Les répulsifs cutanés - Ma revue n° 294 du 01/07/2013 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 294 du 01/07/2013

 

Spécial été

Cahier de formation

LE POINT SUR

Les répulsifs cutanés font partie intégrante des moyens de lutte contre les piqûres de moustiques. Le choix du produit et les conseils d’application doivent autant tenir compte de l’utilisateur que du risque de transmission d’une maladie vectorielle.

Le moustique, vecteur de maladies

Les moustiques peuvent transmettre certaines maladies, essentiellement en zone tropicale.

→ Le paludisme est transmis par l’anophèle femelle qui pique principalement au crépuscule et la nuit. Le chikungunya, la dengue et la fièvre jaune (dont il existe un vaccin) sont des maladies transmises par des moustiques du genre Aedes qui piquent au cours de la journée. La fièvre à virus West Nile (ou fièvre du Nil Occidental) est transmise par des moustiques du genre Culex qui piquent au crépuscule et la nuit.

→ Depuis 2004, le moustique tigre (Aedes albopictus), vecteur du chikungunya et de la dengue, est présent en Europe, et notamment dans le Sud de la France (période d’activité de mai à novembre). L’ensemble du territoire fait l’objet d’une surveillance. Dans les départements où le moustique tigre* est déclaré présent, les médecins et les biologistes doivent déclarer aux ARS (Agences régionales de santé) tout cas suspect de dengue ou de chikungunya. En France, deux cas autochtones de dengue et deux cas autochtones de chikungunya ont été recensés en 2010. Ce phénomène reste isolé grâce à ce réseau de surveillance (voir les précautions à prendre dans “En pratique” ci-après).

Quatre substances “actives”

→ La Société de médecine des voyages et la Société française de parasitologie ont coordonné l’élaboration de recommandations de bonnes pratiques concernant l’usage des répulsifs comme outil de la protection personnelle antivectorielle. Quatre substances actives sont reconnues par la réglementation européenne : DEET, picaridine, IR 3535, PMDRBO.

→ L’anophèle (responsable de la transmission du paludisme) est le moustique qui présente la plus grande résistance vis-à-vis des répulsifs cutanés. Dans les zones à risque de transmission d’une maladie vectorielle, il est recommandé d’utiliser les répulsifs à “concentration efficace”, assurant au minimum 4 heures de protection vis-à-vis des anophèles associés aux autres moyens de protection (moustiquaires et vêtements imprégnés d’insecticide…).

→ DEET (diethyltoluamide) : le plus anciennement utilisé et le mieux évalué (employé sans restriction d’âge aux États-Unis). Il est présent dans les produits Insect Écran Famille Spray, Prébutix Zones Tropicales Spray, Insect Écran Zones Infestées Spray, etc. Ses effets indésirables les plus fréquents sont des irritations cutanées et oculaires. Les effets neurologiques graves rapportés sont survenus essentiellement dans le cadre de mésusages (applications prolongées et/ou sur une grande surface). Il détériore les fibres synthétiques, le cuir et le plastique (montres, branches des lunettes…).

→ Picaridine (ou icaridine ou KBR3023) : son profil d’effets indésirables et son efficacité semblent proches du DEET. Il est présent dans les produits tels MoustiKologne Haute Protection Spray, Insect Écran Spécial Tropiques Spray, etc. Son emploi prolongé (plus d’un mois d’affilée) est déconseillé. La picaridine est contre-indiquée chez les enfants de moins de 2 ans.

→ IR3535 (ou éthyl-butyl-acétyl-aminopropionate, EBAAP) : répulsif bien toléré, mais avec une durée de protection moindre que les molécules précédentes vis-à-vis des anophèles. On le trouve dans les produits MoustiKologne Haute Tolérance Crème, Apaisyl Lotion, Cinq sur Cinq Tropic Lotion Spray, etc.

