Un mode d’emploi à connaître - L'Infirmière Libérale Magazine n° 285 du 01/10/2012 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 285 du 01/10/2012

 

DMP

Votre cabinet

Lancé en 2004, le Dossier médical personnel (DMP) doit centraliser toutes les données sur l’état de santé d’un patient afin de favoriser les échanges d’informations entre professionnels de santé pour une meilleure coordination des soins. Expérimenté en 2006, puis abandonné, il renaît de ses cendres en 2009, pour être développé de 2010 à 2012 et généralisé en 2013.

À quel titre les infirmières libérales sont-elles concernées ?

Le DMP peut être créé et alimenté par tout professionnel de santé, donc également par les infirmières libérales, et pas seulement par les médecins et les établissements de santé, comme cela a trop souvent été diffusé dans la presse. Il peut sans conteste se révéler un exceptionnel outil de travail pour les infirmières libérales puisqu’il contient toutes les données relatives à l’état de santé du patient : analyses, antécédents, certificats, ordonnances, comptes rendus d’hospitalisation, traitements… Autant d’informations auxquelles les professionnelles n’ont le plus souvent accès qu’à titre sporadique. Il serait cependant trop facile d’accuser les médecins de ne pas faire preuve de bonne volonté. Ils sont, comme les infirmières, soumis à des contraintes temporelles et administratives de plus en plus lourdes et peu formés à l’utilisation des nouvelles technologies, quand ils n’en sont pas tout simplement dégoûtés par la lourdeur des processus.

Même si les transmissions ont lieu oralement, il est exact que le manque de traçabilité fait défaut à tous les niveaux de la chaîne. Car si les infirmières apprécieraient de connaître avec exactitude la pathologie du patient auquel elles vont, par exemple, faire un pansement, nul doute que les médecins verraient d’un très bon œil un retour d’information, relatif à l’évolution des soins. La consultation du DMP, laquelle pourra se faire très prochainement via les tablettes numériques et les smartphones au domicile, peut permettre aux professionnels impliqués d’avoir une connaissance quasi instantanée de l’état de santé. Le DMP va donc non seulement faciliter le travail au quotidien de tous les praticiens, mais également contribuer à l’amélioration de la prise en charge du patient.

Comment créer un DMP ?

La création du DMP se fait à partir d’un ordinateur, d’un lecteur de cartes, de la carte Vitale du patient et de la carte de professionnel de santé (CPS).

Notre démarche

Sur le site du DMP, www.dmp.gouv.fr*, sur la page d’accueil, nous cliquons sur “professionnels de santé… accédez au DMP de votre patient”. Suit une explication simple de la procédure d’accès au DMP d’un patient, soit via un logiciel médical (mais tous ne sont pas encore compatibles, loin de là), soit directement via le site du DMP. C’est cette dernière option que nous choisissons.

Tout d’abord, il convient de savoir que la création d’un DMP n’est possible qu’à partir d’un ordinateur équipé d’un système d’exploitation supportant l’accès aux cartes CPS (versions courantes de Windows et Mac OS), un navigateur Web compatible avec l’application Web DMP (principaux navigateurs du marché comme Internet Explorer, Mozilla, Firefox…), un lecteur de cartes CPS et Vitale adapté et une CPS. Il faut donc commencer par s’assurer que l’ordinateur est correctement configuré. Le site propose fort heureusement de “lancer l’outil diagnostic automatique”… Nous lançons et le diagnostic révèle de nombreuses défaillances identifiées par des croix rouges. Il nous faut installer le logiciel Java puis une application qui permet à l’Asip Santé de vérifier la compatibilité de notre poste. À l’issue du processus, une licence d’utilisation est délivrée avec un certificat d’accès lié à la CPS.

