Le traitement de l’hypothyroïdie | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 337 du 01/06/2017

 

Cahier de formation

Savoir

L’hypothyroïdie est le plus souvent due à une atteinte primitive de la glande thyroïde. L’hypothyroïdie est alors dite “primaire” et peut avoir différentes causes parmi lesquelles l’hypothyroïdie auto-immune est la forme la plus fréquente. Le bilan biologique montre un taux de TSH supérieur à 8 à 10 mUI/L qui suffit en général à poser le diagnostic.

LA THYROÏDE

La thyroïde est une glande endocrine de petite taille pesant environ 20 à 30 g qui sécrète des hormones directement déversées dans le sang. Son volume est variable en fonction des personnes et de la charge en iode dépendant de son activité. Elle est constituée de deux lobes réunis par un isthme et ressemble à un papillon ou à un “H” (voir l’illustration ci-dessous). Située à la base du cou, sur la face avant, sa position superficielle en fait un organe facilement accessible à l’inspection et à la palpation.

Le tissu thyroïdien

Les follicules thyroïdiens

Aussi appelés vésicules thyroïdiennes, ce sont les unités fonctionnelles de la glande (voir le schéma en haut de la page ci-contre). C’est le lieu de synthèse et de stockage des hormones thyroïdiennes. En forme de sphères creuses, ils sont constitués de deux éléments :

→ une paroi comportant une seule assise de cellules sécrétrices ;

→ une cavité centrale contenant le colloïde, surtout composé d’une glycoprotéine, la thyroglobuline.

Des cellules sécrétrices

Les cellules thyroïdiennes constituent la paroi de la vésicule et comportent :

→ essentiellement pour 99 % les thyrocytes ou cellules folliculaires ou vésiculaires, sécrétant les hormones iodées thyroïdiennes ;

→ les cellules C ou parafolliculaires sécrétant la calcitonine, indépendamment de la régulation de la thyroïde par la thyréostimuline (TSH pour Thyroid-stimulating hormone).

Les hormones thyroïdiennes

Des hormones iodées

L’iode est le “carburant” de la thyroïde. Il est essentiel à la biosynthèse des hormones thyroïdiennes qui sont composées d’iode et de tyrosine, un acide aminé. « La thyroïde est presque le seul organe qui capte l’iode et l’utilise pour la formation des hormones thyroïdiennes », résume le Pr Jean-Louis Wémeau, endocrinologue à Bondues (Nord). L’iode est un oligo-élément présent en très faible quantité dans le corps. Il doit être apporté à l’organisme par l’alimentation (sel de cuisine, poissons, fruits de mer, etc.) pour un fonctionnement correct de la thyroïde.

Deux types d’hormones

Les hormones thyroïdiennes T3 et T4 sont présentes dans la circulation sanguine sous forme libre ou liées à des protéines de transport.

Les hormones liées à des protéines

La tri-iodothyronine (T3 ou hormone T3) comporte trois atomes d’iode et la tétra-iodothyronine (T4 ou hormone T4), également appelée thyroxine, en comporte quatre. Les hormones T3 et T4 sont stockées au centre du follicule ou relâchées dans le sang à la demande de l’organisme. La T3 est la forme biologiquement active. Seulement 20 % de la T3 est sécrétée par la thyroïde, la plus grande part provenant de la perte d’un atome d’iode de la T4 (désiodation) au niveau des tissus périphériques.

Les hormones libres

Seule la fraction libre des hormones est biologiquement active. La T4 libre (T4L ou FT4) représente 0,02 % de la T4, la T3L (ou FT3) 0,3 % de la T3. Les dosages des formes libres sont préférés. Les taux d’hormones totales peuvent varier en cas de grossesse, prise d’œstrogènes ou certains opiacés. Les T3 et T3 libres présentent un intérêt limité dans l’évaluation de la sécrétion thyroïdienne.

