Prévention des décompensations - L'Infirmière Libérale Magazine n° 255 du 01/01/2010 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Libérale Magazine n° 255 du 01/01/2010

 

Cahier de formation

Savoir faire

Monsieur P.avait une maladie de Cushing. Le traitement chirurgical s'étant avéré impossible, il a subi une surrénalectomie bilatérale et est devenu insuffisant surrénalien. Il fait une bronchite. Doit-il modifier son traitement ?

Oui, les doses d'hydrocortisone doivent être doublées ou triplées. Vérifiez la prescription que le patient doit avoir sur lui (la carte d'insuffisant surrénalien).

L'ÉDUCATION DU PATIENT

L'éducation du patient insuffisant surrénalien est primordiale pour prévenir la décompensation aiguë, qui peut être dramatique. Elle peut survenir à l'arrêt inopiné d'un traitement substitutif, être favorisée par un régime sans sel, un traitement diurétique. Elle peut également apparaître en cas de stress. Dans ce cas, malgré le traitement substitutif, il y a une carence hormonale relative par augmentation des besoins.

LA RÉACTION DE STRESS

Les événements qui provoquent un stress déclenchent au niveau du système nerveux central trois chaînes de réactions.

→ Au niveau de la première, l'hypothalamus sera activé et la libération de CRH commence. Celle-ci entraîne l'excrétion d'ACTH qui va stimuler la libération de glucocorticoïdes au niveau de la corticosurrénale.

→ Dans la deuxième chaîne de réaction, la médullosurrénale sera activée par le système sympathique, ce qui va entraîner la libération d'un mélange d'adrénaline et de noradrénaline.

→ Dans la troisième chaîne, le système nerveux parasympathique viendra s'opposer aux actions du sympathique.

À court terme, l'action de l'adrénaline et de la noradrénaline domine, puis le système parasympathique intervient ; secondairement la libération de cortisol viendra moduler les effets de la décharge sympathique sur l'organisme. Les trois axes se normalisent après la disparition de la situation de stress. Le rôle précis des glucocorticoïdes dans la protection contre le stress est mal connu, mais on sait qu'en situation de déficit en glucocorticoïdes, un stress peut entraîner une hypotension, un choc et la mort.

LA PRÉVENTION DES DÉCOMPENSATIONS

Les mesures sont simples, mais extrêmement importantes.

→ Le traitement de l'insuffisance surrénale est un traitement le plus souvent à vie, qui ne doit jamais être interrompu.

→ Le patient doit connaître les signes débutants de l'insuffisance surrénale aiguë (apparition d'une fatigabilité, d'une fièvre, d'une perte d'appétit, de nausées, des douleurs abdominales, d'accès de pâleur ou de sueurs). Dans cette situation :

- doubler ou tripler les doses habituelles d'hydrocortisone,

- surveiller le poids,

- consulter en urgence le médecin en l'absence d'amélioration rapide au bout de quelques heures,

- et, en cas d'aggravation ou d'apparition de signes de gravité, suivre le point suivant.

→ Consulter en urgence à l'hôpital ou appeler le 15 devant l'apparition d'un ou plusieurs signes de gravité en signalant la maladie :

- une fatigabilité intense gênant le moindre effort,

- des vomissements incessants,

- une impossibilité de prendre le traitement par la bouche, du fait des troubles digestifs ,

- une perte de poids brutale traduisant une deshydratation,

- un malaise, perte de connaissance.

→ Afin de prévenir une insuffisance surrénale aiguë, adapter préventivement le traitement hormonal dans certaines situations :

- doubler ou tripler les doses d'hydrocortisone en cas de fièvre et de tout incident (infection, traumatisme, canicule, ou stress quelconque),

- en cas de vomissements ou de diarrhées répétés, le patient doit disposer d'une ampoule de 100 mg d'hydrocortisone injectable à administrer sur prescription du médecin (par voie veineuse ou intramusculaire).

Le patient doit disposer d'une carte spéciale mentionnant le diagnostic d'insuffisance surrénale, l'indication exacte de son traitement et les coordonnées du spécialiste qui le suit.

Lorsqu'une intervention chirurgicale est prévue, le patient doit informer l'anesthésiste : la dose d'hydrocortisone est doublée la veille de l'intervention et le relais est pris par de l'hydrocortisone injectée à la seringue autopousseuse en per- et périopératoire.

La grossesse, situation où les troubles digestifs sont fréquents, peut rendre nécessaire l'augmentation de la dose quotidienne d'hydrocortisone au cours du premier trimestre et lors de l'accouchement.

Point de vue...

Nos réunions et nos listes de discussion

Claudine Colin, directrice de l'Association Surrénales

« L'asthénie est fréquente malgré le traitement. Les maladies de la surrénale ne se voient pas et les malades ont souvent du mal à faire comprendre cette fatigue à leur entourage : cela ajoute une difficulté supplémentaire à la gestion de leur maladie. Le fait de venir seul ou en famille aux réunions les aide à se sentir reconnu, à se poser dans leur emploi où cette fatigue est souvent un handicap qu'ils n'osent pas exprimer. Des échanges peuvent se faire sur des liste de discussion dont je suis la modératrice sur trois thèmes : hyperplasie congénitale des surrénales à la naissance, hyperplasie congénitale des surrénales à révélation tardive et insuffisance surrénalienne. »

Hygiène de vie

Une alimentation normalement salée, riche en calcium, pauvre en sucres rapides est conseillée. Ne jamais faire de régime sans sel ni prendre de diurétiques, et attention aux laxatifs. Une activité sportive douce et régulière est conseillée (marche, natation, cyclisme), afin d'atténuer la fonte musculaire.