→ PMDRBO (p-menthane 3,8-diol Rich Botanic Oil, ou PMD, marque déposée Citriodiol) : proche du menthol, c’est un analogue synthétique présent dans l’huile essentielle des feuilles de l’eucalyptus citronné (Corymbia citriodora ou Eucalyptus citriodora). Son recul d’utilisation est plus faible que les autres molécules. Il est présent dans les produits comme Biovectrol Naturel Spray, Puressentiel Antipique Spray, Prébutix Naturals Lotion Spray, etc.

À savoir : pas de répulsif chez les nourrissons de moins de 6 mois. De 6 mois à l’âge de la marche, 1 application par jour. De l’âge de la marche à 2 ans, 2 applications par jour.

Critères de choix du répulsif

→ En zone à risque de transmission d’une maladie vectorielle, et notamment lorsqu’il s’agit de limiter le risque d’exposition aux piqûres d’anophèle (les moustiques les plus “résistants”), il est impératif de se tourner vers des répulsifs renfermant l’une des quatre substances actives citée ci-dessus à concentration suffisante (en fonction de l’âge).

→ En dehors des zones à risque de transmission de maladies graves, il est possible de s’orienter vers des dosages moins élevés. L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) recommande de privilégier l’IR3535 chez les jeunes enfants et les femmes enceintes.

→ Chez le nourrisson de moins de 6 mois, ainsi qu’au cours de la grossesse, il est recommandé de privilégier les mesures physiques de protection (moustiquaires pré-imprégnées du lit ou du berceau, vêtements longs et pré-imprégnés…).

→ Les répulsifs cutanés peuvent être utilisés en cas d’allaitement (se laver les mains après application).

En pratique

→ Les répulsifs s’appliquent sur les zones découvertes (inutile sous les vêtements), sur une peau saine. Si une protection solaire est nécessaire, le répulsif s’applique au moins 20 minutes après le produit solaire.

→ Les moments d’applications doivent être adaptés à l’activité des vecteurs : en journée et en fin d’après-midi (vis-à-vis des moustiques vecteurs de la dengue et du chikungunya), avant la tombée de la nuit (pour une protection contre des anophèles et des moustiques du genre Culex).

→ La durée de protection dépend de la concentration du produit mais aussi de paramètres extérieurs : température ambiante, degré d’humidité, sudation, frottement des vêtements sur la peau. Si nécessaire, réitérer les applications sans dépasser les recommandations mentionnées par le fabricant.

→ Il faut consulter un médecin en cas de fièvre brutale et de douleurs articulaires (suspicion de paludisme, dengue ou chikungunya), en particulier au retour d’un voyage en zone tropicale.

→ En France, les malades suspectés ou atteints de dengue ou de chikungunya doivent se protéger des piqûres de moustiques (répulsifs cutanés, moustiquaires imprégnées…) pendant 7 jours au minimum après le début des symptômes. Ces mesures évitent que le malade ne se fasse piquer par un moustique tigre “sain” : ce dernier deviendrait alors vecteur de la maladie et pourrait la transmettre à son tour.

Les autres moyens de protection

→ La climatisation et la ventilation diminuent les risques de piqûres (en perturbant le vol des insectes) mais ne sont pas suffisantes utilisées seules. Ces mesures peuvent compléter l’usage des diffuseurs électriques à l’intérieur des maisons.

→ Les huiles essentielles ne font pas partie des outils de protection antivectorielle en raison d’une durée de protection insuffisante. De plus, elles sont potentiellement allergisantes et photosensibilisantes. La vitamine B1, les ultrasons, les bracelets ou patchs antimoustiques (renfermant des huiles essentielles) n’offrent pas une protection suffisante.

→ En Europe et en France, la lutte contre les moustiques passe aussi par l’élimination des eaux stagnantes à proximité des maisons (vider les soucoupes des pots de fleurs, couvrir hermétiquement les collecteurs d’eau de pluie ouverts…).

* En savoir plus sur le moustique Tigre : www.vigilance-moustiques.com.