La sécrétion d’hormones thyroïdiennes

Des stimulations en chaîne

L’hypophyse sécrète la TSH qui stimule la synthèse des hormones thyroïdiennes. La production de TSH est elle-même stimulée par la thyrolibérine (TRH pour Thyrotropin-releasing hormone), hormone sécrétée par l’hypothalamus (voir le schéma en haut de la page suivante).

La régulation

Le taux sanguin des hormones T3 et T4 exerce un rétrocontrôle au niveau de l’hypophyse et de l’hypothalamus qui permet le maintien de la sécrétion des hormones thyroïdiennes dans des limites étroites. Ainsi :

→ un taux élevé de T3 et T4 inhibe la sécrétion de TRH et TSH, freinant ainsi la production de nouvelles hormones T3 et T4 ;

→ une diminution du taux sanguin de T3 et T4 stimule la sécrétion de TSH et la production de nouvelles hormones.

L’action des hormones thyroïdiennes

Les hormones thyroïdiennes T3 et T4 agissent sur la croissance et le métabolisme de toutes les cellules du corps à tous les âges de la vie. Leur action sur l’organisme explique les symptômes associés à un dysfonctionnement de la thyroïde.

L’action sur le métabolisme

→ Augmentation de la production de chaleur (thermogenèse) par élévation de la consommation d’oxygène des tissus. Les hormones thyroïdiennes jouent un rôle important dans la thermorégulation corporelle. Une hyperactivité de la thyroïde (hyperthyroïdie) entraîne une sensation de chaleur alors qu’un déficit d’activité (hypothyroïdie) donne au patient la sensation d’avoir froid, même à température habituelle.

→ Action hyperglycémiante par augmentation de la libération de glucose. Une concentration élevée d’hormone thyroïdienne entraîne une légère hyperglycémie.

→ Stimulation de la synthèse ou du catabolisme (dégradation) des protéines. Une hyperactivité de la thyroïde libérant des doses élevées d’hormones entraîne une fonte musculaire.

→ Élimination du cholestérol augmentée par les hormones thyroïdiennes. Une hypocholestérolémie est un signe d’hyperactivité de la thyroïde.

L’action sur les os

Les hormones thyroïdiennes augmentent à la fois la synthèse et la destruction de l’os et participent à la maturation osseuse. Un déficit d’hormones thyroïdiennes chez un enfant entraîne un retard de croissance. Chez l’adulte, l’excès d’hormones thyroïdiennes est responsable d’une diminution de la densité osseuse.

L’action cardiovasculaire

Les hormones thyroïdiennes accélèrent la fréquence cardiaque et augmentent la contractilité cardiaque. Une hyperthyroïdie entraîne une augmentation du débit et de la fréquence cardiaque, une hypothyroïdie abaisse ces paramètres.

L’action sur le système nerveux

Les hormones thyroïdiennes entraînent une excitation de l’état de vigilance, une accélération des réflexes ostéotendineux, et elles agissent sur la motilité intestinale avec un transit accéléré.

Les autres actions

Les hormones thyroïdiennes agissent également sur la peau, les cheveux et les ongles.

L’HYPOTHYROÏDIE

Épidémiologie

L’hypothyroïdie est le trouble le plus fréquent de la glande thyroïde, entre 3 et 10 % environ des Français en souffrent. Sa fréquence augmente avec l’âge, particulièrement après 65 ans. Elle est trois fois plus répandue chez les femmes que chez les hommes, et 10 % des femmes âgées de plus de 60?ans seraient touchées.

Physiopathologie

Une hypothyroïdie correspond à une sécrétion insuffisante d’hormones thyroïdiennes. Ce déficit est dû le plus souvent à une atteinte primitive de la glande thyroïde qui cause une hypothyroïdie primaire, aussi appelée “insuffisance thyroïdienne primitive” ou “hypothyroïdie périphérique”. Plus rarement, ce déficit hormonal est causé par une atteinte hypophysaire ou hypothalamique entraînant un défaut de sécrétion ou d’activité de la TSH : c’est l’hypothyroïdie secondaire, dite aussi “insuffisance thyréotrope” ou “hypothyroïdie centrale”.

