La surveillance du diabète chez l'adulte - L'Infirmière Magazine n° 257 du 01/02/2010 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 257 du 01/02/2010

 

endocrinologie

Cours

La prise en charge du diabète, qui touche plus de deux millions de personnes en France, nécessite une surveillance régulière, en particulier sur les plans glycémique, podologique et urinaire. Et le patient lui-même est amené à jouer un rôle crucial dans le suivi.

LE DIABÈTE

Le diabète est un groupe de maladies métaboliques caractérisées par une hyperglycémie chronique. En cause, un défaut de la sécrétion et/ou de l'action de l'insuline.

Définition. Le diabète est défini par une glycémie veineuse supérieure à 1,26 g/l (7 mmol/l) après un jeûne de huit heures et vérifié à deux reprises dans un laboratoire. Il est aussi défini par une glycémie supérieure à 2 g/l (11,1 mmol/l) deux heures après une charge orale de 75 g de glucose (critères proposés par l'OMS, l'Organisation mondiale de la santé). Cette définition est le résultat d'études qui ont déterminé le seuil glycémique susceptible de provoquer l'apparition d'une rétinopathie diabétique en dix à quinze ans.

Les différents diabètes

Diabète de type 1. Dans la grande majorité des cas, le diabète de type 1 est dû à une destruction auto-immune des cellules bêta du pancréas (celles qui sécrètent l'insuline). Ce processus débute plusieurs années avant le début du diabète, cinq à dix ans, voire plus. L'élévation de la glycémie suppose une destruction de 80 à 90 % des cellules.

Diabète de type 2. Il est la conséquence d'une anomalie sécrétoire de l'insuline, associée à une résistance de l'action de l'insuline souvent liée à des facteurs environnementaux (obésité, sédentarité).

Autres types de diabète. Il existe d'autres diabètes associés à certains états et syndromes : gestationnel (durant la grossesse), secondaire à des pathologies (mucoviscidose, pancréatite...).

Gravité du diabète. Elle est liée à ses complications.

Complications métaboliques aiguës. Hyperglycémie (comas hyperosmolaire et acidocétosique) et hypoglycémie du patient traité (coma hypoglycémique, acidose lactique sous metformine).

Complications vasculaires. L'hyperglycémie chronique est responsable de complications microangiopathiques et macroangiopathiques. Elle semble aussi être un indicateur de risque cardiovasculaire.

Microangiopathie. Les microangiopathies regroupent les complications spécifiques du diabète touchant la microcirculation (rétinopathie, glomérulopathie) et les nerfs, notamment périphériques (neuropathie).

Leur survenue et leur évolutivité sont étroitement corrélées à la durée du diabète et au degré d'équilibre glycémique. L'hypertension artérielle (HTA) joue un rôle important dans l'aggravation de la microangiopathie.

Macroangiopathie. La macroangiopathie (athérosclérose) atteint les artères musculaires, de l'aorte aux artères distales. Outre la toxicité vasculaire du glucose, la constitution de la macroangiopathie diabétique (maladie coronarienne, vasculocérébrale et artériopathie périphérique) fait intervenir l'HTA et les anomalies lipidiques. La macroangiopathie diabétique est aggravée par le tabagisme. Le risque global de décès est au moins deux fois plus important chez un diabétique que chez un non-diabétique.

Traitements

Objectifs. L'objectif thérapeutique est l'obtention de l'équilibre glycémique et le contrôle des facteurs de risque associés afin de diminuer la mortalité prématurée. L'équilibre glycémique est essentiel pour prévenir les complications aiguës et à long terme. L'éducation thérapeutique et l'adaptation du mode de vie font partie de la prise en charge.

Un objectif glycémique est un compromis entre un niveau glycémique bas qui offre le plus de garanties vis-à-vis des complications du diabète, et un niveau élevé qui met le plus à l'abri des hypoglycémies.

Les principaux éléments du contrôle de cet équilibre glycémique sont l'autosurveillance glycémique et la surveillance du taux d'hémoglobine glyquée (HbA1c) (voir encadré p. VI et plus bas).

