Nutri-Score l’emporte - L'Infirmière Libérale Magazine n° 335 du 01/04/2017 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 335 du 01/04/2017

 

LOGO NUTRITIONNEL

Actualité

Laure Martin  

Les jeux sont faits. La ministre de la Santé, Marisol Touraine, s’est félicitée des résultats de l’expérimentation sur l’impact d’un logo nutritionnel sur le choix des consommateurs. Résultat de la compétition : Nutri-Score sort gagnant.

AFIN D’AMÉLIORER LA COMPOSITION DU PANIER ALIMENTAIRE DES FRANÇAIS – notamment celui des ménages défavorisés – par une information nutritionnelle simple à analyser et d’apporter une réponse à l’augmentation du nombre de Français en surpoids et diabétiques, le ministère souhaite qu’un logo nutritionnel soit affiché sur les aliments. Quatre systèmes d’étiquetage nutritionnel simplifié ont donc été comparés au cours d’une expérimentation menée en fin d’année 2016 pendant dix semaines dans soixante supermarchés, en condition réelle d’achat. La ministre a reçu le 14 mars les résultats de l’étude comparative, évaluée par un comité scientifique indépendant (dont l’indépendance avait toutefois été mise en doute, cf. notre numéro de septembre 2016).

Efficacité de l’étiquetage

Cette étude démontre l’intérêt de ces logos pour améliorer la qualité nutritionnelle du panier d’achat des consommateurs, ainsi que l’efficacité du logo Nutri-Score ou “5C”. D’après le comité scientifique, l’étude a fait apparaître une « supériorité d’ensemble assez nette pour Nutri-Score, qui est encore plus marquée lorsqu’est observé plus spécifiquement le comportement des consommateurs qui achètent les produits les moins chers ». Une seconde étude menée du 21 novembre au 12 décembre 2016 pour mesurer l’impact de plusieurs systèmes d’étiquetage nutritionnels à travers une méthode expérimentale en laboratoire a également confirmé l’efficacité du système Nutri-Score. Pourtant, l’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) avait pour sa part épinglé sévèrement, dans un avis rendu public le 31 janvier, ce projet d’étiquetage nutritionnel simplifié, considérant que les Systèmes d’information nutritionnelle (SIN) « ne paraissent pas adaptés aux enjeux de santé publique que constituent surpoids et obésité, désordres métaboliques, maladies cardiovasculaires et certains cancers ».

Application facultative

C’est la loi de modernisation de notre système de santé (article 14) qui a inscrit dans le droit la possibilité de recommander un système d’étiquetage nutritionnel pour faciliter le choix d’achat du consommateur, au regard de la composition nutritionnelle des produits. La ministre a donc annoncé qu’elle prendrait un arrêté début avril, en s’appuyant sur le rapport du comité scientifique indépendant, pour définir le système d’étiquetage nutritionnel que les entreprises de l’agroalimentaire et les distributeurs pourront mettre en œuvre. Pourront, car, au regard de la réglementation européenne (règlement Inco n° 1169/2011), son application est facultative et repose sur le volontariat des industriels. Pour l’Organisation non gouvernementale Foodwatch, c’est bien là tout le problème. « Nous militons depuis des années pour que les fabricants soient dans l’obligation d’apposer un logo clair et comparable, à l’avant de leurs produits, permettant une information transparente du consommateur », soutient Ingrid Kragl, directrice de l’information chez Foodwatch. Et d’ajouter : « Cela a failli être voté au niveau européen il y a quelques années mais les lobbies de l’industrie agroalimentaire ont tout fait pour bloquer cette mesure. » L’ONG milite pour rendre obligatoire l’étiquetage car « nous sommes dans une situation où les fabricants peuvent faire ce qu’ils veulent, précise Ingrid Kragl. Il n’est pas acceptable de s’en remettre à la seule pression des consommateurs pour contraindre les industriels comme le fait la ministre. Il faut que les États membres s’emparent du sujet et le mettent à l’agenda européen car, si la base est volontaire, qu’il n’y a pas de suivi, de contrôle, d’obligation, ni de sanction, les fabricants continueront à duper les consommateurs sur la réelle qualité nutritionnelle des aliments ».

Logos personnalisés

Le Collectif interassociatif pour la santé (CISS), une association de patients, s’est félicité des résultats de l’étude, et appelle également l’ensemble des acteurs à contribuer à la généralisation du logo et à son application par tous. Or certains industriels ont déjà annoncé qu’ils allaient choisir leur logo en dehors de toute recherche de consensus. C’est le cas de Coca-Cola, Pepsi, Nestlé, Unilever, Mondelez, Mars, qui souhaitent lancer leur logo au niveau européen pour éviter la multiplication des systèmes d’information nationaux. Une décision incompréhensible pour le CISS qui rappelle que « ce dont les consommateurs ont besoin, c’est d’un logo unique pour comparer les aliments entre eux au moment où ils les achètent dans leur magasin, et non pas d’un logo qui permette de comparer les produits d’un pays à l’autre en Europe ».