu crucial pour les patients obsèses) et de la durée du séjour hospitalier. Elle demande cependant un apprentissage long et difficile, et un travail d'équipe pluridisciplinaire. Des travaux en cours visent à trouver des interventions encore moins invasives.

CHIRURGIE DU FOIE

Le dernier bastion de résistance à la laparoscopie.

La laparoscopie en chirurgie du foie tarde à se développer. Le foie est, en effet, un organe volumineux dont l'accès nécessite une grande incision. L'objectif est de réduire cette incision, qui elle-même induit une morbidité. Pour les patients qui ont une pathologie bénigne, c'est une intervention relativement mutilante. Le faible développement de la laparoscopie pour la résection hépatique, pourtant un bon candidat pour cette chirurgie (d'autant qu'elle consiste habituellement en une exérèse simple sans reconstruction), s'explique aussi par sa difficulté technique, avec des risques d'embolie gazeuse et d'hémorragie. Pourtant, une telle complexité a été dépassée dans bien d'autres domaines chirurgicaux. En réalité, la raison essentielle du retard laparoscopique est l'intérêt limité des chirurgiens hépatiques pour cette voie d'abord. L'arrivée de nouvelles générations de chirurgiens, dotées d'une expertise spécifique pour cette technique, pourrait modifier les pratiques.

Indications et limites

La laparoscopie est préconisée et pratiquée dans des cas rigoureusement sélectionnés, pour des lésions de petite taille et à distance des zones dangereuses du foie, ce qui constitue généralement moins de 20 % des indications d'hépatectomie. Les « segments laparoscopiques » sont ainsi ceux que l'on voit directement quand on introduit un laparoscope : les segments antérieurs et latéraux du foie. Ils sont à distance du hile hépatique, de la veine cave et des veines hépatiques. Parmi les indications validées, la lobectomie gauche, devenue par laparoscopie une intervention de routine. Se développe, par cette technique, le prélèvement du lobe gauche du foie chez le donneur vivant. Il s'agit, en général, de parents qui donnent le lobe gauche de leur foie à des enfants de moins de 2 ans. La laparoscopie permet aussi la chirurgie sur foie cirrhotique. Mais les spécialistes ne souhaitent pas, pour l'unique raison que la laparoscopie présente un caractère moins invasif, augmenter les indications de résection en cas de lésions bénignes. Pour les grosses tumeurs et les résections majeures, la laparoscopie montre pour le moment ses limites, même si des résections pour tumeurs malignes (carcinome hépatocellulaire, le plus fréquent des cancers du foie, et métastase hépatique) ont également été réalisées par cette voie.

Résultats

Il existe peu d'études sur la laparoscopie, en comparaison des nombreux ouvrages sur la chirurgie ouverte. Moins d'une vingtaine d'équipes - en Europe, aux États-Unis - ont rapporté sur ce sujet. La laparoscopie s'avère en tout cas très sûre. Les avantages sont ceux de la laparoscopie digestive en général : durée d'hospitalisation plus courte, moins de douleurs, intérêt cosmétique. Pour la cirrhose, la morbidité diminue. Les patients récupèrent plus vite. Ce qui, en cas de pathologie maligne comme une métastase colorectale, leur permet de bénéficier plus précocément d'une chimiothérapie adjuvante. De plus, il est possible de pratiquer plusieurs interventions successives par laparoscopie, comme une future transplantation hépatique.

Technologies

Des techniques sophistiquées sont nécessaires pour sectionner le foie. Car l'organe saigne. Sa partie périphérique ne comporte pas de gros vaisseau : pour de petites lésions, ou pour des sections initiales au cours d'une hépatectomie plus large, le chirurgien peut manipuler divers instruments, tels la thermofusion ou le scalpel harmonique, qui coupent et coagulent. Mais ceux-ci, aveugles, risquent de couper un vaisseau sans l'avoir identifié. Plus profondément dans le foie, le médecin recourt donc au dissecteur à ultrasons pour traiter le vaisseau sélectivement. Les agrafeuses mécaniques sont indispensables à la section des pédicules de grande taille.

CONCLUSION

La laparoscopie est arrivée à maturité pour nombre de pathologies et se développe pour des interventions complexes. Un chirurgien qui décide de convertir en laparotomie une opération envisagée en laparoscopie peut certes avoir raison : mieux vaut un chirurgien qui fait cette transformation en raison de difficultés qu'un médecin qui s'acharne en laparoscopie, quitte à commettre des erreurs. Mais, dans les blocs opératoires, la sentence selon laquelle « la maladie est tellement grave qu'on ne va pas s'embêter à opérer par laparoscopie » perd du terrain. Les nouvelles techniques bouleversent les stratégies chirurgicales. Si le rapport entre le bénéfice et le risque opératoire est positif, la laparoscopie s'impose pour un certain nombre d'interventions, et de multiples avantages ont été démontrés par rapport à une opération à ciel ouvert. De nouvelles études permettront peut-être de valider d'autres indications.