La stricte maîtrise de l'hyperglycémie se traduit par un taux d'HbA1c proche des valeurs des personnes non diabétiques. La rançon de cette maîtrise hyperglycémique est l'augmentation du risque hypoglycémique.

La prévalence importante des lésions du pied et des amputations nécessite une gradation du risque podologique et l'adoption de mesures de prévention adaptées.

Traitements du diabète

Diabète de type 1. Vitale pour pallier l'insuffisance pancréatique, l'insulinothérapie vise à reproduire l'insulinosécrétion physiologique avec une insulinosécrétion basale continue à laquelle s'ajoutent des pics de sécrétion adaptés lors de l'alimentation. Le schéma d'insulinothérapie dit « basal prandial » se pratique soit par multi- injections soit par pompe.

Dans le cas de multi-injections : insulinothérapie de base par des injections d'insuline lente ; pics d'insulinémie prandiale assurés par des injections d'insuline analogue rapide avant chaque repas.

Dans le cas du patient sous pompe : administration continue et programmable d'insuline ultrarapide au moyen d'une pompe externe. Ce débit de base est éventuellement modulé pour couvrir les besoins nocturnes. En général, les patients réalisent des bolus supplémentaires à la demande avant les repas et peuvent même ajuster leur débit basal ponctuellement.

Diabète de type 2. Le traitement vise à normaliser la glycémie et à corriger l'ensemble des facteurs de risque cardiovasculaire amendables. Il combine mesures hygiéno-diététiques et médicaments, dont les antidiabétiques oraux et l'insuline.

Il existe cinq classes d'antidiabétiques oraux : la metformine, les inhibiteurs des alphaglucosidases intestinales (ascarbose, miglitol), les insulinosécréteurs (sulfamides hypoglycémiants et glinides), les glitazones et les incrétines (sitagliptine, exénatide). Les antidiabétiques oraux s'utilisent seuls, combinés entre eux ou à l'insuline (sauf exceptions). L'insulinothérapie est aussi utilisée en monothérapie.

La prise en compte des autres facteurs de risque cardiovasculaire (dyslipidémie, tabac, HTA...), leur traitement et les mesures hygiéno-diététiques à toutes les étapes de la prise en charge (exercice physique, perte de poids, arrêt du tabac) restent essentiels.

Autres traitements

Selon les facteurs de risque associés

- En cas de troubles lipidiques : règles diététiques et, si nécessaire, hypolipémiants (statines et fibrates) ;

- Pour contrôler la pression artérielle (objectif : æ 130/80 mmHg, selon les patients et les pathologies associées) : règles hygiéno-diététiques associées à un antihypertenseur en cas d'échec ;

- Pour contrôler le poids (objectif : indice de masse corporelle ou IMC (1) < 25) : règles alimentaires ;

- Sevrage tabagique : substituts nicotiniques...

Vaccinations

Tout diabétique doit être vacciné contre la grippe et le pneumocoque.

Épidémiologie en France métropolitaine (2)

Combien de diabétiques ?

- 2,4 millions de patients diabétiques en France métropolitaine, dont 92 % de type 2. L'âge médian du diabétique de type 2 est de 66 ans. Avant l'âge de 45 ans, 54 % des diabètes sont de type 1 ;

- quatre diabétiques sur dix ont un contrôle glycémique insuffisant ;

- un diabétique sur trois de type 2 et 14 % de type 1 ont une HbA1c inférieure à 6,5 ;

- 87 % des diabétiques sont suivis par un médecin généraliste.

Combien relèvent d'une autosurveillance glycémique ?

- Diabète de type 1 : 130 à 139 000 ;

- diabète de type 2 (insulinotraités ou avant la mise en route de l'insulinothérapie, traités par insulinosécréteurs, ou nécessitant une amélioration de l'équilibre glycémique) : au moins 1,902 millions ;

- diabète gestationnel : 45 000.

