Des financements de réseaux sur la sellette - L'Infirmière Libérale Magazine n° 343 du 01/01/2018 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 343 du 01/01/2018

 

POLITIQUE DE SANTÉ

Actualité

Laure Martin  

Plus de peur que de mal pour les réseaux de santé de la région Centre-Val de Loire. Leur évolution « contrainte » comme opérateur des plateformes territoriales d’appui (PTA) a, durant quelques mois, laissé planer un sérieux doute quant à la reconduction de leurs financements versés par l’Agence régionale de santé pour leurs missions « réseau ». Une problématique désormais réglée. Pour 2018…

Afin d’appliquer l’instruction de la Direction générale de l’offre de soins de septembre 2012 visant à améliorer la coordination des soins en faisant évoluer les réseaux, l’Agence régionale de santé (ARS) de la région Centre-Val de Loire a demandé à quatre réseaux du Loiret de fusionner en une seule et même association. Les réseaux Diabolo, LoirestDiab (diabète), OncoLoiret (cancer) et Hepsilo (hépatites/VIH) y travaillent. « Nous avons quatre conventions collectives et quatre bases de données patients, nous essayons donc de tout mettre à plat. Mais cette fusion est difficile à mettre en place, car nous avons besoin de compétences extérieures pour l’effectuer », rapporte Sylvie Venant, coordinatrice de l’association Diabolo.

Mise en place des PTA…

En parallèle, s’est greffée la mise en place des plateformes territoriales d’appui (PTA). « Nous avons eu une réunion en juin avec l’ARS, qui a présenté toutes les composantes de la PTA et ses implications d’un point de vue organisationnel, avec le numéro de téléphone unique, le système d’information et les données collectées, raconte Sylvie Venant. En septembre, nous avons appris que le numéro unique allait devoir être géré par les réseaux, et l’ARS nous a fait comprendre que c’était l’unique moyen de préserver nos budgets. »

Actuellement, les quatre réseaux bénéficient d’un financement du Fonds d’intervention régional (FIR) versé par l’ARS. Et trois d’entre eux disposent d’un fléchage « prestations dérogatoires » finançant les activités proposées aux patients et non remboursées par l’Assurance maladie dans le domaine de la prévention, de l’égalité d’accès aux soins, de l’accompagnement et de l’éducation thérapeutique. Pour Diabolo par exemple, ce fléchage permet de financer les activités physiques adaptées, la danse-thérapie ou encore les ateliers diététiques.

… et fusion des moyens

« Avec la mise en place des PTA, nous avons réalisé que les budgets des quatre réseaux deviendraient le budget « opérateur » pour la PTA, explique Sylvie Venant. Le 1er janvier 2018, nous allions donc perdre nos prestations dérogatoires, c’est-à-dire nos financements à destination des patients. Il y a clairement eu confusion de l’ARS entre le rôle des opérateurs PTA et celui des réseaux. »

« Nous étions prêts à évoluer en tant que composante de la PTA, poursuit le Dr Éric Drahi, médecin coordinateur de Diabolo, qui intervient également pour une mission* de dix-huit mois dans le cadre de l’accompagnement des réseaux de santé vers les PTA en région Centre. On nous a demandé d’être l’opérateur. Pourquoi pas, toutefois cela nécessite des financements. Or, comme nous en touchons en tant que composante, l’ARS a estimé que notre budget pouvait rester constant pour remplir le rôle d’opérateur. »

Une région déjàen difficulté

Pour les réseaux, l’arrêt de ces prestations sonnait l’abandon des patients dans une région où l’accès à un médecin traitant ou à un spécialiste est déjà difficile. L’Atlas de la démographie médicale 2017, édité par le Conseil national de l’Ordre des médecins, montre que la région Centre possède la densité médicale la moins importante de France métropolitaine avec 278,5 médecins pour 100 000 habitants, pour une moyenne nationale de 330,7.

Mobilisation des réseaux

Face à cette décision de l’ARS, qui s’applique à l’ensemble des réseaux de santé de la région, une pétition a été lancée à l’initiative d’un réseau de Blois, pour le maintien des prestations dérogatoires. Elle a rassemblé plus de 5 000 signatures. L’ARS a réagi, organisé une réunion avec les structures du territoire le 9 octobre et les a informées de l’organisation d’une enquête visant à comprendre l’usage fait des prestations dérogatoires. Le 27 novembre, au cours d’une nouvelle réunion, « l’ARS a restitué l’enquête et a finalement changé d’avis, nous informant que les prestations étaient reconduites pour 2018 dans un but d’apaisement des tensions en région et de réflexion sur l’avenir », souligne Sylvie Venant. Pour 2019, aucune certitude cependant. « Nous avons décidé d’être confiants, conclut-elle. Nous avons l’habitude de fonctionner avec des renouvellements annuels de financements dans le cadre de contrats d’objectifs et de moyens, même si ce n’est pas confortable pour se projeter. »

* Mission organisée par l’Union nationaldes réseaux de santé et l’Écoledes hautes études en santé publique.