Vocabulaire

Issu des mots grecs « lapara » (flanc) et « scopie » (examen), le terme laparoscopie désigne la même intervention sur l'abdomen qu'une laparotomie, à une différence près : la laparotomie - de « lapara » et « tomie » (de couper, découper) - s'effectue à ciel ouvert. La laparoscopie est, en revanche, synonyme de coelioscopie, mot hérité du grec « coelio » (ventre) et également synonyme de péritonéoscopie - un terme jamais utilisé cependant car, selon un chirurgien, il contient l'idée de n'examiner que le seul péritoine. Au niveau diagnostic, la laparoscopie est l'une des techniques d'étude de l'intérieur du corps réunies sous le vocable d'endoscopie, aux côtés de l'arthroscopie, la bronchoscopie, la pleuroscopie...

Une chirurgie mini-invasive

La laparotomie, chirurgie mini-invasive, permet d'intervenir dans le corps sans grande ouverture. Elle consiste à faire plusieurs incisions dans la paroi abdominale et à y introduire des trocarts. Par ces petits tubes creux en fer ou en plastique, le médecin fait entrer une caméra (souvent reliée via l'ombilic à l'écran) ainsi que des instruments miniatures et, pour certains, jetables (pinces, ciseaux, instruments qui coagulent les vaisseaux par la chaleur ou permettent des anastomoses, etc.). Le nombre d'incisions et d'instruments dépend de la complexité de l'intervention : une exérèse du rectum requiert cinq ou six trocarts. Pour travailler, l'équipe soignante crée une cavité en injectant du gaz carbonique. Elle suit l'opération grossie sur un écran, de plus en plus souvent, actuellement, en haute définition. À l'issue de l'intervention, il n'y a pas de cicatrice, ou de 5 cm maximum quand une pièce opératoire est extraite. Les Américains utilisent aussi l'assistance manuelle : ils introduisent une main à l'intérieur de la cavité abdominale.

En savoir plus

Ce cours s'appuie sur une table ronde des entretiens de Bichat 2009, rapportée dans un volume issu des conférences. La chirurgie colorectale a été présentée par Yves Panis ; la chirurgie ambulatoire par Dominique Franco ; l'urgence chirurgicale par Frédéric Bretagnol ; la chirurgie de l'obésité par Simon Msika (cf. aussi sur http://www.snfge.asso.fr, rubrique « Bibliothèque-référentiels », puis « Conférences "Live" », rechercher Msika) et la chirurgie du foie par Daniel Cherqui. Merci à MM. Panis, Msika et Cherqui pour leur relecture de ce cours. Également à lire, le Dictionnaire médical à l'usage des IDE (éditions Lamarre, 2009).

Une technique qui nécessite un apprentissage

Dans le passé, des médecins ont opéré par laparoscopie des cancers du côlon sans respecter certains principes de chirurgie carcinologique : ils n'enlevaient pas assez de ganglions autour de la tumeur, écrasaient des ganglions, manipulaient la tumeur. Ce qui a conduit à des catastrophes, traduites dans les études menées au début des années 1990. En fait, ce n'était pas la laparoscopie qui était dangereuse, mais la pratique chirurgicale. Une formation préalable supplémentaire est donc recommandée, notamment pour manier les instruments en regardant un écran. Autre exemple : des études ont montré que, à l'origine, les interventions laparoscopiques pour Gastric Bypass étaient plus longues et suivies de complications plus fréquentes en laparoscopie qu'en laparotomie. Mais ces résultats se sont progressivement inversés, montrant l'existence d'une « courbe d'apprentissage » du chirurgien. Pour les infirmières de bloc aussi, l'essor de la laparoscopie a représenté « une révolution, estime le chirurgien Yves Panis. La formation s'est avérée très importante. »

Ailleurs aussi

Le recours aux techniques de laparoscopie ne se limite pas à la chirurgie digestive. Une intervention mini-invasive semblable est envisageable dans tous les domaines où une cavité peut être créée, pour des pathologies bénignes mais aussi pour des opérations de plus en plus difficiles. La technique est surtout développée en chirurgies thoracique, urologique, gynécologique, abdominale ou rénale. L'Assistance publique-Hôpitaux de Paris se félicitait ainsi, notamment, début 2009, du développement de la chirurgie rénale mini-invasive par laparoscopie chez l'enfant.

Traitement des cancers colorectaux

En 2007, en France, selon les données PMSI (Programme de médicalisation du système d'information), plus de 28 000 patients ont été opérés d'un cancer colorectal. La laparoscopie a été retenue dans 23,2 % des opérations - 19,4 % des colectomies (ablation partielle ou totale du gros intestin) ; 33,3 % des résections du rectum. La France est l'un des pays en tête : aux États-Unis, seuls 5 à 6 % des cancers colorectaux sont opérés par laparoscopie. À l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), 18 établissements pratiquent la chirurgie digestive adulte et opèrent des cancers colorectaux. En 2007, 24,7 % des 1 588 résections colorectales ont été faites par laparoscopie. Le taux varie selon les services, de 7 à 68 %, et n'égale pas 100 % en raison des récidives de cancer, des cancers envahissant l'organe de voisinage, des patients contre-indiqués. Le plan stratégique de l'AP-HP prévoit le recours à la laparoscopie pour 50 % des cancers colorectaux d'ici à 2014.