Les hypothyroïdies primaires

L’hypothyroïdie primaire est la plus fréquente avec une prévalence plus importante chez les femmes. Par la généralisation du dosage de la TSH, le mode actuel de découverte le plus fréquent est le bilan systématique ou le bilan pour asthénie.

Les hypothyroïdies d’origine auto-immune

L’hypothyroïdie auto-immune est la forme la plus fréquente d’hypothyroïdie spontanée. Elle est due à des anticorps du système qui entraînent des inflammations de la glande thyroïde (thyroïdites). L’hypothyroïdie auto-immune peut être isolée ou associée à d’autres atteintes auto-immunes (diabète de type 1, insuffisance surrénale…).

La thyroïdite lymphocytaire chronique

Elle touche principalement les femmes après la ménopause mais concerne aussi les hommes ou les enfants. Elle provoque une atrophie de la thyroïde détectable à la palpation. L’hypothyroïdie est définitive.

La thyroïdite de Hashimoto

Elle provoque une augmentation de la taille de la thyroïde se manifestant par un gonflement à l’avant du cou, appelé goitre. Dans ce cas, le goitre est ferme et indolore. La thyroïdite de Hashimoto atteint surtout les femmes dans neuf cas sur dix. Elle existe chez l’enfant à partir de 10 ans sous forme de “thyroïdite lymphocytaire chronique de l’enfant et de l’adolescent”.

La thyroïdite atrophique

Elle touche principalement la femme après 50 ans, mais peut concerner les hommes et les enfants. C’est la première cause d’hypothyroïdie acquise de l’adulte. La progression vers l’hypothyroïdie est lente. Le traitement hormonal substitutif est maintenu à vie.

L’hypothyroïdie fruste

→ Appelée aussi “thyroïdite auto-immune asymptomatique” ou encore “hypothyroïdie modérée” ou “subclinique” car les signes cliniques sont isolés, discrets et peu spécifiques (asthénie, crampes musculaires, prise de poids…), elle représente la majorité des hypothyroïdies. En France, elle concerne 10 à 20 % de femmes adultes et 3 à 5 % d’hommes qui sont porteurs d’un taux accru d’anticorps antithyroïdiens mais qui ne présentent ni goitre ni trouble hormonal(1). Le bilan biologique montre une TSH normale. La situation se normalise pour un tiers des cas et se stabilise pour un autre tiers(2). Elle nécessite une surveillance car elle évolue dans un tiers des cas vers une hypothyroïdie avérée.

→ Le traitement par lévothyroxine vise à prévenir la conversion en hypothyroïdie avérée et devrait être limité aux sujets à risque (personnes âgées de plus de 60 ans avec antécédents thyroïdiens, par exemple) avec un taux de TSH supérieur à 10 mUI/L selon les recommandations de la Société française d’endocrinologie et de la Haute Autorité de santé(3). Le bénéfice du traitement n’est pas démontré en deçà de cette valeur.

L’hypothyroïdie par anticorps bloquants

Les anticorps antirécepteurs de la TSH (ARTSH) ont généralement une action stimulante comme dans la maladie de Basedow (hyperthyroïdie). Ils ont parfois une action bloquante entraînant une hypothyroïdie. Cette forme d’hypothyroïdie peut se manifester après une maladie de Basedow ou, dans d’autres cas, avant une évolution vers une maladie de Basedow.

La thyroïdite du post-partum

Elle concerne 5 à 10 % des femmes après un accouchement. Elle peut se manifester après une hyperthyroïdie transitoire vers le deuxième mois après l’accouchement ou par une hypothyroïdie seule entre le troisième et le sixième mois du post-partum. Dans la plupart des cas, on observe un retour à l’euthyroïdie, avec des récidives fréquentes lors de nouvelles grossesses. Traitement symptomatique la plupart du temps. Pour 10 à 20 % des cas, l’évolution vers une hypothyroïdie définitive est possible avec atrophie de la thyroïde.