Lésions du pied et diabète

- Incidence annuelle des ulcérations du pied : entre 0,5 et 3 % ;

- 15 % des diabétiques présenteront une ulcération du pied au cours de leur vie ;

- prévalence des plaies (non cicatrisées et antécédents de plaies) : 12 à 15 % ;

- prévalence du mal perforant plantaire : entre 1,5 et 6 %, soit entre 37 500 et 150 000 cas en 2007 (davantage selon Entred, l'Echantillon national témoin représentatif des personnes diabétiques : 218 000 autodéclarés) ;

- nombre de patients avec pied à risque (grade 2 et 3) : 243 000 ;

- environ 50 % des personnes amputées sont diabétiques (7 955 sur 15 353 en 2003) ;

- 85 % des amputations des diabétiques sont précédées d'une ulcération du pied ;

- taux de survie des personnes amputées à dix ans inférieur à 10 % ; médiane de survie inférieure à 2,5 ans.

SUIVI DU PATIENT

Objectifs

Pour les diabètes de type 1 et 2. Il faut vérifier le niveau d'HbA1c ; l'autonomie de prise en charge et l'autosurveillance glycémique du patient diabétique ; la tolérance du traitement ; l'observance du traitement médicamenteux et des règles hygiéno-diététiques ; la survenue de nouveaux facteurs de risque, les niveaux de pression artérielle et des lipides, l'adaptation des traitements ; l'apparition de complications du diabète (oeil, rein, pied, systèmes nerveux et cardiovasculaire).

Objectifs spécifiques au diabète de type 1. Vérifier l'éducation et les changements psychologiques ; les zones et les techniques d'injection ; les maladies associées : goitre/dysthyroïdie, maladie coeliaque. Le risque accru de développer d'autres maladies autoimmunes dans le diabète de type 1 justifie la mesure de la fonction thyroïdienne, la recherche d'anticorps antithyroïdiens et de signes cliniques en faveur d'une maladie coeliaque avec éventuellement la recherche d'anticorps spécifiques.

Périodicité des examens médicaux

Visite chez le médecin. Le suivi du diabétique peut être réalisé par le médecin traitant et/ou l'endocrinologue spécialisé en diabétologie. Le recours au diabétologue ou à une équipe pluridisciplinaire est systématique en cas de déséquilibre du diabète, de survenue de complication et de mise en place du traitement les six premiers mois chez le diabétique de type 1.

Examens biologiques

Dosage de l'HbA1c. Il est systématique, tous les trois mois (quatre fois par an) ; pas forcément à jeun ; dans un même laboratoire pour comparer les résultats successifs ; indépendant des variations journalières de la glycémie ; pas altéré par l'exercice physique, le jeûne ou l'ingestion récente de sucres.

Glycémie veineuse à jeun. Pour contrôler la qualité des glycémies capillaires réalisées à domicile, une glycémie veineuse à jeun est dosée en laboratoire d'analyse médicale une fois par an. à jeun, la glycémie plasmatique est en général supérieure de 10 à 15 % à la glycémie capillaire car le sang veineux s'est « délesté » d'une partie de son glucose après avoir irrigué certains tissus.

Bilan lipidique. Dosage du cholestérol total, du HDL, des triglycérides et calcul du LDL-C, une fois par an.

Bilan rénal. Microalbuminurie, créatinémie à jeun et calcul de la clairance de la créatinine par la formule de Cockroft, une fois par an.

Surveillance ophtalmologique. Elle est annuelle avec réalisation d'un fond d'oeil pour dépister la rétinopathie diabétique. Chez le diabétique de type 1, cette consultation est recommandée à partir de trois ans après le diagnostic. Aucun délai chez le type 2 car le diagnostic de diabète est souvent tardif et les complications déjà présentes.

Examen dentaire. Bilan dentaire annuel systématique.

Autres surveillances. Un électrocardiogramme (ECG) au repos annuel est préconisé. Le recours à un cardiologue, médecin vasculaire, radiologue, néphrologue, neurologue, se justifie pour le diagnostic de complications.

L'accompagnement par d'autres professionnels dépend de la situation : infirmière pour l'éducation thérapeutique, le suivi, l'injection d'insuline, l'apprentissage de l'autosurveillance glycémique ; diététicien pour l'éducation et l'adoption d'un comportement alimentaire adéquat ; tabacologue pour les addictions et notamment celle au tabac et la gestion d'un terrain anxio- dépressif ; psychiatre et psychologue pour la prise en charge des troubles du comportement.

