« Malgré tout, des liens se tissent avec les patients » | Espace Infirmier
 

02/09/2014

EBOLA

« Malgré tout, des liens se tissent avec les patients »

Alors que les soignants paient un lourd tribut à l’épidémie d’Ebola sévissant actuellement en Afrique de l’Ouest, Catherine Juvyns, une infirmière qui a déjà effectué deux missions en Guinée, se dit prête à repartir.

« Je n’ai pas peur d’être contaminée, car je sais comment se transmet l’infection, affirme l'infirmière belge, qui a passé douze semaines dans un centre de soin de Médecins sans frontières (MSF) à Conakry, la capitale de la Guinée, premier pays d’Afrique de l’Ouest touché par l’épidémie actuelle de fièvre Ebola. Il faut éviter tout contact, c’est la distance qui permet d’éviter l’infection. » Fini, donc, les poignées de main ou les embrassades entre collègues.

« On ne peut entrer dans la zone d’isolement, où sont consignés les malades diagnostiqués, qu’en étant équipés de la combinaison de rigueur, avec des gants, un masque, une coiffe, des bottes; aucune partie de la peau ne doit être exposée. » Difficile d’imaginer le soin dans ces conditions. « Il faut être très organisé, car on ne peut rester que 45 minutes dans cette tenue, en raison de la chaleur, poursuit la jeune femme. On doit donc savoir précisément ce qu’on va faire et où tout est rangé. »

240 professionnels de santé infectés

Des conditions de soin et de protection qui
sont rarement disponibles dans les hôpitaux d’Afrique de l’Ouest, ce qui explique en partie
le taux élevé de contamination des professionnels de santé. Selon l’Organisation mondiale
de la santé, plus de 240 d’entre eux ont déjà
été infectés dans l’ensemble des pays touchés (1); plus de la moitié sont décédés - ce qui correspond au taux de mortalité moyen
de cet épisode épidémique (57 %). Même si
cela ne s’est pas produit dans les centres
gérés par MSF.


« On doit aussi sortir de la zone avant d’avoir trop chaud, sachant qu’il faudra encore quelques minutes pour atteindre le sas de décontamination avant de se découvrir», poursuit Catherine Juvyns. La bonne forme de l’ensemble des soignants est capitale. « Car, c’est lorsqu’on est fatigué que l’on commet des erreurs. » Un autre danger réside dans le risque d’accident exposant au sang (AES). « C’est pourquoi nous privilégions au maximum les thérapeutiques par voie orale », explique l’IDE.

« En quarantaine, ils ne voient que nous »


S’il n’existe pas de traitement, les symptômes de l’affection peuvent être pris en charge par la réhydratation, l’alimentation, la prise d’antipaludéens, l’administration d’antibiotiques à large spectre et de multivitamines et, enfin, le traitement de la douleur et des nausées. « Malgré tout, des liens se créent avec les patients, à travers le masque, les gants et toutes ces protections, souligne l’infirmière. On ne peut pas ne pas s’attacher. En quarantaine, ils ne voient que nous. Et puis, même si des familles sont décimées, et on a aussi toujours des gens qui s’en sortent. Il n’y a pas que de la tristesse. »

Sandra Mignot
Photos : une équipe Ebola (©SCherkaoui) et Catherine Juvyns (©MSF)




1- Guinée, Sierra Leone, Liberia, Nigeria. Une seconde épidémie, sans lien avec la première, s’est déclarée depuis le 24 août en République démocratique du Congo.

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