Réponse immunitaire et voies d’administration - L'Infirmière Libérale Magazine n° 358 du 01/05/2019 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 358 du 01/05/2019

 

VACCIN CONTRE LA GRIPPE

ACTUALITÉ

S. H.  

Selon les recherches menées par l’équipe de Béhazine Combadière, directrice de recherche à l’Inserm, les voies d’administration du vaccin semblent jouer sur la qualité des réponses immunitaires.

LE VACCIN ANTIGRIPPAL RESTE LE MEILLEUR MOYEN POUR PROTÉGER LES POPULATIONS ET RÉDUIRE LE RISQUE DE COMPLICATIONS GRAVES, voire de décès. Son efficacité n’est cependant pas totale, puisque sa composition est fixée chaque année par l’Organisation mondiale de la santé plusieurs mois avant l’apparition du pic épidémique et qu’elle ne repose que sur la probabilité que telle ou telle souche de grippe sévisse lors de l’hiver à venir. Les virus grippaux étant très changeants, et le délai pour développer un vaccin variant de cinq à six mois, le vaccin ne cible pas toujours l’intégralité des souches circulantes.

L’équipe de Béhazine Combadière, directrice de recherche à l’Inserm au sein de l’unité 1 135 « centre d’immunologie et de maladies infectieuses », travaille depuis des années sur l’impact des voies d’administration de vaccins sur la qualité des réponses immunitaires. En effet, les vaccins sont habituellement administrés par voie musculaire et sont efficaces dans l’induction des réponses humorales (production d’anticorps) alors que l’autre composant de la réponse immunitaire, la réponse cytotoxique (production de lymphocytes T qui détruisent directement les cellules infectées), est peu induite par voie musculaire.

Essai clinique

L’équipe s’est penchée sur l’intérêt des voies cutanées par injection intradermique ou par application transcutanée (voie des follicules pileux) pour l’induction des réponses cytotoxiques au cours de la vaccination antigrippale. Pour cela, un essai clinique de phase I/II a été mené sur 60 personnes âgées de 18 à 45 ans, en collaboration avec le centre d’investigation clinique de vaccinologie Cochin-Pasteur. L’étude, publiée dans le Journal of Clinical Investigation, le 8 avril, démontre que les voies cutanées induisent chez certains sujets une réponse cytotoxique après vaccination antigrippale. « Ce résultat plaide en faveur de la considération de cette voie d’injection du vaccin dans la mesure où elle déclenche une réaction immunitaire supplémentaire à celle obtenue dans le cadre d’une vaccination classique. Ces réponses cytotoxiques seraient notamment protectrices chez les personnes âgées après vaccination antigrippale », explique Béhazine Combadière, coauteure de l’étude. Mais au-delà de ce choix des voies d’administration, le cœur de ces nouveaux travaux de recherche fondamentale est l’implication de l’immunité innée (signature d’expression de gènes le lendemain de la vaccination) dans la qualité de la réponse immunitaire. Un certain nombre de biomarqueurs exprimés le lendemain de la vaccination seraient prédictifs de la qualité de la réponse immunitaire trois semaines plus tard, laissant entrevoir la possibilité d’un ajustement de stratégie. « D’autres études sont nécessaires pour valider l’intérêt de ces biomarqueurs et leur utilisation ultérieure », estiment les chercheurs.

Selon le bilan préliminaire publié par Santé publique France, l’épidémie de grippe 2018-2019 a été de courte durée : débutée en janvier, elle a duré deux mois. Elle a été marquée par la co-circulation des deux virus de type A (H1N1 et H3N2). Son ampleur a été modérée en médecine ambulatoire mais avec des niveaux d’activité plus élevés au moment du pic de l’épidémie que lors des trois dernières saisons (2015-16 à 2017-18). Par ailleurs, cette épidémie se caractérise par sa sévérité en milieu hospitalier, avec un impact important sur les hospitalisations, y compris en réanimation. Les enfants de moins de 5 ans et les personnes de 65 ans et plus on été particulièrement touchés. Les niveaux d’activité à l’hôpital observés au pic de l’épidémie ont été très élevés, supérieurs à ceux observés au cours de la période 2010-2018. La mortalité attribuable à la grippe a été estimée à environ 7 700 décès au cours de l’épidémie. Ce chiffre est inférieur à la moyenne estimée à 10 000 décès par an sur la période 2010-2018, mais il reste important compte tenu de la courte durée de l’épidémie. La couverture vaccinale chez les personnes à risque a très légèrement progressé cette année, mais elle « demeure toujours insuffisante », note Santé publique France. L’efficacité du vaccin grippal « peut être qualifiée de modérée » cette saison. « La réduction du fardeau lié à la grippe chaque année repose sur l’amélioration de la couverture vaccinale, mais également sur le respect des mesures barrières, la limitation des contacts avec des sujets à risque en cas de syndrome grippal et l’utilisation des antiviraux pour les sujets à risque », rappelle l’institution publique.