Dégénérescence discale du jeune adulte - L'Infirmière Libérale Magazine n° 272 du 01/07/2011 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 272 du 01/07/2011

 

Cahier de formation

Savoir faire

Le mal de dos nous guette à tous les âges de la vie. En pleine force de l’âge, ce sont les disques intervertébraux qui commencent à provoquer des blocages parfois invalidants. Plus tard, les articulations s’usent et l’os est bien souvent fragilisé par l’ostéoporose : les vertèbres se fracturent et se cassent. Quant à l’enfant en croissance, il est parfois atteint d’une pathologie qui vrille sa colonne : la scoliose. Face à toutes ces situations, l’infirmier doit rester vigilant pour dépister, conseiller et expliquer les différentes solutions.

Mme D, 42 ans, en surpoids, souffre de douleurs sciatiques depuis de longs mois…

Si le repos, les antalgiques, les myorelaxants et les anti-inflammatoires ne la soulagent pas, si elle ne parvient pas à perdre du poids, elle peut avoir recours à la chirurgie pour retirer la hernie discale qui comprime son nerf sciatique. Avant cela, il faut que le disque abîmé ait bien été identifié.

VIEILLISSEMENT DE LA COLONNE VERTÉBRALE

Il s’agit d’un processus inéluctable. Son évolution dépend en premier lieu de notre capital génétique (nous ne sommes pas tous égaux face aux problèmes de dos). Elle dépend également de facteurs extérieurs comme le surpoids, l’inactivité, des métiers très physiques. Le maintien d’une bonne force musculaire et d’une bonne hygiène de vie demeure la meilleure attitude de prévention des pathologies dorsales.

La hernie discale est une affection courante des adultes actifs. En effet, elle survient lorsque le disque est suffisamment élastique pour permettre au noyau d’être mobile. Au-delà de 50 ans, le disque est beaucoup plus fibreux et d’autres pathologies que la hernie prennent le relais. L’âge moyen des personnes opérées pour une pathologie dégénérative du rachis est de 45 ans. Les douleurs sciatiques, crurales, lombaires ou dorsales qui lui sont associées peuvent sérieusement détériorer la qualité de vie. Si la chirurgie est l’une des solutions envisageables, elle ne permet pas de régler le problème systématiquement, d’où l’importance de bien en identifier les causes.

ADAPTER SON MODE DE VIE

Perdre du poids

Comme tout élément du squelette, le rachis souffre de l’excès de poids. Les kilos superflus augmentent les contraintes sur les articulations intervertébrales, surtout dans la région lombaire. Perdre du poids permet donc de soulager le dos.

Attention néanmoins aux régimes entrepris sans accompagnement médical : la perte de poids doit se faire de façon régulière et harmonieuse, afin de laisser le temps aux muscles et aux tendons de s’adapter. Et gare aux régimes “yo-yo”, avec perte rapide mais reprise tout aussi rapide de poids, qui ne sont bons ni pour la santé (avec un risque de déséquilibre nutritionnel) ni pour le dos.

Être actif

Contrairement à ce qui a longtemps été prescrit et qui reste une idée fausse encore bien ancrée, le repos complet n’est pas indiqué pour guérir d’une lombalgie. Au contraire, s’il soulage momentanément, il prolonge la durée de la lombalgie et les douleurs sont accrues lors de la reprise d’activité. Il est donc préférable de conserver une activité physique adaptée pendant la journée, tout en soulageant ses maux par des antalgiques.

De façon générale, l’exercice physique stimule la minéralisation osseuse tout en entretenant la musculature : les deux sont essentiels pour contrer le vieillissement prématuré de la colonne vertébrale et éviter les douleurs associées. Quel que soit l’âge, la marche reste un excellent exercice physique. Aller acheter le journal à pied, prendre les escaliers plutôt que l’ascenseur ou l’escalator, ou même profiter de la pause déjeuner pour se dégourdir les jambes sont autant de conseils faciles à intégrer au quotidien, même pour les personnes à l’activité professionnelle envahissante. Toute activité sportive contribue à renforcer le squelette, bien que la pratique de certaines d’entre elles puisse être violente pour des personnes souffrant du dos (comme la course à pied ou le tennis sur terrain dur, par exemple). La natation présente peu d’intérêt pour l’ossification du squelette, puisqu’elle s’exerce en apesanteur, mais c’est une activité physique facile à entreprendre pour des personnes en surpoids (attention toutefois à la brasse qui cambre le dos).

