Le Prado Maternité - L'Infirmière Libérale Magazine n° 353 du 01/12/2018 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 353 du 01/12/2018

 

Post-accouchement

CAHIER DE FORMATION

Point sur

Marie Fuks  

Conciliant la réduction des durées de séjour et le souhait des femmes de rentrer à la maison le plus tôt possible après l’accouchement, Prado Maternité, le service d’accompagnement de retour à domicile après accouchement, apporte une réponse sécurisée en facilitant l’accompagnement par des sages-femmes libérales.

En France, comme dans de nombreux pays européens, la durée de séjour en maternité à l’occasion d’un accouchement s’est significativement raccourcie au cours des dernières décennies. Alors que la plupart des femmes accouchant par voie basse étaient hospitalisées entre 5 et 9 jours dans les années 1980, la durée moyenne de séjour atteignait 4,3 jours en 2010(1). Or le nombre de femmes qui rencontrent des difficultés en post-partum est relativement important. Une étude de la Drees indique que 35 % des mères déploraient avoir été mal informées sur les troubles qu’elles pouvaient rencontrer dans le post-partum et avoir été mal préparées à la sortie. En l’absence de continuité des soins, cela peut entraîner une augmentation des complications maternelles et néonatales, mais aussi des conséquences négatives pour les femmes qui ne bénéficient pas d’un soutien approprié à la maison(2, 1). C’est dans ce contexte que l’Assurance maladie a mis en place et généralisé Prado Maternité pour accompagner, conseiller et sécuriser le retour à domicile.

Principe

Initié en 2010, Prado Maternité est destiné aux femmes de plus de 18 ans ayant accouché à terme sans complication d’un enfant unique ayant un poids en rapport avec l’âge gestationnel. Il leur permet de quitter la maternité sur avis favorable de l’équipe médicale après une durée de séjour standard : 72 à 96 heures après un accouchement par voie basse, 96 à 120 heures après une césarienne. Il s’appuie sur les recommandations de la Haute Autorité de santé mises à jour en mars 2014(3) et prévoit un accompagnement du couple mère-enfant à domicile par une sage-femme libérale. Ce dispositif est pris en charge à 100 %.

Déroulement

Lorsque la mère et l’enfant sont déclarés éligibles à Prado Maternité par l’équipe médicale et que la mère accepte cet accompagnement (505 000 femmes en ont bénéficié en 2017, ce qui représente près de deux naissances sur trois), un conseiller de l’Assurance maladie lui rend visite à la maternité. Il lui présente le service et organise un premier rendez-vous à domicile avec une sage-femme de son choix. Il peut également réaliser pour elle certaines démarches administratives (immatriculation du nouveau-né et rattachement à la carte Vitale des parents, par exemple). Une visite est également prévue dans le cadre du Prado Maternité. Elle doit avoir lieu au mieux dans les 48 heures qui suivent la sortie et au plus tard dans les sept jours. Une deuxième visite est laissée à l’appréciation de la sage-femme et planifiée en concertation avec la mère.

À l’issue de ces deux rencontres, si aucune anomalie, pathologie, difficulté n’est repérée par la sage-femme, le service prend fin. Dans le cas contraire, si les soins relèvent de son champ de compétence, la sage-femme poursuit les visites à domicile hors Prado Maternité, sinon elle transfère la prise en charge à un autre professionnel de ville ou à l’hôpital.

Rôle des sages-femmes

Dans le cadre de ses visites, la sage-femme réalise une évaluation clinique de l’état de santé de la mère et de l’enfant (lire l’encadré), une évaluation de la relation mère-enfant (interactions mère-enfant, instauration du lien d’attachement) et un suivi de l’allaitement et de ses éventuelles complications (crevasses, douleurs à la tétée, lait insuffisant, perte de poids supérieure à 7 % du poids de naissance…).

Elle accompagne également la mère dans les premiers soins et lui apporte une information personnalisée en réponse aux questions qu’elle se pose ou aux besoins identifiés dans le cadre de son évaluation (aide à l’arrêt du tabac, par exemple).

Évolution du dispositif

Expérimenté depuis 2015 dans une vingtaine de départements pour les sorties précoces (sorties dans les 72 heures après accouchement par voie basse ou dans les 96 heures en cas d’accouchement par césarienne), l’accompagnement Prado des sorties de maternité précoces va se généraliser à la suite de l’accord signé le 29 mai 2018 entre l’Assurance maladie et les syndicats de sages-femmes : l’Organisation nationale syndicale des sages-femmes (ONSSF) et l’Union nationale et syndicale des sages-femmes (UNSSF).

À noter : en cas de sortie précoce, deux visites sont systématiques. Une troisième est recommandée et planifiée à la libre appréciation de la sage-femme.

(1) B. Coulm, B. Blondel, “Durée de séjour en maternité après un accouchement par voie basse en France”, Journal de gynécologie obstétrique et biologie de la reproduction, vol. 42, n° 1, 76-85, 2013 (à lire via bit.ly/2xYIPpq).

(2) Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, “La santé des femmes en France”, 2009 (à lire via bit.ly/2NX91f1).

(3) Haute Autorité de santé, “Recommandation de bonne conduite, Sortie de maternité après accouchement : conditions et organisation du retourà domicile des mères et de leurs nouveau-nés” (à lire via bit.ly/2NUvv07).

L’auteur déclare ne pas avoir de lien d’intérêts.

Évaluation clinique réalisée par la sage-femme

→ Évaluation clinique maternelle

• État général.

• État obstétrical (cicatrisation du périnée ou de la césarienne).

• Recherche d’une infection du post-partum (infection urinaire, endométrite(1), mastite(2), notamment).

• Recherche de risques thromboemboliques et hémorragiques.

• État psychologique (baby blues, dépression du post-partum).

• 

• Si non réalisé durant le séjour en maternité : vaccination (coqueluche, rubéole, rougeole), injections d’immunoglobulines, information sur la contraception et prescription.

• Soutien à l’arrêt du tabac.

→ Évaluation clinique du nouveau-né

• État général, poids, tonus, éveil, contact.

• Surveillance :

- des signes de déshydratation, de vomissements, d’efficacité à la succion ;

- des signes d’ictère (coloration + ou − mesure de la bilirubine transcutanée ou sanguine) ;

- du risque infectieux (température corporelle, état du cordon, fréquence respiratoire, troubles hémodynamiques) ;

• du risque de cardiopathies (auscultation et perception des pouls fémoraux).

• Supplémentation en vitamine D et, en cas d’allaitement maternel, en vitamine K.-Dépistage néonatal : la sage-femme doit s’assurer que les dépistages prévus à l’arrêté du 22/01/2010 (phénylcétonurie, hyperplasie congénitale, des surrénales, hypothyroïdie, mucoviscidose, drépanocytose) ont été réalisés et, dans le cas contraire, les organiser en lienavec la maternité concernée.

(1) Infection bactérienne colonisant l’endomètre (muqueuse qui tapisse l’utérus).

(2) Inflammation de la glande mammaire aussi appelée « mammite » et très fréquente chez les femmes allaitantes.