Les brûlures d’estomac | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 283 du 01/07/2012

 

Un symptôme

LE POINT SUR

Souvent liées à un reflux gastro-œsophagien, les sensations de brûlures d’estomac et les régurgitations acides sont fréquentes. Le traitement médicamenteux (antiacides, antisécrétoires) reste toujours associé aux recommandations hygiéno-diététiques.

Les brûlures d’estomac peuvent avoir différentes causes (prise d’AINS, ulcère gastrique ou duodénal, prise de certains médicaments qui diminuent le tonus du sphincter inférieur de l’œsophage : atropiniques, dérivés nitrés…), mais, très souvent, elles sont liées à un reflux gastro-œsophagien (RGO). Ce reflux est provoqué par un dysfonctionnement du sphincter inférieur de l’œsophage entraînant la remontée du contenu acide de l’estomac vers l’œsophage.

La pathologie

→ Le RGO se manifeste typiquement par des sensations de brûlures remontant derrière le sternum (pyrosis), et parfois par des régurgitations acides dans la bouche. Les troubles apparaissent souvent ponctuellement après les repas (plus particulièrement copieux) ou la nuit, du fait de la position allongée. Ils peuvent aussi être déclenchés par des changements de posture (se pencher en avant).

→ Le RGO peut également se manifester par des signes extra-digestifs, souvent trompeurs lorsqu’ils surviennent en dehors de tout pyrosis : asthme, toux chronique, laryngite chronique…

→ Ces symptômes retentissent plus ou moins sur la qualité de vie : troubles du sommeil, restriction alimentaire, gêne au cours des activités quotidiennes.

Facteurs favorisants

Le stress, les repas copieux ou pris trop rapidement, la consommation de certains aliments (café, épices…) peuvent déclencher des brûlures d’estomac.

Le tabagisme (la nicotine provoque un relâchement du sphincter), l’augmentation de la pression exercée sur l’estomac (surpoids ou obésité, grossesse…) sont aussi des facteurs favorisants.

Signes d’alarme

→ Le RGO évolue le plus souvent de façon chronique sans entraîner de complications (œsophagite pouvant elle-même se compliquer : ulcère, difficultés à avaler…).

→ Toutefois, certains signes imposent une consultation médicale et la réalisation d’examens complémentaires : amaigrissement, difficultés à avaler (dysphagie), vomissements, présence de sang dans les selles, douleurs rythmées par l’effort (étiologie coronarienne), etc.

→ Une consultation médicale est également recommandée lorsque les symptômes surviennent pour la première fois chez un patient de plus de 50 ans, notamment s’il existe des facteurs néoplasiques associés (tabac, alcool) et lorsque la prise régulière des médicaments d’automédication ne suffit pas ou plus à soulager les troubles.

Le traitement

Les règles hygiéno-diététiques (voir encadré page ci-contre) suffisent parfois à soulager les symptômes. Si elles sont inefficaces, un traitement médicamenteux est indiqué, toujours en association avec les recommandations hygiéno-diététiques.

Médicaments

Trois grandes familles sont utilisées.

Antiacides et alginate

→ Sels d’aluminium de magnésium ou de calcium (qui neutralisent l’acidité gastrique), acide alginique (qui forme un gel surnageant protégeant la muqueuse œsophagienne). Leur délai d’action bref et de courte durée impose des prises répétées.

→ L’administration s’effectue généralement au moment des douleurs ou après les repas pour ceux renfermant des alginates.

→ Ces médicaments interfèrent avec l’absorption de nombreux médicaments (nécessité de décaler les prises d’au moins deux heures).

→ Exemples : Xolaam, Gaviscon, etc. Non remboursés : Maalox, Rennie, Riopan, Gavisconell, Marga maux d’estomac, etc.

Antisécrétoires anti-H2

→ Cimétidine, ranitidine, famotidine, nizatidine. Ils inhibent la sécrétion acide. Leur action est rapide, plus prolongée que celle des antiacides, mais moins puissante que celle des inhibiteurs de la pompe à protons. Elle diminue lors d’un traitement continu (phénomène de tolérance).

