Le zona - L'Infirmière Libérale Magazine n° 291 du 01/04/2013 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 291 du 01/04/2013

 

Dermatose virale

Cahier de formation

LE POINT SUR

Dermatose virale fréquente, due au virus de l’herpes zoster, le zona se manifeste par des éruptions cutanées douloureuses, le plus souvent sur le thorax ou le visage, mais qui peuvent parfois s’étendre sur toutes les parties du corps.

Définition

Le virus varicelle-zona (ou VZV) appartient à la famille des Herpesviridae. La primo-infection par le VZV correspond à la varicelle, au cours de laquelle le virus gagne les ganglions sensitifs et y persiste à l’état latent. Le zona est une réinfection endogène. En cas d’immunodépression, de stress physique ou psychique, le virus peut en effet se réactiver et migrer le long des fibres nerveuses jusqu’à la peau. L’incidence du zona augmente considérablement après l’âge de 50 ans.

Les signes cliniques

Le zona se manifeste par une éruption vésiculeuse, unilatérale et métamérique (c’est-à-dire sur le territoire cutané correspondant au nerf concerné par la résurgence du virus), habituellement précédée de paresthésies (fourmillements, picotements…) ou de douleurs à type de névralgies ou de brûlures, de décharges électriques ou encore de coups de poignard. Plusieurs poussées éruptives sont possibles. Les vésicules se dessèchent en quelques jours pour devenir croûteuses. La guérison complète des lésions s’observe en 3 à 4 semaines.

Les complications

→ Douleurs post-zostériennes : ces douleurs persistent plus de 30 jours après le début de l’éruption, donc après cicatrisation des lésions cutanées. La prévalence de ces douleurs augmente avec l’âge, notamment après 50 ans.

→ Complications infectieuses : la surinfection bactérienne des lésions est favorisée par le grattage et peut aussi s’observer chez les immunodéprimés.

→ Complications ophtalmiques : un zona ophtalmique peut se compliquer de kératite (inflammation de la cornée) ou d’uvéite antérieure (inflammation de l’iris). Ainsi, un examen ophtalmique est indispensable si le zona concerne l’aile du nez, ou en cas d’œdème palpébral, de baisse de l’acuité visuelle, de rougeur de l’œil et chez l’immunodéprimé.

→ Zona de la femme enceinte : contrairement à la varicelle, un zona maternel ne semble pas exposer au risque d’infection congénitale, car c’est une maladie sans virémie.

Traiter la phase éruptive

Traitement antiviral

→ Indications : un traitement antiviral n’est pas systématique, mais est nécessaire dans certains cas pour limiter les complications et les douleurs post-zostériennes. Il est prescrit chez les patients de plus de 50 ans, chez les immunodéprimés, en cas de zona ophtalmique, ou en cas d’éruption grave et de douleurs intenses. Il doit débuter le plus tôt possible et au plus tard dans les 72 heures suivant le début de l’éruption.

→ Posologies : la biodisponibilité de l’aciclovir (Zovirax) est faible, ce qui impose une posologie de 800 mg, 5 fois/j. Le famciclovir (Oravir) s’administre à la posologie de 500 mg, 3 fois/j. Le valaciclovir (Zelitrex) est une prodrogue de l’aciclovir, dont la biodisponibilité, meilleure que celle de ce dernier, permet une administration en 3 prises quotidiennes de 1 000 mg. Ces molécules étant éliminées majoritairement par le rein, leur posologie doit être adaptée à la fonction rénale du patient. Le traitement antiviral dure 7 jours.

→ Effets indésirables : les antiviraux peuvent être responsables de troubles digestifs mais aussi d’atteintes hépatiques (élévation réversible des transaminases et/ou de la bilirubine), et de troubles neuropsychiques (céphalées, vertiges, et parfois confusion, hallucinations, myoclonies ou convulsions). Ces effets neurologiques sont plus fréquents chez les patients âgés ou insuffisants rénaux et peuvent être limités par une bonne hydratation.

Traitement antalgique

Les douleurs de la phase éruptive sont soulagées par des antalgiques opiacés de palier 2, le paracétamol seul étant souvent inefficace.

