La “justice privée” du CCAPL - L'Infirmière Libérale Magazine n° 339 du 01/09/2017 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 339 du 01/09/2017

 

CONCILIATION & ARBITRAGE

Actualité

Laure Martin  

En cas de litiges, les infirmières libérales et l’ensemble des professionnels libéraux disposent d’une nouvelle structure pour les aider : le Centre de conciliation et d’arbitrage des professions libérales (CCAPL), qui règle les différends par des moyens alternatifs à la justice publique.

Litiges entre associés d’une société de moyens au moment du départ de l’un d’eux, remise en cause de la validité d’une cession, concurrence déloyale : pour le règlement de ces conflits, les infirmières libérales peuvent désormais avoir recours au CCAPL. C’est sous l’égide de l’Union nationale des professions libérales (UNAPL) que le CCAPL a vu le jour en juin. Cette nouvelle structure « a vocation à aider au règlement des litiges des professionnels lorsque les parties ne parviennent pas à se concilier d’elles-mêmes », explique Jean-Pierre Viennois, professeur à la faculté de droit de Lyon, avocat et fondateur du CCAPL. Et d’ajouter : « L’arbitrage du CCAPL est une vraie justice, privée, qui rend des sentences obligatoires et susceptibles d’exécution forcée comme un jugement classique, sans appel ni annulation possible, sauf pour vice de forme ou non-conformité de la sentence à une règle d’ordre public. »

Par une clause, mais pas forcément

Les professionnels de santé peuvent avoir recours à la conciliation, puis, en cas de non-conciliation, à l’arbitrage à la place de la justice publique dans deux cas : lorsqu’est prévue, dans le contrat les liant ou dans les statuts de leur société, une clause le stipulant, ou lorsque les deux parties, qui ne sont pas en relation contractuelle ou qui le sont mais dont le contrat ne prévoit pas de clause, le décident. « Si le choix est porté sur l’arbitrage, les parties doivent s’y tenir », rapporte Jean-Pierre Viennois. Il n’est pas possible d’arrêter la procédure pour aller devant la justice publique.

Rapidité affichée

Tout d’abord, la rapidité, puisque « le règlement des litiges est envisageable en six mois alors qu’un jugement en première instance prend en moyenne un an et demi », indique Maître Viennois. De plus, les arbitres (juristes, avocats, professionnels libéraux) sont choisis en fonction de leurs compétences spécifiques. « Ils sont recrutés pour leurs connaissances de l’arbitrage, du milieu des professions libérales et du droit applicable au secteur concerné », précise-t-il. Deux systèmes sont proposés. Celui des tribunaux préconstitués à un ou à trois arbitres, en fonction de la complexité des litiges et de la demande des parties. Ou le tribunal constitué spécialement pour l’affaire, également à un ou trois arbitres.

Un jugement à moindre coût ?

« Nous avons fondé ce centre car nous estimons que le besoin est réel, explique Maître Viennois. Les conseillers ordinaux possèdent une formation en conciliation, mais pas en arbitrage, ni en droit. Or l’arbitrage requiert des compétences juridiques très solides. Souvent, la conciliation menée devant un conseiller ordinal n’aboutit pas, et les parties s’orientent vers le juge public, il n’y a pas de continuité de la prise en charge. » Autre bémol : les ordres sont des chambres monoprofessionnelles, non compatibles avec le développement de l’interprofessionnalité.

« Contrairement aux centres d’arbitrage existants, nous proposons un arbitrage à un tarif adapté aux entreprises libérales », renchérit Maître Viennois. À titre d’exemple, pour un arbitrage par un juge unique dans un tribunal préconstitué, les frais administratifs sont de 1 500 euros hors taxe si le montant de la demande des parties est inférieur à 100 000 euros, auxquels s’ajoute le tarif du juge, environ 6 500 euros HT. À noter qu’une procédure menée efficacement doit permettre de limiter les honoraires des avocats.

INFO +

• Adresse e-mail pour saisir le centre : saisine@ccapl.fr

• Adresse email pour avoir des informations : info@ccapl.fr

QUEL EST LE RECOURS DU CÔTÉ DE L’ORDRE ?

Les ordres professionnels sont compétents pour mener des conciliations entre deux professionnels ou entre un professionnel et un patient, afin de parvenir à un règlement du litige à l’amiable. « Si un conflit oppose les deux parties de telle sorte que la conciliation n’est pas envisageable, l’Ordre infirmier transcrit la plainte en chambre disciplinaire de première instance, rapporte Karim Mameri, secrétaire général de l’ONI, soulignant que le recours à l’Ordre est gratuit. La chambre disciplinaire, qui fait partie de la juridiction de l’ordre administratif, est constituée de conseillers ordinaux et d’un magistrat de tribunal administratif ou de cour administrative d’appel, qui préside la chambre. » Il est possible de faire appel de la décision, la chambre disciplinaire nationale de l’Ordre prend alors le relais, l’étape suivante étant le pourvoi en cassation. La chambre disciplinaire ne peut pas condamner à des dommages et intérêts en cas de litige financier. Dans ce cas, il convient de se tourner vers les juridictions judiciaires.