Contrôle des connaissances du patient. Dès le diagnostic du diabète, l'éducation thérapeutique et l'adaptation du mode de vie sont essentielles. Les connaissances du patient ne sont pas une acquisition ad vitam æternam : tout changement dans sa vie peut modifier sa perception et sa gestion de la maladie. L'introduction de nouveaux traitements, les maladies intercurrentes (maladie survenant « en plus » du diabète) peuvent modifier l'équilibre glycémique et justifier une adaptation du traitement.

Éducation thérapeutique. L'éducation thérapeutique comporte l'intelligibilité de soi et de sa maladie ; la maîtrise des gestes techniques d'autosurveillance et d'autotraitement (autosurveillance glycémique, surveillance podologique...) ; la compétence d'autodiagnostic et celle d'autogestion de crise ; l'autoadaptation au mode de vie et à l'évolution des thérapeutiques ; la gestion des complications. Parmi les gestes essentiels à acquérir et à maintenir, la reconnaissance des signes précoces d'hypoglycémie et d'acidocétose (pour le diabète de type 1) ; la reconnaissance et la gestion de l'hypoglycémie (diabète de type 2 sous sulfamides hypoglycémiants ou insuline) ; la surveillance des pieds (pour tout diabétique à risque podologique).

Mode de vie. Une alimentation adaptée et la lutte contre la sédentarité sont primordiales pour tous. Dans le type 2, l'implication du mode de vie dans l'apparition de la maladie et la notion de facteurs de risque cardiovasculaire méritent une attention particulière pour corriger les erreurs alimentaires qualitatives (réduction des graisses saturées, des sucres raffinés, de la consommation d'alcool), pratiquer une activité physique (au moins trois heures par semaine) et diminuer - voire arrêter - le tabac.

SURVEILLANCE GLYCÉMIQUE

Hémoglobine glyquée. Chez un sujet normal, le taux d'HbA1c est compris entre 4 et 6 %. À une valeur de 6 % correspond une glycémie moyenne de 1,20 g/l avec ensuite une progression linéaire de 0,35 g/l par incrément de 1 % (7 % = 1,55 g/l ; 8 % = 1,90 g/l...).

Intérêt. Témoin de l'altération conduisant aux complications du diabète, l'HbA1c est l'index validé de la surveillance du contrôle glycémique : elle seule reflète le degré de maîtrise du diabète. Sa valeur optimale est æ 6,5 %. En moyenne, toute diminution de 1 % de l'HbA1c diminue de 20 % la fréquence des complications.

Objectifs du taux d'HbA1c. Il faut toujours traduire l'objectif d'HbA1c en objectif glycémique pour le patient.

Diabète de type 1. Il s'agit d'obtenir une Hb1Ac inférieure à 7 %, soit une glycémie moyenne inférieure à 1,5 g/l. Cependant, l'augmentation de la fréquence des hypoglycémies sévères oriente plutôt vers un objectif raisonnable d'une HbA1c inférieure à 7,5 % (glycémie inférieure à 1,50-1,60 g/l).

Diabète de type 2. Les objectifs glycémiques tiennent compte du risque d'hypoglycémie sévère, de l'ancienneté du diabète, de l'âge du patient et de sa situation personnelle. L'objectif général est une HbA1c inférieure à 6,5 %. Idem pour les patients âgés (75 ans et plus), sans pathologie sévère ni invalidante associée. Chez un patient âgé, polypathologique (plus ou moins dénutri, peu ou pas autonome), l'objectif est une HbA1c inférieure à 8-9 %.

Autosurveillance glycémique

Place de l'autosurveillance glycémique. L'autosurveillance glycémique est un outil pour gérer et comprendre son diabète. Elle permet le dosage à domicile du glucose dans le sang capillaire, prélevé grâce à un autopiqueur. Le patient - ou un aidant - surveille la glycémie.

Le système est constitué d'un lecteur de glycémie et des réactifs associés (bandelettes, capteurs).

