Les négociations conventionnelles - L'Infirmière Libérale Magazine n° 335 du 01/04/2017 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 335 du 01/04/2017

 

POLITIQUE DE SANTÉ

Votre cabinet

Audrey Uzel  

Après les médecins, les dentistes et les pharmaciens, c’est au tour des Idels d’être invitées à renégocier leur convention avec l’Union nationale des caisses d’Assurance maladie (Uncam). L’occasion d’examiner le mécanisme des négociations conventionnelles et d’en rappeler les objectifs.

Annoncées pour la fin de l’année 2016, puis pour début 2017, les négociations ne commenceraient finalement pas avant le mois de mai, pour se terminer dans le meilleur des cas en octobre. Les incidences d’une nouvelle convention devraient donc se faire sentir au cours de l’année 2018.

Quels en sont les fondements ?

Les négociations conventionnelles concernant les infirmiers sont encadrées par les articles L. 162-12-2 et suivants et L. 162-14-1 et suivants du Code de la Sécurité sociale.

En quoi consiste une convention ?

La convention est un “contrat” passé entre le professionnel et l’Uncam. Il s’agit d’un contrat administratif qui peut faire l’objet d’un recours devant les juridictions de l’ordre administratif. L’Uncam est composée de l’ensemble des organismes de Sécurité sociale (Cnamts, MSA, RSI). La convention vise donc à définir et régler les rapports entre les organismes d’Assurance maladie et les infirmiers libéraux. Très généralement, pour les professionnels, la convention n’a pour but que de codifier les actes que le professionnel réalise et définir la rémunération de ces actes, le patient étant remboursé sur la base de ces tarifs. En réalité, l’objet de la convention est beaucoup plus large. En effet, elle comporte un volet tarifaire et un volet régulation. Le volet tarifaire fixe les honoraires conventionnels opposables à l’une et à l’autre partie, mais aussi les conditions dans lesquelles sont pris en charge les actes effectués par un infirmier remplaçant un infirmier conventionné et les actes effectués par les infirmiers conventionnés dans les établissements et structures d’hébergement de toute nature, ou encore les dispositifs d’aides à l’installation… Le volet régulation fixe la participation des infirmiers à la politique de santé. Il comprend le zonage, des actions de promotion du bon usage des soins et la maîtrise des dépenses de santé, des objectifs de formation, les conditions dans lesquelles les caisses d’Assurance maladie participent au financement des cotisations dues par les professionnels de santé au titre de leurs honoraires… Enfin, la convention fixe les sanctions encourues par les professionnels en cas de non-respect des engagements conventionnels. La convention constitue donc un outil de régulation de l’évolution des dépenses de santé au service de l’Assurance maladie.

Comment et par qui est-elle négociée ?

La convention est négociée et signée entre l’Uncam et les syndicats représentatifs de la profession puis définitivement adoptée par le ministère de la Santé. L’Union nationale des organismes d’Assurance maladie complémentaire (Unocam) peut également demander à participer aux négociations. Sa participation est néanmoins facultative. Les syndicats autorisés à participer aux négociations doivent avoir été déclarés représentatifs au niveau national, par décision des ministres chargés de la Santé et de la Sécurité sociale. Pour ce faire, une enquête de représentativité est menée en amont des négociations. Les critères de représentativité sont les suivants. Le syndicat doit cumulativement être indépendant financièrement, avoir une ancienneté de plus de deux ans, des effectifs suffisants ainsi qu’une audience minimale aux élections des Unions régionales des professionnels de santé (URPS), fixée à 10 % des suffrages exprimés au niveau national. La détermination des syndicats représentatifs a été l’une des causes du report des négociations de la convention nationale des infirmiers. On reste dans l’attente des résultats de l’enquête de représentativité qui permettra de préciser quels syndicats sont considérés comme représentatifs pour les cinq années à venir. Au regard des derniers résultats aux élections des URPS mais aussi Carpimko, le syndicat Onsil pourrait sortir des syndicats représentatifs, Convergence infirmière, la FNI et le Sniil verront certainement leur place assurée. Une fois les syndicats déclarés représentatifs, les négociations débutent. Les syndicats peuvent avoir des positions différentes. Pour être valide, la convention doit être signée par un ou plusieurs syndicats réprésentatifs ayant réuni au moins 30 % des suffrages aux URPS. Un droit d’opposition est aussi reconnu à un ou plusieurs syndicats ayant obtenu au moins 50 % des suffrages.