La thyroïdite subaiguë de De Quervain

L’inflammation de la thyroïde est consécutive à une infection virale rhinopharyngée. Elle apparaît brutalement, accompagnée de douleurs à l’avant du cou, souvent d’un syndrome grippal et d’une hyperthyroïdie transitoire. La phase d’hypothyroïdie dure quelques semaines ou mois, suivie d’un retour à l’euthyroïdie. Traitement symptomatique (anti-inflammatoires non stéroïdiens, prednisone si thyroïdite sévère). L’évolution vers une hypothyroïdie définitive concerne moins de 5 % des cas.

Les hypothyroïdies iatrogènes

Après un traitement de la thyroïde

→ La thyroïdectomie : une hypothyroïdie est systématique en cas d’ablation totale de la thyroïde. En cas d’ablation partielle, l’activité de la thyroïde dépend du tissu thyroïdien conservé et de son bon fonctionnement. Dans ce cas, une surveillance est nécessaire compte tenu du risque d’hypothyroïdie apparaissant plusieurs mois après la chirurgie.

→ L’iode radioactif : le traitement de l’hyperthyroïdie par l’iode radioactif peut entraîner une hypothyroïdie transitoire lorsqu’elle survient quelques semaines après le traitement, définitive lorsqu’elle apparaît plusieurs mois après. Une surveillance de la TSH est donc préconisée.

→ Les antithyroïdiens de synthèse : utilisés dans le traitement de l’hyperthyroïdie, ils peuvent provoquer une hypothyroïdie qui impose une surveillance régulière et une adaptation du traitement.

Les autres origines iatrogènes

→ Surcharge iodée : c’est une cause fréquente d’hypothyroïdie. Elle est surtout le fait d’une administration prolongée par l’amiodarone (Cordarone et génériques), molécule iodée utilisée dans le traitement de l’insuffisance cardiaque. Plus rarement, elle peut être induite par des produits de contraste radiologiques, des antiseptiques locaux, des produits diététiques à base de produits de la mer. L’hypothyroïdie est dans la plupart des cas transitoire, résolue par l’arrêt des apports iodés.

→ Traitement par lithium : le lithium utilisé dans le traitement des troubles bipolaires diminue la sécrétion d’hormones thyroïdiennes. L’hypothyroïdie touche environ 10 % des patients. Elle est ordinairement réversible avec l’arrêt du traitement lorsqu’il est possible. En cas contraire, elle est traitée par des hormones thyroïdiennes de synthèse (Lévothyrox…).

→ Autres traitements en cause : l’interféron alpha, utilisé dans le traitement des hépatites B et C, certaines hémopathies ou tumeurs solides, et l’interféron bêta dans le traitement de la sclérose en plaques, peuvent provoquer une hypothyroïdie. C’est aussi le cas de thérapeutiques anticancéreuses. Toutes ces médications impliquent une surveillance des taux de TSH.

Les hypothyroïdies congénitales

Avec une incidence d’environ 1 cas sur 3 500 naissances(4), l’hypothyroïdie congénitale est caractérisée par un défaut de fonctionnement de la glande thyroïde. La production insuffisante d’hormones thyroïdiennes conduit, en l’absence de traitement, à de graves séquelles neuro-développementales.

L’athyréose

Il s’agit d’une absence congénitale de la glande thyroïde. Cette affection rare n’entrave pas la croissance intra-utérine, durant laquelle le fœtus bénéficie des hormones thyroïdiennes de sa mère. Le nouveau-né est normal mais l’hypothyroïdie doit être traitée rapidement après la naissance.

Les anomalies anatomiques

On observe une malformation (dysgénésie) ou une localisation anormale (ectopie) de la glande thyroïde. La dysgénésie thyroïdienne est la principale cause d’hypothyroïdie congénitale permanente.

Les anomalies de l’hormonogenèse

Plus rares que les anomalies anatomiques, les anomalies de l’hormonogenèse peuvent affecter différents niveaux de l’élaboration des hormones thyroïdiennes.