Réapprendre les gestes quotidiens

Même si elle est programmée dans nos gènes, c’est bien souvent l’adoption d’une mauvaise posture ou la répétition de mauvais gestes qui génèrent des contraintes excessives sur un étage vertébral et contribuent à accélérer le processus de dégénérescence discale. Dès l’apparition des douleurs, il est important d’en identifier la cause dans les gestes du quotidien, au travail comme à la maison. Dans le cadre professionnel, il n’est pas facile de les éviter. Ainsi, un maçon ou un ouvrier maniant le marteau piqueur soumettent leur dos à de très fortes contraintes et ils seront obligés de changer de métier pour l’épargner. En revanche, un employé de bureau pourra plus facilement adopter des postures ergonomiques pour adapter ses conditions de travail.

ENVISAGER LA CHIRURGIE

→ Ressentir quelques lombalgies après des efforts répétés n’est pas anormal. Le traitement médical antalgique, le port d’une ceinture lombaire (voir tableau ci-dessus), la rééducation ou l’hygiène de vie permettent de traiter la grande majorité des problèmes qui sont souvent transitoires.

→ Le signe d’alerte qui doit conduire à consulter un médecin est la survenue de douleurs radiculaires comme la sciatique, qui irradient à distance de la colonne vertébrale et ne cèdent pas au repos. Si ces symptômes s’accompagnent d’une perte de force musculaire dans les membres inférieurs, voire une paralysie partielle (syndrome de la “queue de cheval”), la consultation doit avoir lieu sans délai.

→ La chirurgie possède des indications bien précises. Il ne faut pas refuser un acte chirurgical sous prétexte qu’il est trop agressif, en privilégiant un geste moindre dont l’efficacité est limitée dans le temps et nécessitera ensuite une reprise dans de mauvaises conditions et avec de moins bons résultats. N’importe quel chirurgien n’est pas qualifié pour opérer le rachis. Il est important de s’orienter vers un membre de la Société française du rachis afin de bénéficier des meilleurs soins. Pour que l’intervention puisse se dérouler, il faut que le chirurgien ait pu identifier de façon certaine le disque déficient à l’origine des douleurs (inutile d’intervenir sur une douleur à composante uniquement musculaire). Pour cela, toute une série d’examens et d’imagerie sont souvent nécessaires : radiographies du rachis en position debout, radiographies dynamiques du dos, exceptionnellement des saccoradiculographies (radiographies après injection de produit de contraste autour de la moelle épinière), scanner et IRM, qui reste l’examen le plus performant pour les structures molles et nerveuses. L’ablation chirurgicale (exérèse) d’une hernie discale est une intervention très fréquente, puisqu’on en dénombre environ 30 000 par an en France. Elle nécessite environ 1 h 30 de temps de bloc opératoire et une hospitalisation de deux jours. Le patient est autorisé à se lever dès le lendemain de l’intervention. Il lui est même conseillé de reprendre rapidement une activité normale.

→ Le soulagement de la douleur sciatique ou crurale est immédiat si les racines nerveuses étaient simplement comprimées. Mais si elles étaient abîmées ou enflammées, il est possible qu’une douleur résiduelle persiste au réveil. Des complications comme des infections ou des hématomes peuvent survenir. D’autre part, le taux de récidive est estimé à environ 5 à 10 %. Le patient doit bien comprendre qu’en enlevant la hernie, le chirurgien ne règle pas les éventuelles atteintes arthrosiques : il supprime donc les douleurs neurologiques, mais pas les douleurs articulaires.

Les troubles musculo-squelettiques : un fardeau humain et économique

Les troubles musculo-squelettiques sont un véritable problème de santé au travail. Ce sont les maladies professionnelles les plus fréquentes. Leurs conséquences sont lourdes, non seulement pour les personnes qui souffrent, mais également pour leurs entreprises : absentéisme, perte de productivité, nécessité de reclassement en cas d’atteinte définitive… Le mal de dos en fait partie. Les facteurs de risque connus sont liés à la manutention de charges lourdes, à la répétitivité des gestes, aux efforts excessifs, aux postures extrêmes. L’exposition au froid ou aux vibrations est un facteur aggravant. Les chutes ou glissades sont également à l’origine de fractures ou de lumbagos. Le ministère du Travail et de la Santé, relayé par des agences publiques et des associations, a lancé une campagne pour sensibiliser les employeurs et les salariés à l’amélioration des conditions de travail susceptibles de réduire l’incidence des troubles musculo-squelettiques. Des adaptations simples du poste de travail sont faciles à mettre en œuvre : fournir un siège à hauteur réglable, varier les tâches pour que la personne puisse bouger et ne reste pas trop longtemps dans la même position, etc.