Quelles issues ?

Si un accord est trouvé entre les parties, la convention doit faire l’objet d’une approbation par les ministres compétents. Cette approbation peut désormais être tacite. En effet, une fois signée, la convention est transmise aux ministres chargés de la Santé et de la Sécurité sociale. Ceux-ci ont un délai de 21 jours pour s’opposer à l’accord, pour non-conformité aux lois et règlements en vigueur, ou pour des motifs de santé publique ou de sécurité sanitaire ou lorsqu’il est porté atteinte au principe d’un égal accès aux soins. Une fois passé ce délai, l’accord est réputé approuvé. Si les négociations n’aboutissent pas, un arbitre indépendant est désigné par l’Uncam et l’un des syndicats représentatifs. À défaut d’accord sur le nom de l’arbitre, c’est le Haut Conseil pour l’avenir de l’Assurance maladie qui procède à la désignation. L’arbitre auditionne les parties et édicte un projet de convention ou d’accord dans le respect du cadre financier pluriannuel des dépenses de santé, appelé “règlement arbitral”. Ce projet n’est pas soumis à la discussion des parties et est directement transmis aux ministres pour approbation. L’arbitrage conduit donc à imposer une convention aux parties. Compte tenu de son caractère impératif, les partenaires conventionnels sont tenus d’engager des négociations en vue d’élaborer une nouvelle convention au plus tard dans les deux ans qui suivent l’entrée en vigueur du règlement arbitral. Celui-ci cesse d’être applicable à compter de l’entrée en vigueur d’une nouvelle convention ou d’un nouvel accord.

Quelle est sa durée ?

Tout acte relatif à la convention (convention, règlement arbitral, avenant) est signé pour une durée de cinq ans. Il peut faire l’objet d’une reconduction tacite, ce qui conduirait sa durée à dix ans. Pour y faire obstacle et permettre une revalorisation des actes dans des délais plus contraints, l’un des syndicats représentatifs peut faire opposition à la reconduction tacite. Dans ces conditions, une nouvelle négociation intervient. Jusqu’à la publication au Journal officiel de la nouvelle convention, la convention arrivée à échéance ou résiliée continue de produire ses effets.

Quand entre-t-elle en vigueur ?

Tout acte conventionnel entre en vigueur à compter de son approbation par les ministres compétents. À titre dérogatoire, lorsqu’une mesure de la convention a pour effet une revalorisation des tarifs des honoraires, rémunérations et frais accessoires des professionnels de santé, cette disposition entre en vigueur au plus tôt à l’expiration d’un délai de six mois à compter de l’approbation ministérielle de la convention, de l’accord ou de l’avenant comportant cette mesure. Mais si la disposition revalorisant les tarifs compromet le respect de l’Objectif national des dépenses d’Assurance maladie (Ondam), l’entrée en vigueur de la mesure conventionnelle est suspendue, après consultation des parties signataires. Les parties doivent trouver un nouvel accord et, à défaut, l’entrée en vigueur de ces revalorisations est reportée au 1er janvier de l’année suivante.

Est-elle immuable ?

Durant les cinq années d’application, la conclusion d’avenants modificatifs peut avoir lieu. En outre, les agences régionales de santé ont la possibilité d’user de marges d’adaptation de la convention nationale sous forme d’avenants régionaux. Il s’agit de spécificités régionales pour l’application de la convention nationale, concernant notamment les mesures relatives à la régulation des dépenses et à l’installation des professions de santé.

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Historique

La dernière convention infirmière date de 2007. Depuis, quatre avenants ont été signés, en 2008, en 2011 (deux avenants) et en 2014.