Les hypothyroïdies transitoires

Les hypothyroïdies peuvent être induites par une application cutanée de désinfectant iodé chez la mère pendant la grossesse ou l’accouchement, ou chez le nouveau-né. C’est également le cas, exceptionnellement, en présence d’anticorps ARTSH maternels bloquants, par passage transplacentaire. Enfin, une hypothyroïdie transitoire est environ quinze fois plus fréquente lorsque la prématurité est inférieure à 32 semaines d’aménorrhée.

La carence iodée

La carence iodée est la première cause environnementale d’hypothyroïdies. Elle est toujours responsable de goitres dans certains pays en développement. En France, la supplémentation du sel de table en iode a permis d’éradiquer ces carences.

Les hypothyroïdies secondaires

Beaucoup plus rares, elles représentent moins de 5 % des hypothyroïdies.

Physiopathologie

Les physiopathologies sont dues à une insuffisance hypophysaire de la sécrétion de TSH ou une insuffisance hypothalamique de la sécrétion de TRH. Les signes d’hypothyroïdie sont présents mais il n’y a pas de myxœdème (lire page suivante), ni de goitre. Le diagnostic étiologique est fait par l’IRM.

Étiologie

Les hypothyroïdies secondaires peuvent avoir une origine auto-immune, infectieuse, génétique. Elles peuvent aussi être causées par une tumeur de la région hypothalamo-hypophysaire, une radiothérapie cérébrale, une chirurgie, un traumatisme crânien, une hémorragie méningée, entre autres étiologies…

LES SYMPTÔMES DE L’HYPOTHYROÏDIE

Dans la forme classique

Le syndrome d’hypométabolisme

Les symptômes liés au ralentissement du métabolisme dépendent de l’importance du déficit hormonal et se manifestent généralement de façon progressive.

→ Asthénie physique et psycho-intellectuelle avec ralentissement moteur et idéatoire, somnolence.

→ Hypothermie, surtout cutanée, avec frilosité.

→ Ralentissement du transit, constipation.

→ Bradycardie due à une action directe sur les cellules myocardiques et à une vasoconstriction qui diminue le débit cardiaque.

→ Pression artérielle variable, augmentée par l’élévation des résistances périphériques, ou diminuée par ralentissement du débit cardiaque.

→ Prise de poids modérée malgré une réduction de l’appétit, voire anorexie et diminution de la sensation de soif.

Le myxœdème

Le myxœdème est une infiltration de la peau, des tissus sous-cutanés et des muqueuses par une substance gélatineuse (semblable au mucus : sécrétions broncho-pulmonaires, vaginales ou gastriques). Le terme “myxœdème” désigne souvent l’hypothyroïdie elle-même. Il est à l’origine de symptômes caractéristiques de l’hypothyroïdie :

→ peau pâle ou jaune orangé, sèche, avec diminution de la transpiration ;

→ gonflement de la face et des membres : la face dorsale des mains et des pieds ont un aspect épaissi, les doigts sont boudinés. Les paupières sont bouffies, surtout le matin au réveil ;

→ voix rauque et grave, hypoacousie, macroglossie (augmentation du volume de la langue) et ronflements sont dus à l’atteinte des muqueuses. Les lèvres sont cyanosées.

→ cheveux secs et cassants qui tombent facilement. Une dépilation axillaire, pubienne et de la queue des sourcils est constatée. Les ongles sont striés et fragiles.

Un syndrome neuromusculaire

Souvent précoce, il se manifeste par un syndrome du canal carpien, des crampes musculaires et myalgies, et un enraidissement musculaire. La diminution du volume musculaire (amyotrophie) est masquée par le myxœdème (gonflement).

Dans les formes atypiques

L’hypothyroïdie fruste

Les signes cliniques sont peu nombreux lorsqu’ils sont présents. Asthénie à l’effort, signes cutanés (chute de cheveux, sécheresse des téguments), prise de poids inexpliquée, frilosité ou crampes musculaires sont possibles de façon isolée.