Diabète de type 1. Systématique et pluriquotidienne, l'autosurveillance glycémique est indispensable pour :

- suivre l'évolution des glycémies ;

- adapter les doses d'insuline à chaque injection (plus il y a d'injections, plus il y aura de contrôles glycémiques) ;

- limiter et gérer les hypoglycémies ;

- dépister les hypoglycémies et les dysfonctionnements du matériel (cathéter bouché) chez les patients sous pompe.

Diabète de type 2. L'autosurveillance glycémique est indiquée, en fonction des situations cliniques :

- pour les patients insulinotraités ;

- lorsque l'insuline est envisagée à court ou à moyen terme et avant sa mise en route ;

- pour les patients traités par insulinosécréteurs (sulfamides et glinides) afin de rechercher ou de confirmer une hypoglycémie et d'adapter si besoin la posologie de ces médicaments ;

- afin d'améliorer l'équilibre glycémique lorsque l'objectif n'est pas atteint, comme instrument d'éducation permettant d'apprécier l'effet de l'activité physique, de l'alimentation et du traitement.

Hyperglycémie gestationnelle (diabète gestationnel). L'insuline ne passe pas la barrière placentaire contrairement au sucre. Ainsi, un diabète mal maîtrisé durant la grossesse est responsable d'un hyperinsulinisme foetal provoquant macrosomie, hypoxie tissulaire, retard de maturation pulmonaire et hypertrophie cardiaque. Lors de l'accouchement, le risque d'hypoglycémie sévère du nouveau-né est majoré.

Limites de l'autosurveillance glycémique. L'autosurveillance glycémique ne doit pas être généralisée à l'ensemble des patients, ni être passive : chaque mesure glycémique a du sens et débouche sur des conséquences thérapeutiques. De même, l'autosurveillance glycémique n'est pas conseillée chez les patients qui ont une HbA1c inférieure à 6,5 % et qui ne prennent pas de sulfamides, de glinides ou d'insuline.

Non systématique dans le type 2, l'autosurveillance glycémique s'inscrit dans une démarche construite, dans laquelle l'éducation du patient est primordiale. On doit expliquer au patient et organiser avec lui cette autosurveillance glycémique en insistant sur la détermination et la fréquence des horaires ; la détermination des objectifs ou seuils glycémiques ; la décision à prendre en fonction des résultats.

Rythmes et objectifs des contrôles. Quel que soit le type de diabète, un contrôle glycémique supplémentaire est effectué en cas d'activité ou de repas plus important, en cas de malaise ou de maladie intercurrente.

Diabète de type 1. Contrôles quatre à six fois par jour (avant chaque repas et au coucher) ; en post-prandial (une heure et demie à deux heures maximum après le début du repas) une fois par semaine ou tous les quinze jours pour vérifier que la montée glycémique liée au repas est satisfaisante ; parfois vers 2 ou 3 heures du matin afin de détecter une éventuelle hypoglycémie nocturne.

Diabète de type 2. Si le patient est sous insuline seule, voir diabète de type 1.

Deux moments sont à privilégier pour les contrôles : le matin à jeun où la glycémie reflète la production hépatique de glucose pouvant justifier une escalade thérapeutique ; le soir avant le dîner, quand la glycémie est la plus basse.

Pour un patient diabétique sous sulfamide hypoglycémiant :

- lors de l'instauration de traitement ou de modification : faire glycémie à jeun, ainsi qu'à 18 ou 19 heures tous les jours ;

- en phase stable (normoglycémique) : faire glycémie à jeun, ainsi qu'à 18 ou 19 heures, deux à trois fois par semaine. Ajouter une fois par semaine une glycémie à jeun, ainsi qu'une autre une heure et demie à deux heures après les repas pour vérifier qu'elles sont dans l'objectif ;

- en cas d'hypoglycémie de fin d'après-midi (< 0,7 g/l) malgré une glycémie à jeun correcte, baisser la dose du sulfamide (ou du glinide) une fois les autres causes écartées (repas sauté, activité inhabituelle...).