Retour sur la page de création. S’affiche un message d’erreur indiquant un problème lié à la lecture de la CPS. Après de multiples essais infructueux, nous appelons le numéro Info Services du DMP (0 810 33 11 33 pour les professionnels). Là, un technicien nous explique que la CPS utilisée n’est pas la bonne (il est vrai que le praticien a reçu, en quelques semaines, trois cartes CPS de la part de l’Asip Santé) et qu’il y a sans doute une défaillance au niveau du lecteur de la carte. Il confirme le numéro de la bonne CPS (ce qui permet au moins au praticien de se débarrasser des deux autres), mais nous renvoie vers le service après-vente du lecteur pour le problème de lecture. Par mail, nous obtenons un lien permettant de télécharger le pilote pour le lecteur de cartes, qui est enfin reconnu par l’ordinateur. Après avoir, d’une part, validé le certificat d’accès et, d’autre part, entré le code “porteur” (code personnel de la CPS), nous arrivons sur le tableau de bord du professionnel. Sur ce tableau, où figurent bien son nom et sa qualité, on lui propose soit de créer un DMP (en introduisant la carte Vitale du patient dans le lecteur), soit d’accéder au DMP d’un patient, en inscrivant son INS, Identifiant national de santé (du patient), lequel n’est délivré qu’au moment de la création du DMP. La lecture de la carte Vitale se révèle impossible. Après un long rendez-vous technique téléphonique avec Asip Santé, nous parvenons à la conclusion que le problème vient sans doute du lecteur de cartes, un lecteur ancienne génération, de plus de neuf ans !

Comment impliquer les infirmières libérales ?

Cependant, pour en avoir le cœur net, nous décidons de contacter, par téléphone, Nicolas Schinkel, infirmier libéral et chargé de mission télésanté URPS Franche-Comté, association qui vient de remporter un appel d’offres pour un projet visant à impliquer les infirmières libérales dans la création et l’alimentation du DMP.

L’idée qui sous-tend ce projet est simple : ne pas laisser aux médecins la main mise sur le DMP. Si l’on se réfère au nombre de DMP créés en secteur libéral par les médecins, cette crainte ne semble pas justifiée dans l’immédiat. À titre d’exemple, si nous prenons la région Poitou-Charentes, seuls 757 DMP ont été créés… par les établissements de santé pour la presque quasi-totalité. C’est l’un des plus mauvais élèves en France !

Nicolas Schinkel nous confirme que l’ouverture d’un DMP via le portail fonctionne parfaitement – il l’a maintes fois testé avec les cartes Vitale de ses patients – soulignant d’une part que les lecteurs nouvelles générations sont plus performants et donc moins sujets aux aléas techniques, et d’autre part qu’il y aura toujours des bugs informatiques, qui ne justifient en aucun cas la chasse aux sorcières qui est orchestrée contre le DMP.

En conclusion ?

Après avoir contacté plusieurs autres praticiens ayant eu la possibilité d’ouvrir des DMP pour leurs patients, nous parvenons à la conclusion que le recours aux logiciels professionnels (qui doivent avoir été déclarés compatibles par l’Asip Santé) est le moyen le plus adapté pour ouvrir un DMP.

Les professionnelles doivent donc cesser d’écouter tous ces oiseaux de mauvais augure qui ne cessent de chanter l’air de l’échec annoncé du DMP. Comme toute innovation, celle-ci suscite certes l’appréhension et le doute, mais aussi l’engouement et la curiosité. Les infirmières libérales ont l’opportunité de s’approprier un DMP en gestation et d’en faire un outil répondant pleinement à leurs besoins. C’est en pratiquant le DMP qu’elles démontreront son utilité et amèneront ainsi l’ensemble des professionnels de santé – et pas seulement leurs consœurs et confrères – à adhérer à un dispositif qui ne peut que contribuer à améliorer la prise en charge du patient.

* N’hésitez pas à consulter le site www.dmp.gouv.fr sur lequel vous trouverez explications, informations, modules de formations et conseils sur le DMP.

À SAVOIR

• La loi du 30/01/2007 rend obligatoire l’Identifiant national de santé (INS) pour la conservation, la transmission et l’échange de données de santé. Il est nécessaire pour créer le DMP. Unique, pérenne et fiable, il garantit que les données conservées dans le dossier sont bien celles des patients.