Exercice partiel : l’ordonnance est ratifiée | Espace Infirmier
 

24/07/2017

Exercice partiel : l’ordonnance est ratifiée

L’ordonnance sur l’accès partiel aux professions médicales et paramédicales a été ratifiée par les députés le 19 juillet. Elle autorise les professionnels de santé européens, qui n’ont pas le niveau requis pour que leur diplôme soit reconnu, à n’exercer que certaines activités en France. Une mesure qui a fait plusieurs mécontents.

L'Assemblée nationale a ratifié, après la Commission des Affaires sociales, une série d'ordonnances portant notamment sur la reconnaissance de la profession de physicien médical, mais c’est surtout celle sur la reconnaissance des qualifications professionnelles qui a soulevé le débat. Cette ordonnance, qui transpose une directive européenne de 2013, vise à donner l'autorisation, sous certaines conditions, à des professionnels de santé d'autres pays européens d’exercer en France. De nouveaux métiers pourraient alors apparaître, tels que les auxiliaires en plaies et cicatrisation ou les assistants de soins en diabétologie.

Des députés, tous partis politiques confondus, ont formulé leurs inquiétudes vis-à-vis de cette disposition, cherchant même à la supprimer par le biais d’un amendement. Pour Caroline Fiat (La France Insoumise), ce décret « ouvre la boîte de Pandore de la déréglementation […]. S’il est certain que l’échange d’expériences, notamment dans le domaine de la santé, peut s’avérer fort bénéfique pour les professionnels concernés, encore faut-il que cela ne se traduise pas par une harmonisation par le bas. » Pour Thibault Bazin (LR), « cette disposition risque d’entraîner une segmentation des professions de santé, une déstabilisation totale de l’organisation du système de soins et, in fine, de porter atteinte à la protection des patients. Par exemple, comment dissocier l’acte de dispensation du médicament du conseil pharmaceutique et la détection de contre-indications ? »

Mobilité des travailleurs

Les députés de la République en marche ont, quant à eux, défendu le décret, estimant, comme la députée Delphine Bagarry, que les Français sont « extrêmement vaniteux ». « Pourquoi les infirmières, les kinésithérapeutes, les médecins et les sages-femmes formés ailleurs seraient moins performants, moins qualifiés pour exercer leur métier, même s’ils l’exercent de façon partielle », a-t-elle soutenu dans l’Hémicycle. […] Je ne suis pas choquée du dispositif d’accès partiel à l’exercice d’une profession, à condition que l’on s’assure de la sécurité des patients et de la qualité de la qualification en France – les formations doivent répondre aux attentes en matière de sécurité des patients – et que l’autorisation soit donnée et garantie par les Ordres, au cas par cas. Nous pouvons nous satisfaire de cette ordonnance, qui permettra d’enrichir notre pays de professionnels dont nous manquons. »

Olivier Véran, qui a obtenu des réponses de la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a tenté de rassurer ses confrères et de « dédramatiser la question » : « S’agissant des professions paramédicales, 17 000 masseurs-kinésithérapeutes formés à l’étranger exercent aujourd’hui en France, ce qui représente 20 % de la masse salariale. Est-ce beaucoup ? Il faut savoir que 45 % d’entre eux sont des Français qui ont contourné les études de santé françaises pour se former en Belgique. Les 3 500 orthophonistes formés à l’étranger qui exercent en France représentent, quant à eux, 15 % de la masse salariale, mais 95 % d’entre eux sont des Françaises et des Français partis se former à l’étranger, notamment en Belgique et en Roumanie. Quel est le moteur principal, en dehors du contournement des études françaises et de la sélection par le numerus clausus, sur lesquels il faut revenir ? C’est le différentiel de salaires.  » Selon lui, il n’existe pas, sur le territoire national, un marché des professions paramédicales sous le régime de l’accès partiel. Un ressortissant de l’Union européenne titulaire d’un diplôme paramédical n’a aucun intérêt à venir s’installer en France pour exercer seulement une partie de l’activité.

Pourquoi cette ordonnance ?

Agnès Buzyn a dit comprendre, en Commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale, « les inquiétudes » des professionnels de santé. Elle s'est engagée à être « particulièrement vigilante aux conditions de déploiement de l'accès partiel », n'excluant pas « d'en appeler à la raison impérieuse d'intérêt général » en cas de risque pour « la qualité et la sécurité des prises en charge ». Elle a, par ailleurs, rappelé que « la directive communautaire du 20 novembre 2013, relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles, aurait dû être transposée dans le droit français au plus tard le 18 janvier 2016. Depuis cette date, la France est exposée à deux avis motivés de la Commission européenne pour défaut de transposition. Ce manquement à ses obligations constitue la dernière étape avant une saisine de la Cour de justice de l’Union européenne. Aussi la marge de manœuvre du Gouvernement est-elle des plus réduites. »

Laure Martin

Les dernières réactions

  • 24/07/2017 à 16:16
    spitch
    alerter
    Comment sera pris en compte nos alertes en terme de sécurité des patients puisque de toute façon nous ne sommes déjà entendus sur rien ? C'est une belle plaisanterie. N'y a t-il pas de chômage infirmier en France ?
  • 28/07/2017 à 17:39
    Lison
    alerter
    Soyez précis : l'ordonnance est ratifiée à l'Assemblée nationale mais pas encore au Sénat et la loi de ratification n'est pas encore publiée

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