Des maux mis en bulles

Vingt ans de carrière en services hospitaliers, autant en qualité de créatrice de BD médicale ! Ex-infirmière, Jacqueline Ducrot valorise de manière originale son expérience acquise au chevet des patients. Une évolution de carrière, mûrie au fil des ans. « Déjà, quand je travaillais à l’Hôtel-Dieu de Lyon, des médecins me demandaient d’égayer leurs conférences par mes dessins, se souvient-elle. Et lorsque les malades ne comprenaient pas un terme technique, je le leur expliquais par un visuel. » Mais c’est sa rencontre avec Jean-Charles Mastromarino qui la propulse dans l’aventure de la BD médicale. Il la persuade de collaborer à deux premiers titres, consacrés à la maternité… et à la stomathérapie ! « J’ai fondé les éditions Chepe en 1991, précise-t-il. Nous étions alors des pionniers dans ce nouveau genre de communication. Les milieux scientifiques doutaient d’ailleurs de notre sérieux ! En plus des stomisés, me disaient-ils… Pourtant, aujourd’hui encore, c’est l’un de nos titres phares. »

Dédramatiser

À l’époque, Jacqueline Ducrot, qui travaille en consultation de stomathérapie, distribue la BD à ses malades, sans avertir qu’elle en est l’auteur. « Hier comme aujourd’hui, analyse-t-elle, les patients se l’approprient alors qu’ils ont tendance à rejeter les autres supports écrits. À tout âge, ils n’ont aucune envie de s’embêter à lire des tonnes de consignes. » En aidant le patient à bien comprendre sa maladie, ces BD l’encouragent à mieux la supporter et à mieux la combattre. En effet, chaque ouvrage répond, en une dizaine de pages, à « l’essentiel des questions qu’il se pose ». Ce ne sont pas des témoignages, mais la maladie scénarisée à travers plusieurs personnages (patient, famille, soignants). « Une BD dit la vérité, en dédramatisant, analyse Jacqueline Ducrot. Un dessin, c’est plus pudique qu’une photo pour décrire une plaie ou une infection. Il facilite aussi la mémorisation des gestes de prévention et de soins. » L’ex-infirmière ne joue jamais sur la peur « qui est contre-productive », mais sur la douceur « et l’humour, sans dépasser un certain stade ». Parfois, ses personnages pleurent, se mettent en colère contre l’infirmière. Dernièrement, une patiente leur a dit que la BD sur le cancer du sein était « authentique, jusque dans l’émotion ». Un beau compliment.