L’accessibilité du cabinet - L'Infirmière Libérale Magazine n° 307 du 01/10/2014 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 307 du 01/10/2014

 

HANDICAP

Votre cabinet

ME GENEVIÈVE BELTRAN*   VÉRONIQUE SOKOLOFF**  

Les cabinets devaient être aux normes d’accessibilité aux handicapés au 1er janvier 2015. Une récente ordonnance introduit de nouveaux délais mais également de nouvelles obligations.

Définition et type des ERP

La loi du 11 février 2005 « pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées » a renforcé l’obligation d’aménagement des bâtiments recevant du public afin de permettre l’accès et la circulation des personnes handicapées, quel que soit le type de handicap : auditif, cognitif, moteur, psychique et/ou visuel. Les établissements recevant du public (ERP) sont classés en 5 catégories, en fonction du nombre de personnes accueillies. Les obligations d’accessibilité diffèrent en fonction de la catégorie. Les cabinets d’infirmiers sont des ERP de 5e catégorie de type U (établissements de soins) au sens du Code de la construction et de l’habitation et doivent obligatoirement répondre aux normes d’accessibilité, même si, au quotidien, c’est l’infirmière qui se déplace au domicile des personnes handicapées. La jurisprudence a confirmé qu’un cabinet de kinésithérapeute est bien une ERP de 5e catégorie (CAA Bordeaux, 8 novembre 2004, n° 00BX02205). La loi de février 2005 prévoyait notamment un délai de dix ans pour permettre la mise aux normes des locaux déjà bâtis.

L’Ad’AP

Le constat que l’échéance du 1er janvier 2015 se révélait intenable a entraîné la mise en place d’un nouveau dispositif par l’ordonnance n° 2014-1090 du 26 septembre 2014. Il s’agit de l’obligation de déposer un Agenda d’accessibilité programmée (Ad’AP) avant le 27 septembre 2015. Le dossier de demande de validation d’un Ad’AP est adressé par pli recommandé avec demande d’avis de réception à la mairie d’implantation du local professionnel. Il devra comprendre les informations suivantes : les noms et adresse du demandeur bien entendu, ainsi que son numéro Siren/Siret ou, à défaut, sa date de naissance, la catégorie et le type d’établissement (ERP de catégorie 5 pour les cabinets des professionnels de santé), l’analyse de la situation de l’établissement ou de l’installation au regard des obligations d’accessibilité, la nature des travaux à mener pour mettre en conformité l’établissement, l’estimation financière de la mise en accessibilité ainsi que la répartition des coûts sur chacune des années de l’agenda, la demande d’autorisation de construire, d’aménager ou de modifier un ERP. Le planning d’exécution des travaux devra être prévu sur une durée maximale de trois ans à compter de l’approbation de l’agenda. Des formulaires Cerfa à utiliser sont en cours d’élaboration. Ils différeront selon que les travaux sont soumis ou non à l’obtention d’un permis de construire ou d’aménager. Le dossier sera transmis au préfet. Il devra être instruit dans un délai de quatre mois. La commission consultative départementale de sécurité et d’accessibilité donnera son avis mais celui-ci ne s’imposera pas au Préfet. C’est ce dernier qui décidera. La décision d’approbation ou de refus d’approbation est notifiée à la personne qui a déposé la demande. Le défaut de notification vaut approbation à l’expiration d’un délai de quatre mois. Si l’Ad’AP est refusé, un nouveau délai est accordé pour déposer un nouveau dossier. Une attestation de fin de travaux devra être envoyée en fin d’Ad’AP. En cas de difficultés rencontrées, l’Ad’AP pourra être prolongé de douze mois au maximum.

Si le cabinet est déjà aux normes, une attestation de conformité doit parvenir à la Préfecture au plus tard le 1er mars 2015. Une déclaration sur l’honneur indiquant la conformité de l’établissement aux règles d’accessibilité en vigueur au 31 décembre 2014 peut suffire.

Motifs de dérogation

Des dérogations sont prévues par les textes. Il s’agira d’une impossibilité technique avérée ou des contraintes liées à la conservation du patrimoine architectural, une disproportion manifeste entre les améliorations apportées, leurs conséquences et leurs coûts, ou d’un refus par l’assemblée générale des copropriétaires de voter les travaux de mise en accessibilité. Ces dérogations sont accordées par le préfet, après avis de la commission consultative départementale de sécurité et d’accessibilité.

Sanctions

L’Ad’AP suspend l’application de l’article L152-4 du Code de la construction et de l’habitation qui punit d’une amende pénale de 45 000 euros (portée à 225 000 euros pour les personnes morales sociétés) tout responsable qui n’aurait pas respecté au 1er janvier 2015 les obligations d’accessibilité. Le non-dépôt de l’Ad’AP dans les délais est sanctionné par une amende de 1 500 euros.

Au chapitre des sanctions, rappelons que, selon l’article L111-8-3-1 du Code de la construction et de l’habitation, l’autorité administrative peut décider la fermeture d’un ERP qui ne correspond pas aux prescriptions de l’article L111-7-3, qui fixe l’obligation d’accessibilité pour tous les ERP.

Par ailleurs, le refus de délivrer une prestation du seul fait du handicap du patient est passible d’une amende maximale de 75 000 euros et de cinq ans d’emprisonnement. Ce recours pénal peut être engagé par toute personne et par toute association de personnes handicapées déclarée depuis au moins cinq ans.

Foire aux questions

→ À qui incombent ces aménagements et surtout leurs coûts ? Au propriétaire, s’il est également le professionnel qui exerce au sein du local. En revanche, en cas de location, la loi ne précise pas qui, entre le locataire et le propriétaire du local, doit assumer la charge des travaux de mise en accessibilité. Il conviendra de se reporter au bail pour identifier les responsabilités respectives de chacun. Si le bail comporte une clause claire et précise mettant ces travaux à la charge du locataire, ils incomberont à ce dernier. Dans le cas contraire, le bailleur devra faire réaliser ces travaux au titre de son obligation de délivrance.

→ Les toilettes du cabinet doiventelles être accessibles aux handicapés ? Aucune réglementation générale n’oblige les ERP à disposer de toilettes pour le public. Mais il convient toutefois de consulter le règlement sanitaire départemental du lieu d’exercice pour être fixé.

→ Quid si j’exerce dans une partie de mon habitation transformée en cabinet? Les locaux professionnels mixtes sont considérés, a priori, comme des bâtiments d’habitation et les bâtiments d’habitation n’ont pas l’obligation légale d’être accessibles.

EN SAVOIR +

• Le gouvernement a mis à la disposition des professionnels un outil d’autodiagnostic de leur local sur le site www.accessibilité.gouv.fr et a créé un portail d’information sur les Agendas d’accessibilité programmée (www.lesadap.fr).

• Une fiche élaborée sur le 3e cas de dérogation, à savoir la disproportion manifeste entre les améliorations apportées et leurs conséquences, est téléchargeable sur le site du ministère du Développement durable (lien raccourci bit.ly/1sMdF8I).

• La circulaire interministérielle n° DGUHC 2007-53 du 30 novembre 2007 et notamment son annexe 8 précisent les aménagements à effectuer.

• Consulter les décrets n° 2014-1327 du 5 novembre 2014 (bit.ly/1zxDEt7) et n° 2014-1326 du 5 novembre 2014 (bit.ly/1xyuk4X).