En cas d'injection quotidienne d'insuline plus traitement oral :

- pendant la période d'adaptation de la dose d'insuline : contrôle au réveil et avant le dîner tous les jours ;

- en général, objectif de la glycémie au lever de 0,8 à 1,2 g/l, avec des besoins en insuline de l'ordre de 0,4 unité par kg. L'augmentation de la dose se fait tous les deux ou trois jours. Lorsque l'objectif est atteint, contrôle au réveil tous les jours et avant le dîner deux fois par semaine.

En prévision d'une insulinothérapie, faire deux à quatre contrôles par jour. Privilégier le matin à jeun ; le soir avant le dîner, quand la glycémie est la plus basse. Puis en post-prandial, une heure et demie à deux heures maximum après le déjeuner (part importante de l'hyperglycémie des 24 heures) ; au coucher pour projeter une éventuelle hypoglycémie de nuit (entre 1 et 3 heures du matin).

Conséquence : la future injection d'insuline lente ou semi-lente sera faite le soir en cas de glycémie constatée haute le matin, le matin en cas de glycémie correcte à jeun mais tendant à monter dans la journée.

Diabète gestationnel. Les objectifs glycémiques sont, à jeun, inférieurs à 0,90 g/l (entre 0,7 et 0,90 g/l) ; en post-prandial inférieurs à 1,40 g/l à une heure et inférieurs à 1,20 g/l à deux heures. Six contrôles doivent être assurés par jour : avant et après les trois repas (celle du coucher correspond souvent à la post-prandiale du dîner).

Éducation alimentaire et autosurveillance glycémique. Doser la glycémie en pré et en post-prandial permet de visualiser l'effet du repas sur la glycémie chez le diabétique de type 1 (dans le cadre de l'apprentissage de l'insulinothérapie fonctionnelle) ou chez le diabétique de type 2 souhaitant s'éduquer. L'idée : tester plusieurs types de repas (repas « sandwich », repas familiaux, restauration rapide...).

A quel rythme effectuer des contrôles ? Plusieurs fois par semaine, en alternance à jeun et en post-prandial. Exemple : si on passe de 1,1 g/l à 1,70 g/l ou de 1,5 à 2,1 g/l, la dose d'insuline au repas et la quantité de glucides ingérés sont correctes. Si on passe de 1,1 à 1,3 g/l en post-prandial, cela signifie que le repas aurait pu comporter plus de glucides (fruit en fin de repas, pain...) ou que la dose d'insuline a probablement été trop importante.

SURVEILLANCE PODOLOGIQUE

Définition. On appelle « pied diabétique » toute lésion du pied, ouverte ou non, en rapport avec une complication de la maladie diabétique sous-jacente.

Les atteintes sont principalement imputables à l'effet délétère du diabète sur les nerfs périphériques et/ou sur la circulation artérielle des membres inférieurs, et sont souvent précipitées par la survenue d'une infection.

Principaux tableaux cliniques : mal perforant plantaire et pied de Charcot dans les atteintes neuropathiques, plaies neuro-ischémiques... La pathologie « pied diabétique » est dominée par la survenue d'une ulcération et le risque d'amputation.

Gradation du risque podologique. Le risque podologique évalue le risque d'ulcération chronique ou d'amputation. Sa gradation permet d'adapter la prise en charge et de cibler l'éducation. Il existe quatre niveaux de risque (ou grades) et quatre niveaux de prise en charge (International Working Group on the Diabetic Foot, 1999).

- grade 0 : 0 neuropathie, 0 artérite, possibilité de déformations du pied indépendantes du diabète. Mesures préventives : examen des pieds (recherche d'une neuropathie ou d'une artérite, déformation...). Rythme de surveillance : une fois par an ;

- grade 1 : neuropathie sensitive isolée, définie par la perte de sensation au monofilament de 10 g en un point, au moins à deux reprises. Mesures préventives : examen des pieds et des chaussures à chaque consultation par le médecin traitant ; éducation du patient. Rythme de surveillance : une fois tous les six mois ;