→ L’administration s’effectue au moment de la crise douloureuse, avant le repas ou au coucher.

→ La cimétidine (Tagamet, etc.) est utilisée avec précaution car elle peut interférer avec de nombreux médicaments (inhibiteur enzymatique). En automédication : maximum 5 jours (cimétidine) ou 14 jours de traitement (famotidine).

→ Exemples : Tagamet, Nizaxid, Azantac, Raniplex, etc. Non remboursés : Pepcidac (famotidine), Stomédine (cimétidine), etc.

Inhibiteurs de la pompe à protons (IPP)

→ Oméprazole, ésoméprazole, pantoprazole, lansoprazole, rabéprazole. Leur effet ne s’établit qu’après un délai d’action de 24 heures à 2 ou 3 jours. Cet effet puissant et prolongé (1 prise par jour) se maintient même lors d’un traitement continu.

→ La prise s’effectue avant le petit déjeuner (ou avant le repas du soir en cas de symptômes nocturnes).

→ En automédication, il ne faut pas dépasser 2 à 4 semaines de traitement d’affilée (selon le médicament choisi). Si les symptômes récidivent rapidement après l’arrêt (quelques jours à quelques semaines), une consultation médicale est impérative.

→ Exemples : Mopral, Inexium, Ogast, Lanzor, Inipomp, pariet, etc. Non remboursés : Mopralpro, Pantoloc Control, Ipraalox, etc.

Stratégie thérapeutique

Le traitement du RGO est symptomatique et dépend de la fréquence des symptômes.

→ En cas de symptômes espacés (survenant moins d’une fois par semaine), un antiacide ou un anti-H2 est indiqué en première intention, à la demande.

→ En cas de symptômes fréquents (plus d’une fois par semaine), la prise d’un IPP (en automédication ou sur prescription) est recommandée. Un antiacide peut y être associé les premiers jours, le temps que l’IPP fasse effet.

→ En cas de récidives, les IPP peuvent aussi être prescrits à la demande ou au long cours en traitement d’entretien en recherchant la dose minimale efficace.

→ En cas de RGO avec œsophagite, le traitement repose sur les IPP durant 4 à 8 semaines, voire au long cours.

→ La chirurgie est une alternative aux IPP au long cours.

→ Au cours de la grossesse, le RGO est généralement soulagé par les mesures hygiéno-diététiques. En cas d’échec, les antiacides sont proposés. Si la prise d’un IPP est justifiée, le choix se porte sur l’oméprazole, molécule pour laquelle on dispose de plus de données chez la femme enceinte.

En chiffres

→ Près d’1 personne sur 3 souffre de symptômes du RGO (aigreurs d’estomac, remontées acides) et 8 % de la population déclare ressentir des symptômes fréquents (au moins une fois par semaine)*.

* Le reflux gastro-œsophagien (RGO) dans la population française, résultats d’une enquête sur 8 000 sujets adultes, La Presse médicale. J.-F. Bretagne. 2006, vol. 35. pp. 23-31.

Recommandations hygiéno-diététiques

→ Repérer les facteurs ou les circonstances déclenchant les troubles et les éviter si possible : aliments acides ou épicés (agrumes, café, plats pimentés, alcool, etc.), tabac, stress, effort physique après le repas, position penchée en avant, etc.

→ Éviter les repas riches en graisses qui ralentissent la vidange gastrique, et ne pas se coucher immédiatement après le repas, surtout s’il est copieux : une étude récente confirme l’intérêt d’une marche après le dîner et d’un intervalle d’au moins 3 heures entre le repas et le coucher.

→ En cas de symptômes la nuit, il faut conseiller de surélever la tête du lit de 10 à 15 cm (cales sous les pieds du lit).

→ Selon le cas, il est recommandé de perdre du poids.

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