Traiter les douleurs post-zostériennes

Leur traitement fait appel aux antidépresseurs tricycliques pour renforcer le contrôle sérotoninergique de la douleur, ou aux anti-épileptiques pour diminuer l’hyperexcitabilité neuronale à l’origine de ce type de douleurs.

Antidépresseurs tricycliques

→ Posologies : l’amitriptyline (Laroxyl), indiquée dans les douleurs périphériques de l’adulte, est le traitement de référence des algies rebelles. Le traitement doit débuter à 12,5 mg/j pour être augmenté progressivement à 50, voire 150 mg/j. L’imipramine (Tofranil) peut également être utilisée en débutant le traitement à dose faible (10 à 25 mg/j), qui pourra être portée progressivement jusqu’à 300 mg/j. La clomipramine (Anafranil) a également une AMM dans le traitement des douleurs périphériques de l’adulte. Les doses (de 10 à 25 mg/j au départ) peuvent être augmentées jusqu’à 150 mg/j.

→ Effets indésirables : les antidépresseurs tricycliques sont principalement responsables d’effets atropiniques (sécheresse buccale, constipation, troubles visuels, rétention urinaire, états confusionnels) et sont contre-indiqués en cas de risque de glaucome à angle fermé et de troubles urétro-prostatiques. Ils peuvent aussi provoquer une somnolence et une hypotension orthostatique.

Antiépileptiques

→ Posologies : la gabapentine (Neurontin) peut être utilisée en débutant le traitement à 900 mg/j avec augmentation progressive jusqu’à 3 600 mg/j au maximum. Plus largement indiquées dans le traitement des douleurs neuropathiques : la carbamazépine (Tegretol) à la dose initiale de 200 à 400 mg/j pouvant être augmentée jusqu’à 1 200 mg/j, ou la prégabaline (Lyrica) à la dose de 150 mg/j au départ, puis jusqu’à 600 mg/j.

→ Effets indésirables : les anti-épileptiques peuvent induire des troubles digestifs, des vertiges et de la somnolence. La carbamazépine peut provoquer une leucopénie (justifiant des NFS régulières) et une hyponatrémie.

Versatis, emplâtres à la lidocaïne à 5 %

Versatis est une alternative au traitement des algies post-zostériennes, notamment chez les patients âgés, sensibles aux effets indésirables des antidépresseurs et antiépileptiques.

→ Mode d’administration : ce traitement ne nécessite pas de titration. Les emplâtres sont appliqués sur la zone douloureuse (après cicatrisation des vésicules) une fois par jour pendant 12 heures au maximum. Ne pas utiliser plus de 3 emplâtres en même temps et respecter un intervalle de 12 heures entre 2 applications. L’efficacité du traitement est évaluée au bout de 2 à 4 semaines. Le sachet des emplâtres adhésifs se conserve 14 jours après ouverture.

→ Effets indésirables : ces emplâtres sont bien tolérés et présentent peu d’effets indésirables (hormis des érythèmes locaux).

Quelques conseils

→ Soins locaux : l’application de chlorhexidine permet de prévenir une surinfection. Assurer une hygiène rigoureuse des mains et des ongles, ne pas gratter les vésicules, ni appliquer de talc (risque de surinfection grave). L’application de pansements non adhésifs limite la douleur causée par le frottement des vêtements. Éviter l’exposition au soleil.

→ En cas de suspicion de surinfection bactérienne, orienter le patient vers une consultation médicale, pour confirmation et prescription d’une antibiothérapie locale ou générale. L’utilisation concomitante d’antiseptiques et d’antibiotiques n’est pas recommandée (risque majoré de dermite irritative et d’allergie).

→ Transmission : il n’y a pas de risque de transmission du zona à une autre personne. En revanche, la transmission d’une varicelle est possible. Éviter le contact avec des personnes fragiles (femmes enceintes, jeunes enfants, immunodéprimés) non immunisées contre.

→ Automédication : attention, ne surtout pas prendre d’aspirine pendant l’infection par le VZV (risque de syndrome de Reye avec manifestations hépato-méningées potentiellement létales) ni d’ibuprofène (risque de complications cutanées graves).