- grade 2 : neuropathie associée à une déformation du pied et/ou une artérite définie par l'absence de palpation de 2 pouls à un pied, confirmée par doppler. Mesures préventives : examen des pieds et des chaussures à chaque consultation par le médecin traitant ; éducation du patient ; soins de podologie tous les deux mois : prise en charge de quatre consultations annuelles chez un pédicure-podologue. Le rythme de surveillance est d'une fois tous les trois mois ;

- grade 3 : antécédent de lésion du pied (ulcération, pied de Charcot) ou d'amputation du membre inférieur. Mesures préventives : examen des pieds et des chaussures à chaque consultation par le médecin traitant ; éducation du patient ; soins de podologie tous les deux mois : prise en charge de quatre consultations annuelles chez un pédicure-podologue ; orientation pour un bilan annuel vers une équipe spécialisée. Rythme de surveillance : une fois par mois.

SURVEILLANCE URINAIRE

Autosurveillance de la glycosurie. Une surveillance isolée de la glycosurie (présence de sucre dans les urines) à domicile est abandonnée pour l'autosurveillance glycémique.

Détection des corps cétoniques. La cétose est le résultat clinique et biologique d'une carence absolue ou relative en insuline. La recherche des corps cétoniques est indispensable dès que la glycémie est supérieure à 2,5 g/l.

Surveillance. Élément important de la surveillance du diabète insulinotraité, la détection des corps cétoniques doit être systématique, journalière ou ponctuelle, chez les diabétiques de type 1 porteurs de pompe à insuline ou insulinotraités lors d'une hyperglycémie inexpliquée et inhabituelle ; chez la femme enceinte.

Urine ou sang capillaire ? La détection des corps cétoniques peut se faire dans les urines, mais elle est plus précoce dans le sang capillaire (il existe des lecteurs de glycémie mixtes).

1- IMC = poids (kg)/taille2 (cm).

2- « Séances de prévention des lésions des pieds chez le patient diabétique, par le pédicure-podologue », Haute Autorité de santé (HAS), 2007 (à lire sur le site Internet http://www.has-sante.fr), et Entred 2007-2010 et 2001-2003 (sur http://www.invs.sante.fr).

Régulation physiologique de la glycémie

La glycémie à jeun ou avant les repas est le résultat de la fabrication de sucre par le foie pour nourrir les cellules. Elle résulte donc d'une libération (néoglucogénèse à partir des acides aminés - alanine - et lactates). Elle est comprise entre 0,7 et 0,90 g/l.

La glycémie post-prandiale est le résultat de la capacité des muscles et du foie à stocker plus ou moins rapidement le sucre apporté par l'alimentation. Mesurée une heure et demie après le début d'un repas, elle est normale si elle est inférieure à 1,50 g/l.

La glycémie, des moles aux grammes

Il peut être utile de savoir convertir en mol/l la glycémie donnée en g/l, et vice-versa.

Méthode avec formule. Elle utilise la masse moléculaire du glucose et le calcul du nombre de moles.

Concentration de substance (mol/l) = concentration de masse (g/l)/masse moléculaire du glucose en g (180 g).

Ainsi, a g/l x 5,55 = b mmol/l

c mmol/l x 0,18 = d g/l

Méthode par approximation

- Conversion de g en mmol/l : multiplier les g/l par 10, diviser le résultat par 2 et augmenter le chiffre obtenu de la moitié de la valeur en g/l du début. Exemple pour 2 g/l : 2 x 10 = 20, divisé par 2 = 10 et l'on rajoute la moitié de 2. On arrive à 11 mmol/l.

- Conversion des mmol en g/l : multiplier les mmol par 2 puis diviser par 10 et diminuer un peu le résultat. Exemple pour 4,2 mmol/l : 4,2 x 2 = 8,4 divisé par 10 = 0,84. Soit, en « gros », 0,75 g/l.

g/l 0,5 0,54 1 1,26 1,40 1,80 2 2,5 3 3,5 4

mmol/l 2,77 Å 3 5,55 Å 7 7,77 Å 10 11,1 13,87 16,65 19,42 22,2

L'HbA1c, hémoglobine glyquée

L'HbA et ses deux sous-unités a et b est la principale des trois hémoglobines humaines. L'HbA1c résulte de la glycosylation ou glycation de la chaîne b par le glucose plasmatique (grossièrement, c'est une adhésion du glucose aux protéines). La proportion de glycation diffère selon l'âge du globule rouge (GR), celui-ci vivant 120 jours : les plus « jeunes » n'ont pas été en contact suffisamment longtemps avec le glucose pour contenir beaucoup de HbA1c, à la différence des plus « âgés ». Le taux de HbA1c, formée à une vitesse proportionnelle à la glycémie, est donc corrélé à la glycémie moyenne des derniers mois.