Les formes trompeuses

Des signes cardiovasculaires, musculaires, digestifs, ou autres, prédominent dans certaines formes d’hypothyroïdie. Une symptomatologie qui peut faire évoquer d’autres pathologies.

Dans les formes compliquées

L’atteinte cardiovasculaire

L’hypothyroïdie chronique sévère favorise le développement précoce d’un athérome, la cardiomégalie et l’insuffisance cardiaque, surtout en cas de cardiopathie sous-jacente. L’hypothyroïdie entraînant une diminution de la consommation en oxygène du myocarde, les signes d’insuffisance coronarienne due à l’athérome surviennent le plus souvent à l’instauration du traitement hormonal substitutif. C’est pourquoi le traitement doit être instauré avec prudence chez des personnes âgées ou fragiles. Et après stabilisation d’une éventuelle cardiopathie sous-jacente.

Les symptômes neuropsychiatriques

Les complications neuropsychiatriques de l’hypothyroïdie se révèlent sous la forme d’un état dépressif, de troubles de l’humeur, voire de manifestations psychotiques avec délire. Chez le sujet âgé, un syndrome confusionnel ne doit pas être confondu avec une démence.

Les symptômes rhumatologiques

L’hypothyroïdie peut provoquer des tendinites, des arthralgies, des crises goutteuses.

Le retentissement endocrinien

Chez la femme, troubles de la libido, troubles des règles, ménorragies, infertilité ou avortements précoces sont observés. Chez l’homme, les effets se traduisent par des troubles de la libido, une impuissance ou une altération de la spermatogenèse.

Le coma myxœdémateux

Cette complication, devenue rare aujourd’hui, peut encore révéler une hypothyroïdie profonde négligée. Le coma myxœdémateux touche surtout les femmes de plus de 50 ans et les personnes âgées ayant interrompu leur traitement. Les facteurs favorisants sont l’exposition au froid, avec 95 % des cas en hiver, une infection, un stress médical ou chirurgical, et certains médicaments (barbituriques, sédatifs, opiacés, diurétiques…). C’est un coma calme, de profondeur variable, avec parfois des crises convulsives. Une défaillance cardiaque ou respiratoire peut causer le décès. La mortalité est proche de 20 %.

LE DIAGNOSTIC DE L’HYPOTHYROÏDIE

L’examen clinique

Il recherche la présence de signes généraux de l’hypothyroïdie et la palpation de la thyroïde permet de détecter un goitre ou à l’inverse une thyroïde atrophique ou une loge thyroïdienne vide. L’interrogatoire permet de repérer des causes évidentes d’une hypothyroïdie, en particulier des origines iatrogènes.

Le bilan biologique

→ Un taux de TSH supérieur à 8 à 10 mUI/L (normal de 0,4 à 4 mUI/L) suffit en général à poser le diagnostic. Une TSH légèrement augmentée doit être contrôlée dans les deux à trois mois. Le taux de TSH plasmatique, hormone hypophysaire qui régule la sécrétion des hormones thyroïdiennes, est étroitement corrélé au taux de T4 libre. On considère que T4 libre et TSH représentent le même paramètre. La TSH, très sensible, sert de référence pour le diagnostic du fonctionnement thyroïdien. « Les taux de TSH sont de plus en plus à interpréter en fonction de l’augmentation physiologique des taux de TSH avec l’âge et l’indice de masse corporelle. Une TSH à 7 chez un patient de plus de 70 ans ou chez un patient obèse ne signe pas nécessairement une hypothyroïdie », remarque le Pr Jean-Louis Wémeau.

→ L’évaluation de la T4 libre n’est indispensable que pour la recherche d’une l’hypothyroïdie secondaire.

→ La recherche d’anticorps anti-TPO (anti-thyroperoxydase) permet de diagnostiquer une auto-immunité spécifique. Les anti-TPO font partie des anticorps antithyroïdiens. Ils s’attaquent à une enzyme indispensable à la synthèse des hormones thyroïdiennes, la peroxydase thyroïdienne. Les anti-TPO, dosés à partir d’une prise de sang, sont les marqueurs les plus significatifs d’une auto-immunité thyroïdienne, par exemple en cas de thyroïdite de Hashimoto.