Dr Florentin Clère, directeur de l’offre sanitaire à l’ARS Centre-Val de Loire

« Aboutir à un meilleur fléchage des financements »

« Les prestations dérogatoires ont un caractère expérimental et ont vocation à être utilisées s’il n’existe pas d’autres modes de financement. Après enquête, nous avons reconduit ces prestations dérogatoires en demandant aux réseaux de préciser, durant l’année 2018, leur répartition entre les actions pour l’éducation thérapeutique du patient, les soins de support en cancérologie et les actions de prévention et de promotion de la santé. Ils assurent par ailleurs la coordination des parcours, que nous finançons également. Nos objectifs sont d’éviter les doublons avec d’autres structures qui réaliseraient les mêmes actions sur le territoire, de travailler en complémentarité et d’aboutir à un meilleur fléchage des financements pour ces quatre actions, dès 2019. »

Qui prendra en charge les séniors dans dix ans ?

La prise en charge à domicile des personnes âgées en situation de perte d’autonomie est l’un des enjeux majeurs de la prochaine décennie. L’Observatoire régional de la santé (ORS) et l’Agence régionale de santé Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA) se sont récemment penchés sur ces besoins d’accompagnement. En 2028, 60 000 personnes de plus de 75 ans résideront dans des institutions spécialisées dans la région, mais près de dix fois plus resteront chez elles. En PACA, plus de 80 000 personnes âgées de 75 ans et plus seront, en 2028, en situation de perte d’autonomie sévère à domicile (+ 32 % par rapport à 2014), et ce nombre doublera si l’on y ajoute les séniors en perte d’autonomie modérée. Au vu de cette estimation, les aides, formelles et informelles, vont elles aussi devoir augmenter. L’ORS estime ainsi qu’il faudra, dans dix ans, 26 000 équivalents temps plein (ETP) d’aidants professionnels à domicile pour intervenir auprès des personnes en perte d’autonomie sévère (contre 19 000 aidants en 2014) et 68 000 ETP supplémentaires si l’on ajoute les personnes en perte d’autonomie modérée (49 000 en 2014). Le sud-est de la France est représentatif de la situation française, selon l’ORS. En Auvergne-Rhône-Alpes, des études similaires montrent qu’il faudra 12 000 ETP de plus, en 2020, pour prendre en charge la population croissante en perte d’autonomie (+ 25 % d’ici à 2030).

Sandrine Lana

Source : ORS PACA, « Projections de la perte d’autonomie et de sa prise en charge chez les personnes âgées des 75 ans et plus », 2017, disponible en ligne.

À propos de… communication

Mme C., âgée de 72 ans, est hospitalisée en début de semaine pour des examens à la suite d’un amaigrissement rapide, d’insomnies et d’une fièvre inexpliquée. On l’informe queles analyses sont terminées et qu’elle verra le médecin le lundi suivant. Le vendredi, la patiente demande donc à rentrer chez elle. Elle insiste pour regagner son domicile le week-end. Visiblement agacé par sa requête, un soignant qu’elle n’a encore jamais vu (médecin, infirmier… ?) lui répond : « Madame, lorsque l’on aune maladie grave comme la vôtre, on se soigne d’abord. » C’est ainsi que lui fut révélé son cancer. Un événement qui questionne une nouvelle fois la notion d’annonce d’une maladie grave. Il existe pourtant des dispositifs au cours desquels l’information est, en principe, transmise de façon progressive et où le médecin est censé, comme l’indique son code de déontologie, donner « une information claire, loyale et appropriée » au patient. Mais la façon de faire l’annonce peut être aussi délétère, voire davantage, que son contenu. Dommage !

Marie-Claude Daydé, infirmière libérale

du côté de l’hospitalisation à domicile

→ L’HAD méconnue…

D’après une étude ViaVoice pour la Fédération nationalede l’HAD, rendue publique en décembre, la majorité des Français sondés confond les notions d’hospitalisation à domicile, de soins à domicile et de maintien à domicile. Côté médecins, seuls 13 % des 300 généralistes interrogés estiment que leurs confrères connaissent bien l’HAD. Et 51 % déclarent n’avoir jamais reçu d’information sur cette prise en charge.

À lire sur notre site, le 7/12, rubrique Actualités.

…mais en plein essor…

De 2006 à 2016, l’activité réalisée en HAD est passée de 1,9 à 4,9 millions de journées, sa part dans l’hospitalisation complète de court et moyen séjour de 2 à 5 %, et le nombre de patients pouvant être hospitalisés simultanément à domicile de 6 900 à 16 300, selon une étude de la Drees parue début décembre.

Les soins liés aux pansements complexes (plaies cicatrisant mal, ulcères variqueux, escarres, etc.) deviennent le principal motif de prise en charge, devant les soins palliatifs.

…aux côtés des Ssiad

« Les services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) et les établissements d’HAD pourront travailler ensemble auprès des mêmes patients à partir de la campagne tarifaire 2018, a assuré la ministre de la Santé », rapporte l’APM. « Une mesure inutile, onéreuse, et un coup de poignard dans le dos des Idels », a réagi le Sniil. Le syndicat propose de sortir les coûts des soins d’Idels des forfaits de Ssiad (ses arguments ici : bit.ly/2nPLzUf).