La conduite à tenir en cas d'hypoglycémie

L'OMS définit l'hypoglycémie comme une glycémie inférieure à 0,50 g/l. Les hypoglycémies surviennent essentiellement chez les patients insulinotraités de type 1. En cause, un défaut d'apport calorique, un exercice physique inhabituellement important. Chez les types 2, les accidents hypoglycémiques touchent essentiellement les personnes âgées polymédicamentées traitées par sulfamides hypoglycémiants.

Signes annonciateurs : sueurs, tremblements, troubles de la vue, fatigue, faim, sentiment de fonctionner au ralenti, vertiges, pâleur, comportement incohérent, accès de nervosité, mutisme, yeux « vides »... Parfois, les signes sont absents malgré une glycémie à 0,20 ou 0,30 g/l.

Il faut mesurer la glycémie, resucrer, faire une nouvelle glycémie vingt minutes après, resucrer en l'absence d'une augmentation de 0,50 g/l. Resucrer est possible avec trois morceaux de sucre (n° 4) ; une briquette de jus de fruit sucré glacé (1) ; un verre de cola, de limonade ou de soda glacé non light ; un berlingot de lait concentré sucré ; une cuillère à soupe de miel ou de confiture ; ou enfin une pâte de fruit (20 g).

1- Les liquides sucrés et glacés passent très vite dans l'estomac et resucrent plus rapidement.

D'où proviennent les corps cétoniques ?

En l'absence d'insuline, le sucre excédentaire dans le sang (à partir d'un taux de 1,80 g/l) est éliminé dans les urines (glycosurie), en même temps que de l'eau (polyurie osmotique), entraînant une déshydratation. Parallèlement, l'organisme utilise et dégrade les graisses de réserve. Leur dégradation conduit à la production d'acétone dans le sang, puis dans les urines. D'où une accumulation de déchets acides dans le sang (acidose) qui se traduit par une fatigue, une perte d'appétit, puis des nausées et des vomissements, voire un coma.

Interférences médicamenteuses

Certains médicaments peuvent modifier l'équilibre glycémique :

- médicaments hypoglycémiants : aspirine à haute dose, tramadol (Topalgic®...), fibrates (fénofibrate Lipanthyl®...), inhibiteurs de l'enzyme de conversion (IEC), quinine, testostérone etc. ;

- médicaments hyperglycémiants : corticoïdes, neuroleptiques, inhibiteurs de la protéase VIH, bêta-2 stimulants, lévothyroxine, traitement hormonal, ciclosporine, nicotine etc. ;

- médicaments hypo ou hyperglycémiants selon les circonstances : fluoroquinolones (Ciflox®, Enoxor®, Noroxine®...) isoniazide (Rimifon®...), cyclophosphamide (Endoxan®) etc. ;

- médicaments augmentant l'effet hypoglycémiant des sulfamides : antifongiques azolés (kétoconazole, itraconazole, miconazole Daktarin®, fluconazole Triflucan®), diurétiques, anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), IEC, inhibiteurs de l'angiotensine II (candesartan Atacand®, Kenzen®, losartan Cozaar®...), phénylbutazone, ciprofloxacine (Ciflox®), AVK (Previscan®, Sintrom®...) ;

- médicaments pouvant accentuer et/ou prolonger l'effet hypoglycémiant du répaglinide (Novonorm®) : clarithromycine, itraconazole, kétoconazole, triméthoprime, IMAO, bêtabloquants non sélectifs, IEC, salicylés, AINS, alcool, stéroïdes anabolisants.