L’imagerie

→ Plusieurs examens d’imagerie sont possibles : la scintigraphie qui peut se réaliser selon plusieurs modalités, l’échographie, la tomodensitométrie X et l’imagerie par résonance magnétique nucléaire.

→ Dans le cas d’une hypothyroïdie, les examens d’imagerie sont facultatifs et ne sont préconisés qu’après sa mise en évidence par les bilans biologiques.

→ En revanche, en cas de thyroïde anormale à la palpation ou de palpation difficile, les examens d’imagerie, à commencer par l’échographie, sont prescrits en première intention.

La cytologie

La ponction (ou cytoponction) à l’aiguille fine est un examen de première intention dans l’exploration des nodules thyroïdiens dont il permet d’identifier des modifications structurales.

L’échographie

Elle n’a d’intérêt que dans le cas d’une thyroïde anormale à la palpation ou de palpation difficile.

LE TRAITEMENT DE L’HYPOTHYROÏDIE

Le traitement substitutif

L’hypothyroïdie est une maladie chronique dont on ne guérit pas. Le traitement consiste à apporter des hormones thyroïdiennes de synthèse pour pallier le déficit en hormones physiologiques afin de rétablir un métabolisme normal. Une surveillance régulière permet d’adapter les apports aux besoins de l’organisme et de dépister un éventuel surdosage ou sous-dosage du traitement substitutif.

Le traitement du goitre

Le traitement par hormones thyroïdiennes de synthèse peut dans certains cas faire diminuer le goitre. La chirurgie est indiquée en présence d’un goitre volumineux, compressif ou gênant non soulagé par le traitement hormonal.

(1) Pr Jean-Louis Wémeau, La thyroïde : modèle ou victime ?, Presse médicale Éditorial, 2011.

(2) Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), “État des lieux de l’utilisation de la lévothyroxine en France”, octobre 2013 (à consulter via le lien raccourci bit.ly/2qJTZxa).

(3) Société française d’endocrinologie, Haute Autorité de santé, “Hypothyroïdies frustes chez l’adulte : diagnostic et prise en charge”, avril 2007 (à consulter via bit.ly/2pPCyXY).

(4) “Dépistages au cours de la grossesse et à la naissance : données épidémiologiques récentes”, Bulletin épidémiologique hebdomadaire, mai 2015 (à consulter via bit.ly/2rlJFsf).

Question de patient

Pourquoi parle-t-on d’hypométabolisme dans l’hypothyroïdie ?

Les hormones thyroïdiennes contrôlent en partie le métabolisme de base qui correspond à la consommation d’énergie que l’organisme utilise pour les fonctions vitales comme la circulation sanguine, l’activité cérébrale ou le maintien de la température du corps. Un déficit en hormones thyroïdiennes implique un ralentissement de ce métabolisme basal. Ce qui se traduit par les symptômes de l’hypothyroïdie comme une variation de la pression artérielle, une asthénie ou la sensation d’avoir froid.

Question de patient

Les symptômes esthétiques de l’hypothyroïdie sont-ils irréversibles ?

Non, ils sont corrigés une fois l’équilibre hormonal atteint par le traitement de substitution hormonal.

Pas de dépistage systématique

Le dépistage systématique de l’hypothyroïdie dans la population générale n’est pas recommandé. Y compris pour les femmes âgées de plus de 65 ans, chez qui la prévalence de l’hypothyroïdie frustes est élevée. Le dépistage est réservé aux personnes à risque de développer une hypothyroïdie avérée : antécédent personnel ou familial de pathologie auto-immune, antécédent de thyroïdite subaiguë, en présence d’un goitre ou d’une trisomie 21.

Source : Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) “État des lieux de l’utilisation de la lévothyroxine en France”, octobre 2013 (à consulter via le lien raccourci bit.ly/2qJTZxa).